Ecrit le 10 février 2010
Nivelons par le bas !
Un projet de décret du gouvernement prévoit « la réorientation professionnelle des agents de l’Etat ». Comme c’est bien dit ! Concrètement, il s’agit d’accélérer la disparition des fonctionnaires en France. l’agent « dont l’emploi est supprimé dans le cadre d’un projet de réorganisation » de son service sera mis en disponibilité d’office s’il refuse trois postes proposés en remplacement par l’administration, disponibilité sans salaire ! Et s’il refuse encore trois autres postes, il sera licencié.
Il suffira que l’Etat fasse des propositions de reclassement très dissuasives pour que les agents concernés, dont les postes sont supprimés, n’aient d’autre choix que de refuser. Et comme cela va concerner des dizaines de milliers d’agents, estime-t-on de source syndicale, il ne s’agirait donc ni plus ni moins que d’un licenciement, un véritable plan social, sans aucun garde-fou social. Les organisations syndicales craignent que ce dispositif soit utilisé abusivement afin de remplir les objectifs financiers de la révision générale des politiques publiques (RGPP), qui doit « moderniser la fonction publique ». Celle-ci prévoit notamment une vaste réorganisation de la fonction publique départementale, qui pourrait toucher 100.000 postes.
l’argument du gouvernement semble imparable : les fonctionnaires seront ainsi aussi (mal)traités que les salariés du secteur privé. Doit-on donc faire l’égalité en imposant de mauvaises conditions de travail et de salaire à tous ?
2700 €/heure
Si donc la nouvelle politique exige de niveler par le bas, nivelons ! Nivelons ! Le très sérieux journal L’Expansion, qui n’a rien d’un gauchiste, dans son édition du 28 janvier 2010, révèle que les cumuls de mandat chez les grands patrons demeurent une pratique courante. Selon les calculs de L’Expansion.com, « ils perçoivent en moyenne 2750 euros de l’heure passée dans ces conseils d’administration. où leur présence n’est même pas obligatoire... »
Par exemple, « le document de référence de la société Saint-Gobain de 2007 souligne que »les administrateurs se sont vu allouer, à titre de partie fixe, la somme annuelle de 25 600 euros et, à titre de partie variable, 3520 euros par présence effective aux séances « . En somme, même s’il ne participe pas au conseil, l’administrateur perçoit chaque année au minimum plus de 25 000 euros ». Il y a bien des gens qui accepteraient de travailler effectivement 40 heures par semaine pour percevoir ces sommes-là ! (qui s’ajoutent à des salaires plus que confortables, sans oublier les stock-options !)
De par la loi, les grands patrons ont le droit de cumuler 5 mandats dans ces conseils. Ah, la loi est mal faite !
Un exemple, cité par l’Expansion : Gilles pélisson directeur d’Accor devrait percevoir 53 500 euros en 2009 au titre de ses deux mandats chez Bic et TF1. il explique que « les réunions du Conseil d’administration de TF1 demandent peu de préparation et durent deux heures en moyenne ». Ses salariés peuvent donc se rassurer, leur PDG ne perd pas inutilement son temps mais est tout de même rémunéré 2700 euros de l’heure .
Et puisque le gouvernement désire niveler par le bas, qu’il réduise donc la rémunération des administrateurs à deux fois le SMIC (soit 17.64 € de l’heure). Allons, soyons généreux, proposons-leur dix fois le SMIC, soit 88.20 € de l’heure ! Alors il y aurait moins de candidats ! c’est que, en France, une centaine de personnes cumulent 40 % des postes d’administrateurs dans les grandes sociétés !
Baromètre des inégalités : voir ici : http://www.inegalites.fr/spip.php?page=salaire