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Ecrit le 10 avril 2002
La cathédrale St Mac Do
Deuxième conseil municipal de jeunes ce mercredi 3 avril 2002 à 18 h à Châteaubriant. Sur chaque chaise un sac en papier kraft marqué du logo Mc’Do.(prononcez Mac Donald’s, en faisant bien sonner le s à la fin). Dans le sac en papier : un appareil photo (marqué Mc’Do), un ventilateur de poche (marqué Mc’Do), une épinglette dorée portant le M emblématique de Mc’Do, le numéro de mars du magazine de Mc’Do, une invitation pour un repas chez Mc’Do, une plaquette (« L’emploi chez Mac’Donald’s, parlons-en »), un « Twist’ N Fly » marqué Mc’Do, un livre « Mc’Do se met à table » (qui comporte notamment un chapitre intitulé : Malbouffe, parlons-en) et pour terminer une BD de Titeuf oùsq’ya la place de coller 138 vignettes (sauf qu’il faut acheter les vignettes à 0,13 € l’une + 0,91 € de port, ce qui met la Bd à 183 F).
Vous avez dit .... publicité ?
Ah j’oubliais, un CD-ROM d’itinéraires et guide de voyages offert par AOL.
Vous avez dit .... publicité ?
Ensuite les jeunes ont eu droit à un film vidéo à la gloire de ... devinez qui ?
Oui ! Bravo ! Vous avez gagné !
C’était à la gloire de Mc’Do. Il y avait tout dedans, l’ouverture du premier Mc’do à Moscou pendant que tombait le mur de Berlin (raccourci saisissant ! Mc’Do c’est la liberté), l’ouverture d’un Mc’Do je ne sais plus où, l’année où le préservatif était à 1 F. Mêlez à ça les rêves de Mai 68, et Mc’Do qui sponsorise l’équipe de France, vous savez celle qui a gagné la coupe du monde de foot en 1998 . Mc’Do c’est le la modernité, le triomphe, c’est la gloire !
Mc’Do, toujours dans cette bande vidéo, c’est l’organisation impeccable, « les 113 grammes de steack y cuisent en 119 secondes », et même « la hauteur du gazon autour du restaurant est réglementée mais reste secrète ». C’est aussi le modèle des entreprises : y’a les équipiers, les managers, les directeurs, tous ils travaillent ensemble, ils font la fête ensemble, ils s’engagent « socialement » pour aider les enfants et les jeunes en difficulté, en particulier les enfants malades. C’était beau cette vidéo, c’était grand, c’était superlatif ! Il y manquait juste José Bové et les salariés qui se font licencier ... (Mais ceux-là , on ne l’a pas dit, c’est sûrement des mauvais coucheurs)
Vous avez dit ... publicité ?
Le responsable de plusieurs Mc Do de la région de Rennes, M. Mario Piromalli, qui s’était déplacé pour ce Conseil Municipal de Jeunes, n’a pas lésiné sur les compliment : il a dit aux jeunes qu’il les admirait « Vous avez un poids sur les épaules en acceptant cette tâche [au conseil de jeunes] », il les a invités à la soirée privée qui sera donnée la veille de l’inauguration officielle du Mc’Do de Châteaubriant et leur a proposé de constituer une commission pour présider, avec lui, cette inauguration.
Il a parlé du « hamburger citoyen » (vous savez, celui qui conduit à l’obésité citoyenne et au cholestérol citoyen, mais ça il ne l’a pas dit). Il a affirmé que « des communautés entières nous accordent leur confiance ». Et puis il a raconté une histoire, qu’on en avait les larmes aux yeux : deux maçons sont au pied du mur. Le premier dit à l’autre : « Que fais-tu ? - Je construis un mur » et l’autre interroge à son tour : « Et toi, que fais-tu ? - Moi ? je construis une cathédrale » .
Eh bien voilà , on va avoir une cathédrale consacrée à Saint Mc’Do à Châteaubriant. M. Mario Piromalli, qui a été, dans sa jeunesse, cuisinier du Shah d’Iran, l’a dit tout net : « une ville qui n’a pas son Mc’Do n’est pas une ville dynamique ».
Vous avez dit ... publicité ?
On peut se demander
si une mairie qui se prête
à une telle opération
de publicité commerciale,
notamment vis-Ã -vis d’un
Conseil Municipal de jeunes de 12-15 ans,
particulièrement malléables,
ne peut pas être accusée,
sûrement pas de délit,
mais sûrement de favoritisme.
Une mairie se doit en effet
de conserver une stricte neutralité
en ce qui concerne la concurrence
commerciale (ou industrielle).
Soirée Diji
A part cette publicité, excessive, qui a pris pas mal de temps, les jeunes ont discuté de la soirée DiJi qu’ils vont organiser (soirée Disc-Jockey, lecteurs ignares que vous êtes !) qui aura lieu le 1er juin 2002, de 20 heures à une heure du matin, pour les 12-16 ans, à la Halle de Béré. Les adultes du Conseil Municipal (Ã défaut de la police municipale qui a été refusée) seront priés d’assurer la sécurité. Entrée 3 €
La fête à Momo
Et puis il a été question de la Fête de la Musique. « Maurice » (= Deniaud) a eu une idée géniale : transformer les membres du Conseil Municipal Jeunes en distributeurs de tracts pour indiquer l’emplacement des podiums et les horaires de passage des groupes. Chaque jeune devra porter un T-shirt spécial. Sauf que ça c’est l’idée de « Maurice ». Mais les jeunes ont dit non. Veulent pas être des jeunes sandwiches.
Ils ont demandé aussi quels seraient les groupes présents « parce que l’an dernier il n’y avait pas grand chose » a dit une jeune fille de bonne famille. Cet âge est sans pitié ! Justement la municipalité était très contente de sa fête de la Musique 2001 et voilà que les jeunes disent : « bof ! ». « C’est que cela a un coût » a dit « Maurice » qui a annoncé 4-5 groupes et peut-être une surprise. Mais on n’a pas su quelle surprise. Si c’est comme le concert de Jazz-Open du 24 mars pour lequel plus de 500 invitations ont été lancées .... pour une quarantaine de participants ... c’était plutôt raté. Pourtant, dit la chanson, « Maurice, Maurice, il faut qu’tu réussisses ! » . Enfin bon ! passons
Aire
Passons à la piste d’initiation au skate-board du Parc de Radevormwald. Il a été question de mini-rampe très adaptée aux rollers « avec une qualité d’émotion et de sensations ». Un champion-spécialiste, David Provost, a parlé d’y installer des trottoirs, un plan incliné pour en faire « une aire sportive de proximité » (ouf ! on n’a pas parlé d’une aire citoyenne !). Il a été question aussi de plein de choses (qui ne résultaient apparemment pas de la demande des jeunes), avec des mots compliqués que peut-être les jeunes connaissent mais que les journalistes présents ont été incapables d’écrire et même de répéter. Passons.
« Avez-vous un plan ? » a demandé un jeune. décidément, cet âge est sans pitié. Non, il n’y avait pas de plan, juste trois feuilles en couleur qui ont circulé.
Podo, pédo, quoi ?
Tiens justement, à propos de circulation, il a été question de l’aménagement du rond-point de la Ville en Bois. LÃ non plus il n’y avait pas de plan. On a seulement appris qu’il y aurait en réalité deux rond-points giratoires, avec « ilôts balisés de petits luminaires bleus », qu’il y aurait une piste cyclable dessinée jusqu’au ... Mc’Do, et une réfection de la signalisation (pas plus de 7 indications par poteau) et des « dalles podotactiles » pour les personnes non-voyantes. « Podotactiles » ... ......qu’on peut toucher avec les pieds ...
Allez, salut ! Pas de questions diverses, on se reverra le 24 avril pour les prochaines réunions de commissions, et fin mai pour préparer la soirée DiJi du 1er juin et la fête de la musique.
Hé oh, les adultes, où étiez-vous ? Personne pour assister au Conseil Municipal des Jeunes ? Il est vrai que la presse n’en a été avisée que l’après-midi même !
Licencié, un employé de Mac Donald’s gagne en cassation
PARIS (info AFP), le 29 mars 2002
Un employé d’un restaurant Mac Donald’s, licencié pour avoir donné deux sandwiches à des clients qu’il connaissait, a gagné en cassation le procès engagé contre son employeur.
« L’unique cession gratuite à des clients de l’employeur de produits d’infime valeur marchande n’est pas une cause sérieuse de licenciement », déclare la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt daté du 21 mars. La société Lornan, qui gère un Mac Donald’s à Nancy, avait licencié Franck Poli pour « faute grave », c’est-Ã -dire sans préavis et sans indemnité, lui reprochant d’avoir fait cadeau de produits appartenant à l’entreprise.
Le vendeur licencié avait saisi la justice et rétorquait que ces produits n’étaient plus susceptibles d’être vendus.
La Cour de cassation a jugé que non seulement il n’y avait pas de « faute grave », c’est-Ã -dire de faute nécessitant le départ immédiat du salarié de l’entreprise, mais que de plus il n’y avait pas de motif de rupture du contrat de travail, même avec préavis et indemnités, puisque le seul don reproché à M. Poli portait sur « deux produits d’une valeur totale minime ».
La jurisprudence de la Cour de cassation, en matière de vols reprochés à des salariés, n’admet la sanction du licenciement que si les faits sont importants, ou répétés, mais non s’ils sont ponctuels, de faible valeur, ou commis par un salarié jusque là irréprochable. Le dossier devra être rejugé par le conseil de prud’hommes de Briey.
(Ã propos de cette piste de skate-board, voir plus loin)
Ecrit le 17 avril 2002 :
On achète bien les enfants
Un film célèbre, naguère, portait pour titre « on achève bien les chevaux ». Par analogie, après avoir vu tous les cadeaux « Mc’Do » donnés aux jeunes élus du « Conseil des Jeunes », après avoir entendu les réactions d’un certain nombre de parents et d’adultes, on peut se dire qu’Ã Châteaubriant « on achète bien les enfants ».
Le comportement de la municipalité, en autorisant cette pratique commerciale, est très maladroit : il tend à faire croire que les élus ont des avantages que les citoyens ordinaires n’ont pas et que, pour s’implanter, les entreprises doivent faire des cadeaux aux élus. C’est comme ça que se produisent « les affaires » ...
Quel rôle pour les jeunes ?
Le problème du fonctionnement du Conseil de Jeunes se pose donc déjà avec acuité :
1) Quel est le rôle des groupes de travail ? Ont-ils pouvoir de décision ?
Il est bien évident que, pas plus que les commissions municipales, les groupes de travail des jeunes ne peuvent avoir pouvoir de décision. De plus, dans le cas de jeunes mineurs, reste toujours posé le problème de la responsabilité des parents
Et pourtant : quelques jeunes ont imaginé de faire une soirée « Diji » (disc-jockey) pour les 12-16 ans. Il a été question de la plage horaire 20h - 1h du matin (le petit groupe de travail souhaitait 4 heures du matin !). Les autres jeunes du « Conseil des Jeunes » ne l’ont appris que lors de la réunion plénière du 3 avril. Ils ont discuté de questions pratiques (affiches, intervenant musical, boissons, sécurité, etc, étant entendu que les jeunes ne veulent aucun adulte dans la salle) mais nul ne s’est posé la question de savoir si les parents étaient d’accord pour laisser sortir les jeunes pour une « boum » dès l’âge de 12 ans, jusqu’Ã une heure du matin. C’est la porte ouverte à n’importe quoi. On se plaindra après du manque de responsabilité des parents....
2) Y a-t-il des sujets dont les jeunes ne doivent pas parler ?
Un ou deux jeunes auraient bien voulu reparler du problème de l’espace vert détruit à l’école des Terrasses (et qui va être refait, voir la Mée de la semaine dernière), mais la question avait été balayée lors d’un groupe de travail (« Je ne veux plus en entendre parler, ça c’est de la politique ! » a dit « Jacqueline » Bombray). De ce fait les jeunes n’ont plus osé en parler en réunion plénière de peur de se faire rembarrer une fois de plus.
Le rôle d’un conseil de jeunes devrait être d’apprendre le « courage politique » et l’intérêt pour tout ce qui se passe en ville et pas seulement les questions d’équipement commercial ou d’équipement de loisir.
3) Ce qui a été évoqué en groupe de travail doit-il être, ou non, discuté en assemblée plénière ?
On a constaté par exemple que c’est seulement le groupe « sports-loisirs » qui a discuté du skate-board à installer au parc de Radevormwald. Des mots très techniques ont été employés par le champion de skate David Provost (qui, soit dit en passant, n’a été invité à participer à la réunion que l’après-midi même). Un bon nombre de jeunes n’ont pas compris de quoi il parlait, malgré cela, la seule question qui leur a été posée a été celle-ci : « Etes-vous d’accord ? ». Ils ont dit oui, comme ça, sans chercher à en savoir davantage. Puisque la municipalité était d’accord, on ne dit plus rien ? C’est comme ça qu’on apprend aux jeunes à faire confiance sans contrôler ? A accepter sans discuter ?
3) Les jeunes ont-ils le pouvoir de décider sans avoir eu le temps d’en parler à leurs camarades non élus ?
D’abord il ne faut pas leur laisser croire qu’ils ont pouvoir de décision. Le « Conseil de Jeunes » ne peut avoir qu’un rôle consultatif. Seul le Conseil Municipal (adultes), élu par les citoyens, a pouvoir de décision. Ensuite le rôle de la municipalité devrait être d’expliquer aux jeunes qu’Ã partir des informations qu’ils ont eues, ils doivent réfléchir, en parler avec les jeunes de leur âge qui les ont élus, et aussi avec leurs parents. Une vraie instruction civique doit apprendre aux jeunes qu’une décision qui touche la collectivité doit se faire en concertation avec les citoyens, et ne pas se prendre à la légère.
Formation
La municipalité a voulu lancer un Conseil de Jeunes. Elle a eu raison. Mais elle ne doit pas l’utiliser pour faire la publicité d’une entreprise, quelle qu’elle soit, ni pour servir de chambre d’enregistrement. Elle doit ouvrir les yeux des jeunes sur l’ensemble des problèmes de la cité, susciter toutes leurs interrogations, assurer un apprentissage de la démocratie participative. C’est une lourde tâche dont il faut bien prendre la mesure !
Ecrit le 24 avril 2002 :
La Faute au Conseil Municipal de Jeunes
(Communiqué des Verts du 16 avril 2002)
Ce qui s’est passé au conseil municipal des jeunes de Châteaubriant le 3 avril dernier dépasse l’entendement ! La presse s’est faite l’écho de cette séance au cours de laquelle un certain Mario Piromalli, venu présenter le projet de construction du futur restaurant Mac Donald’s de Châteaubriant, a distribué des cadeaux aux 32 jeunes élus. Les voilà , de fait, transformés en publicitaires bénévoles de Mc’ Do auprès de leurs copains. Que devient, dans cette affaire, la noblesse de l’engagement au service de la cité qu’est l’engagement municipal : une occasion de recevoir des cadeaux ?
Comment une municipalité peut-elle se prêter à une telle opération ? Inconscience ou cynisme politique ? Une telle affaire laisse pantois les citoyens soucieux de pratiques politiques correctes à tous les niveaux, y compris au niveau municipal. Qui peut oublier la défiance d’un certain nombre de citoyens à l’égard de l’engagement politique suscitée par les affaires" ?
Qui peut oublier l’impact que des pratiques de cadeaux offerts par des firmes à des partis politiques ou à des élus ont provoqué chez de nombreux citoyens tentés, alors, par le « tous pourris » ?
Or l’aspect pédagogique citoyen des propositions relatives au conseil des jeunes devrait être le premier critère, le premier souci quant aux propositions à soumettre à ce conseil municipal des jeunes. Il s’agit de l’instance où des jeunes, élus par leurs pairs, s’initient aux pratiques de la vie démocratique, du « vivre ensemble » qu’est l’exercice de l’activité politique.
« C’est la première fois que nous sommes accueillis par un conseil de jeunes » aurait dit M. Piromalli. Assurément, les municipalités qui commettent des fautes de cette envergure ne doivent pas être nombreuses !
Contact : Maurice Pucel
40, rue François Mauriac 02 40 28 14 30
Une pétition
A la suite du Conseil Municipal des jeunes du 3 avril 2002, des réactions diverses ont eu lieu au sein de la population castelbriantaise et, nous venons de l’apprendre, des pétitions ont été signées et remises au maire. L’une d’elles dit ceci :
Des Castelbriantais sont scandalisés :
" La presse locale a évoqué la réunion du conseil municipal des jeunes qui s’est tenue le 3 avril. Les personnes sous-signées tiennent à faire part de leur émotion et de leur réprobation à propos de l’utilisation qui en a été faite pour la promotion d’une société, Mac Donalds en l’occurrence.
Quand une municipalité met en place un conseil municipal de jeunes, elle prend une décision très positive. C’est en effet un lieu où ces jeunes peuvent s’ouvrir à la vie de la cité, au dépassement de l’intérêt strictement individuel, à la découverte des réalités du « vivre ensemble » de la commune. C’est le début d’un exercice démocratique, une pédagogie citoyenne dont le bénéfice peut être important, même si on ne le perçoit pas immédiatement.
Or, la presse rapporte « une véritable opération de séduction à destination des jeunes conseillers » (Ouest-France) qui a eu lieu lors de cette réunion du conseil municipal des jeunes, il s’agissait de l’ouverture prochaine d’un restaurant Mac Donald’s. « Les 32 conseillers n’ont pas été insensibles à ces cadeaux » (Ouest-France). Quelle image désastreuse de ce conseil et donc de la politique, est ainsi présentée à tous les citoyens !
Nous ne pouvons pas oublier le discrédit qui est encore porté sur des partis politiques à propos « des affaires » et l’impact désastreux que des pratiques de cadeaux offerts à des élus ou des partis politiques ont provoqué chez de nombreux citoyens tentés par le rejet du « tous pourris ».
Mais comment l’indépendance d’esprit, l’esprit critique, indispensables à l’exercice de la démocratie, de ses contraintes mais aussi de ses valeurs, pourraient-ils être acquis par ces jeunes soumis à cette opération de marketing ?
Nous habitants de Châteaubriant, soucieux comme tous d’un développement de la citoyenneté et du civisme, protestons et demandons que des valeurs éthiques, morales, président dorénavant au fonctionnement et aux choix qui seront proposés au Conseil Municipal des Jeunes de Châteaubriant. "