Ecrit le 9 octobre 2013
Les municipales approchent. Grande nouveauté : la parité, dans les listes, sera respectée dans les communes de plus de 1000 habitants et souvent dans les plus petites communes. C’est un grand pas en avant. Mais comment peut-on être élue et assurer les charges de famille ? Comment peut-on être femme et maire ? Par quelles voies accède-t-on à des responsabilités communales ? C’est ce que nous avons voulu savoir en allant interviewer Claire Théveniau, maire de Puceul.
De la garderie à la mairie
Claire Théveniau est née en 1968, elle a donc 45 ans, un BTS Technico-commercial en poche et l’envie d’une vie professionnelle. Mais les circonstances de la vie en ont décidé autrement : son époux est venu travailler en Loire-Atlantique où, à part quelques postes épisodiques, Claire n’a pas pu trouver un emploi. Le couple a acheté une vieille bâtisse à Puceul en 1992 parce que le logement y est moins cher qu’Ã Nantes, et parce que la commune est à 2 km de la voie rapide Nantes-Rennes. La commune faisait moins de 600 habitants à l’époque. Et puis deux filles sont nées. « Fallait-il les laisser pour aller travailler dans une grande ville ? J’ai choisi de rester auprès d’elles, d’assurer la solidité affective de mes enfants. Je ne regrette rien » dit-elle.
Pour autant, Claire n’est pas restée tranquillement à la maison entre les couches et les casseroles. Très vite, elle s’est investie dans le tissu associatif notamment à la Halte-Garderie qui, à l’époque, existait sur Saffré et Nozay. « J’ai sympathisé aussitôt avec d’autres familles, qui restent mes amies. Puis j’ai été sollicitée pour être membre du bureau. En suivant mes filles, j’ai pu participer aux activités du Centre Culturel La Mano. En parallèle, j’allais aux cours de couture et de cuisine, et d’économie sociale et familiale ». Elle se souvient que, dans son enfance, les cours de cuisine et couture permettaient un brassage des élèves, « la possibilité d’exprimer des talents, de réduire la distance entre les »meilleurs« de la classe et les moins bons. C’étaient des cours où nous parlions ! Cela manque à notre époque ». [Ndlr : pourquoi les « meilleurs » sont-ils exclusivement ceux qui réussissent dans les matières intellectuelles ?].
Et de fil en aiguille, Claire a pris des responsabilités dans l’association de parents d’élèves. Elle qui avait fréquenté l’école publique dans son enfance, avait mis ses filles à l’école privée parce que c’était (c’est toujours) la seule école de Puceul. « A l’époque, nous avions un projet d’extension des locaux. Ce fut pour moi l’occasion de réfléchir aux questions de terrain, de construction, de financement ».
C’est alors que Claire Théveniau a été remarquée par le maire de Nozay, [qui était Christian de Grandmaison] et a pu participer à des réflexions à l’échelle intercommunale. Le maire de Puceul, à l’époque, lui a proposé de devenir conseillère municipale, ce qu’elle a accepté. « Il était plutôt classé à droite. J’ai donc été cataloguée comme »de droite« ». [Ndlr : quand on la connaît, on se dit que Claire Théveniau est plus proche de la gauche, de par ses positions sociales !]
Un engagement venu de loin
Après un mandat comme adjointe au maire, Claire Théveniau est devenue maire en 2006. C’est un peu un héritage familial ! « Chez moi, dans un petit village près de Châteauroux, mon père était adjoint au maire. Chez nous, dans un contexte familial élargi, c’était la maison du bon dieu. La grand-mère, les parents, les enfants, et l’ouvrier agricole, nous vivions très proches. Je sais ce qu’est la vie en communauté, je sais ce qu’est le partage, avec ses satisfactions (il y a toujours quelqu’un sur qui on peut compter), mais aussi avec ses tensions (la cohabitation de plusieurs générations n’est pas sans poser de problèmes) ». Une bonne « école » pour apprendre l’écoute, la négociation.
« Je suis issue du monde rural. Je peux même dire que nous étions des très-petits paysans, et je n’osais pas inviter des camarades à la maison. A l’école publique, il y avait des discussions politiques dans la cour de récréation et nous étions classés comme »de droite« : mes soeurs, mon frère et moi, nous en avons beaucoup souffert. Et pourtant mon père avait des actions de gauche ! Comme lui, je travaille dans l’intérêt général, pour apporter quelque chose aux gens. Et, tout en étant consciente des manques de mon enfance, je sais aussi les richesses de ma vie passée. Et si je suis, maintenant, si attachée à offrir des activités culturelles et sportives à tous les enfants, [que je n’ai pas eues dans mon enfance], c’est pour que tous puissent en bénéficier, quelle que soit leur condition familiale. ».
« La vie associative, c’est formidable car on y trouve le plaisir d’être ensemble, de créer des liens, de sortir de chez soi pour agir avec les autres » dit-elle encore.
Alors, de la vie associative à la vie municipale, il n’y a qu’un pas. « Nous avons un Conseil Municipal par mois, et du travail en commissions. Je suis au courant de tout et en même temps je délègue beaucoup à mes adjoints. Nous avions fixé des priorités pour nos 6 ans de mandat, nous les re-précisons en début d’année. Il y a de réels échanges entre nous et nous savons, si nécessaire, faire appel à des cabinets spécialisés, sans pour autant nous départir de notre pouvoir de décision ».
Intercommunalité
L’intercommunalité est une évolution inéluctable. Chacun des conseillers municipaux de Puceul est membre d’une commission intercommunale. « Ils m’ont tous dit qu’ils avaient eu du mal à s’y engager mais que cela leur a permis de prendre confiance en eux dans la discussion avec des élus d’autres communes ».
Pour les prochaines municipales, Claire Théveniau commence à choisir de futurs élu-e-s, sollicitant les énergies, les compétences, les envies. « Je sais ce que je vais leur donner à faire ».
Etre élu, dans une petite commune, c’est être proche des gens. Les gens viennent facilement nous voir. « Soyez ouverts, prenez le temps de discuter, c’est ce que je dis aux élus actuels. Cela se constate en particulier autour du centre communal d’action sociale. Les gens ont besoin d’accompagnement, d’être orientés vers les services pouvant les aider. Ils ont besoin d’être reconnus dans les valeurs de leur existence. Ils se confient volontiers et, d’être écoutés par le maire, c’est déjà beaucoup. Nous cherchons ensemble des solutions et quand je les écoute, je revois ce que j’ai vécu dans mon enfance ! »
« Je rencontre aussi les futurs mariés, et les nouveaux habitants de la commune : ils apportent de nouvelles idées. »
La difficulté, c’est de choisir entre l’intérêt général et les intérêts particuliers. Car les dossiers sont nombreux et pas simples. Par exemple la commune de Puceul s’est engagée dans la construction d’une station d’épuration. Et aussi dans la réfection de la route RD35 qui traverse la commune « Nous y travaillons la circulation des piétons, des cyclistes, des automobilistes et aussi, l’accessibilité aux personnes handicapées, sans oublier le stationnement. L’école publique est dans nos projets, mais il n’y a pas motivation des familles »
En intercommunalité, Claire Theveniau suit les questions sociales : analyse des besoins sociaux, accueil des jeunes enfants et des adolescents, projet éducatif local, aménagement des rythmes scolaires, personnes âgées, groupe de veille sociale et la commission locale d’insertion.
On sent que tous ces sujets la touchent personnellement et qu’elle s’y engage.
Et le chameau !
Claire Théveniau, avec son équipe, s’intéresse aussi aux questions artistiques. Par exemple la commune de Puceul a pu mettre un local à disposition d’un groupe théâtral, la compagnie Paris Bénarès : des marionnettes à taille humaine, un fil-de-fériste, un homme canon, deux gros animaux, l’oiseau et le chameau. « La compagnie a participé au spectacle de Noë l et au marché du terroir et s’est rendue à la porte de l’école et au péri-scolaire. Le chameau a provoqué l’émerveillement des enfants ».
Puceul c’est aussi le développement commercial qui accompagne l’accroissement de population : restaurant, bar-tabac, pizzas à emporter, cave, coiffure, matériaux agricoles, plombier, chauffagiste, coopérative agricole la commune est bien pourvue, d’autant plus que c’est sur son territoire que se trouve la grande zone industrielle de l’Oseraye.
Et, fait extraordinaire pour une petite commune de 1000 habitants : la municipalité a aménagé un cabinet médical, un praticien s’y est installé depuis juillet 2012 et ne suffit plus à la demande. L’installation d’un deuxième praticien est en cours.
Pour toutes ces raisons, Claire Théveniau aime son travail de maire et a la santé et l’enthousiasme nécessaires pour faire un autre mandat à partir de 2014... en continuant à animer une équipe municipale, à être sensible aux besoins de la population et à travailler en intercommunalité. Vaste programme !