Ecrit le 30 octobre 2010
La France connaît une crise économique sans précédent, qui n’est pas récente si l’on se souvient de ce qu’avait dit François Fillon le 21 septembre 2007 "Je suis à la tête d’un Etat qui est en situation de faillite sur le plan financier, je suis à la tête d’un Etat qui est depuis 15 ans en déficit chronique, je suis à la tête d’un Etat qui n’a jamais voté un budget en équilibre depuis 25 ans. Ca ne peut pas durer« , avait martelé F.Fillon, Premier Ministre, à Calvi (Haute-Corse), répétant son engagement de »ramener le budget de l’Etat à l’équilibre avant la fin du quinquennat« . Sinon, avait-il mis en garde, »on ne pourra rien bâtir de solide ni pour la Corse ni pour aucune autre partie du territoire national".
Eh oui, nous y sommes et le tort du gouvernement Hollande est d’avoir voulu croire qu’il pourrait y échapper, au lieu d’appeler les Français à un sursaut national. Ce gouvernement est maintenant obligé de prendre des mesures douloureuses, les unes après les autres. On entend alors, très peu, ceux qui ont mal, et très beaucoup ceux qui crient avant d’avoir mal.
Ceux qui ont mal, vraiment mal, ce sont les chômeurs qui ne voient devant eux que portes fermées, et ceux qui voient leur emploi disparaître ou être condamné à terme, ceux qui sont des gagne-petit et n’ont aucun espoir d’amélioration de leur situation. Tous ceux-là souffrent en silence, encore heureux s’ils ne sont pas l’objet de la stigmatisation de leur entourage.
Les entreprises vont bien
Et puis il y a les autres, qui crient très fort de peur d’avoir mal. Le Medef en particulier hurle à la mort des entreprises. Et pourtant (1).
– Les grands groupes du CAC 40 voient leurs profits croître chaque année et ne paient en moyenne que 10 à 15 % d’impôts sur les sociétés, en servant des dividendes toujours plus confortables, à leurs actionnaires.
– Globalement, comme l’indique une étude du cabinet Altavalue effectuée sur plus de 46 000 entreprises (voir les Echos du 7 octobre 2013), les bilans sont dans l’ensemble solides et même renforcés.
Pour ces entreprises de taille moyenne, l’excédent brut d’exploitation (le fameux EBE que le gouvernement voulait taxer) devrait croître de 7% en 2013 après une stabilité en 2012.
Bien sûr, tous les secteurs ne sont pas au même niveau et certains souffrent plus que d’autres, mais la vision globale de bonne santé donnée par cette étude relativise les discours alarmistes du patronat et de certains entrepreneurs, repris régulièrement par la grande presse qui cherche à entretenir le déclinisme et le manque de confiance.
Redistribution
Selon Denis Clerc, dans « Alternatives économiques », le champion toutes catégories des tireurs sur tout impôt qui bouge, c’est Jean-Francis pécresse, dont tous les éditoriaux depuis un mois et demi portent sur ce thème. Ainsi, le 9 octobre 2013, il écrit : « quand 2 % des ménages acquittent à eux seuls 40 % du produit de l’impôt sur le revenu : eux qui ne perçoivent que 13 % des revenus -, la moindre hausse de la pression fiscale a des effets d’éviction passifs. »
Ah oui, et chacun pleure en imaginant qu’il en sera de même pour lui-même. Sauf que ces 2 % des ménages français les plus riches : 1,3 millions de personnes, 600 000 ménages : détiennent aussi un quart du patrimoine total et, s’il payaient en 2011 en moyenne 38 000 € d’impôt (sur le revenu et l’habitation) par an et par ménage, c’est parce que leur revenu avant impôts était en moyenne de 300 000 €. Après impôts, il leur restait donc, en revenu disponible, 262 000 €, un peu plus de 20 000 € par mois. Soit 8 fois plus que le ménage moyen, et 25 fois plus que chacun des ménages du dixième le plus pauvre.
J.-F. pécresse préférerait-il que l’impôt pèse sur ce dixième le plus pauvre (mais à eux tous, ces pauvres n’ont pas de quoi payer la moitié de l’impôt et il ne leur resterait rien pour vivre) ?
Ou même, peser d’un montant égal sur chacun des ménages (chacun verrait alors son revenu annuel amputé de 2200 €) ?
Que les 2 % les plus riches payent 3 fois plus d’impôts que leur part dans le revenu disponible des ménages ne paraît pas anormal : c’est l’objet même d’un impôt progressif.
En fait, dénoncer le « matraquage fiscal », c’est refuser la solidarité. En gros, les couches populaires (le dernier tiers de la population) payent nettement moins pour leur protection sociale qu’elles ne perçoivent, tandis que c’est l’inverse dans le tiers le plus favorisé de la population. () Les pigeons, poussins et autres volatiles s’estiment plumés, ils le disent haut et fort, et ce discours trouve un écho même dans les couches moyennes (le tiers central de la distribution), voire populaires, qui ont tendance à s’estimer victimes également, mais au bénéfice des immigrés, ce qui fait les affaires du FN .
Quant aux pauvres clubs de football qui veulent faire grève en raison de la taxation des salaires de plus d’un million d’euros par an, suggérons-leur de limiter les salaires à 999 999 € ce qui ferait tout de même 83 333 €/ mois pour leurs joueurs.
Epargne
Jusqu’Ã présent, les PEL (plans d’Epargne Logement ouverts avant 2011), les PEA (Plans d’Epargne en Actions) et les contrats d’assurance-vie étaient taxés au taux en vigueur au moment où la plus value était générée. Un cafouillage gouvernemental donne à penser qu’ils pourraient peut-être être soumis au taux en vigueur lorsque l’épargnant encaisse son bénéfice. Par exemple, une plus-value de 1 000 € acquise en 1997 aurait eu 39 € de prélèvements sociaux. Elle serait désormais soumise à 15,5 %, soit 155 €. Une plus-value de 1000 € acquise en 2009 aurait eu un prélèvement de 120 €. Elle serait désormais taxée à 15,5 %, soit 155 €.
Explication : les prélèvements qui ont commencé doucement avec 0,5 % en 1996 sont ensuite passés à 3,9 % en 1997 puis 10 % l’année suivante, 12,1 % en 2009 et ainsi de suite jusqu’Ã atteindre 11,5 % en octobre 2011. Tout cela s’est passé sous des présidents de la République de Droite ! Lorsque le précédent gouvernement a relevé les taux de prélèvements sociaux de 4,5 points entre 2009 et 2012 pour l’ensemble des autres produits d’épargne, ces nouveaux taux se sont appliqués dans les mêmes conditions que la mesure proposée, c’est-Ã -dire aux gains générés sur les années antérieures. Ces mesures ont été validées par le Conseil constitutionnel. Et la Droite n’a pas crié à la spoliation des épargnants.
Rappelons que la taxation à 15,5 % ne concerne pas les livrets A, les livrets de développement durable, les livrets bleus, les livrets d’épargne populaire, les livrets jeunes ...
Et l’écotaxe ?
Cette taxe a pour objectif de favoriser les circuits économiques courts en taxant les déplacements longs. Le dispositif vise à réduire la pollution générée par le transport routier. « L’un des objectifs de cette taxe est d’inciter les sociétés de transport à se doter de camions plus écologiques, les taxes sont donc calculées aussi en fonction de la catégorie de véhicules utilisés. La taxe est majorée entre 10% et 20% pour les véhicules les plus polluants et minorée de 15% pour les moins polluants », souligne une porte-parole de la société Ecomouv, désignée par l’État pour installer le dispositif. Le montant de cette taxe s’élèvera, pour les poids lourds, entre 8 et 14 centimes d’euros par kilomètre. Le tarif varie en fonction des routes empruntées et du type de camion utilisé. Elle sera sans doute répercutée sur les consommateurs, mais si peu ! José Bové explique : « quand on augmente de 30% le prix des produits agricoles, la répercussion sur les prix à la consommation n’est que de 1,5% car ce n’est pas la matière première qui fait le prix du produit, mais tout ce qu’il y a autour, comme les frais d’emballage, de marketing et de promotion ».
(1) source
(2) étude Altavalue