Ecrit le 6 novembre 2013
Henri Baron est décédé le 26 octobre 2013
Il est parti comme il a vécu : discrètement. Même ses obsèques ont été modestes, effectuées dans la plus stricte intimité. Et si ses amis se réuniront le dimanche 17 novembre, ce sera pour le plaisir de l’évoquer et pour la joie de se retrouver.
Pour ceux qui ont eu la chance de le rencontrer, Henri Baron ne pouvait laisser indifférent. Il avait connu de grandes difficultés dans son enfance et même dans les débuts de sa vie professionnelle et en avait gardé une grande attention aux autres et le désir de s’engager pour aider les autres à sortir de leurs difficultés.
Sans aucune gloriole, sans aucune auto-satisfaction, il fut Maire et Conseiller Régional. Malheureusement le suffrage universel ne le choisit pas comme député : c’est pourtant d’un homme comme lui que la France a besoin.
En toute circonstance, il savait écouter les gens, évaluer une situation, réfléchir par lui-même et faire des propositions innovantes. Il cherchait toujours le compromis acceptable par toutes les parties. Et quand il parlait, on l’écoutait : ce n’était pas un orateur, il n’enflammait pas son auditoire, mais sa façon de décrire les situations, avec précision, avec clarté, en imposait naturellement. Et toujours avec un grand calme (du moins en apparence !) qui savait apaiser les réactions parfois trop violentes de ses amis, comme de ses adversaires.
Dès 1966-67, il faisait partie d’un « groupe d’études socialistes » à Châteaubriant, où l’on trouvait Jean Gilois, Bernard Lambert, André Roul, René Philippot, Amand Chatellier, gérard Fleury et d’autres. Dans ce groupe on refaisait déjà le monde, discutant plus-values, propriété de la terre, capitalisme, droit syndical, éducation Des débats de haut niveau qui remettaient en cause les idées communément admises et obligeaient à aller plus loin (ces discussions manquent cruellement à notre époque). Henri Baron y prenait une part très active et c’est sans hésitation qu’il rejoignit le grand mouvement de contestation de mai 68. C’est lui qui, le premier, vint proposer les pommes de terre qu’il avait sorties de son champ et qui furent données aux ouvriers en grève. Ce fut le début d’une vaste opération coopérative de ravitaillement.
On le retrouve plus tard comme président de la Chambre d’Agriculture, pendant 17 ans, jeté dans l’action collective en pleine période de grande sécheresse. Des coups il en a pris, de tous les côtés, traçant cependant vaillamment son sillon, pour améliorer la retraite des plus petits agriculteurs, mais aussi pour améliorer la qualité sanitaire des troupeaux (grâce à l’identification des bovins lait et viande) et conduire à un livre blanc de l’élevage.
Par la suite on le retrouve à Châteaubriant-Initiative , pour l’aide aux créateurs d’entreprise, et pendant plus de 10 ans à l’ACPM (Ateliers et Chantiers du Pays de la Mée) pour le soutien à ceux qui veulent s’insérer dans le monde du travail. Il ne se pose jamais en expert, il a toujours le souci de valoriser les personnes qu’il côtoie. Il était aussi membre du CICPR (Centre International de culture paysanne et rurale), toujours pour la valorisation de l’histoire des techniques et surtout des agriculteurs.
Jacques Auxiette, qui l’a bien connu, écrit : « Figure reconnue de l’agriculture française, () il a incontestablement marqué de son empreinte le monde agricole de l’Ouest. Parce qu’il l’incarnait à la perfection, il a contribué à faire émerger l’image du » paysan citoyen « . Henri Baron était aussi un homme de gauche et un socialiste engagé. Maire de Fercé de 1983 à 1995, il a également été conseiller régional des Pays de la Loire de 1998 à 2004. c’est donc comme élu de l’opposition de l’épo-que que j’ai été amené à le connaître, à découvrir sa passion du débat politique et la force de ses engagements. Notre région, et son agriculture, lui doivent énormément ».
Je tiens aussi à saluer son engagement européen. Peu le savent : Henri Baron a été un président attentif et moteur du développement du bureau inter-régional des régions Bretagne, Pays de la Loire et Poitou-Charentes à Bruxelles. Sa gentillesse comme son investissement pour cette fonction bénévole aura marqué ses nombreux interlocuteurs ".
L’adieu du Parti Socialiste
Les militants et sympathisants de la section du Parti socialiste de Châteaubriant souhaitent exprimer leur très grande émotion à l’annonce de la disparition de leur cher camarade Henri Baron. " Henri a milité au sein de la section durant de longues années, contribuant largement à des débats très riches. Par la sincérité de son engagement et toujours avec sagesse, il a contribué à construire une société plus solidaire en tant que maire PS dans sa commune de Fercé et au Conseil Régional des Pays de la Loire où il fut élu minoritaire aux côtés de Jacques Auxiette jusqu’Ã la conquête de la majorité. Elu paysan, il a oeuvré pour une agriculture citoyenne à la tête de la Chambre d’agriculture. Et pour compléter un emploi du temps déjà bien rempli, il était un inlassable travailleur de la construction européenne.
Militant de terrain, Henri aimait les rencontres , apprenait des autres et transmettait sans relâche. Pour cet homme courtois, l’adversaire n’était pas un ennemi, car le débat contradictoire nourrit la démocratie.
Nous aimions l’homme. A chaque rencontre, nous percevions l’immense amour et le respect au sein de la famille Baron, le soutien sans faille de sa chère Thérèse et de ses enfants qui ont suivi son engagement. Henri est un modèle pour nous tous et sa disparition nous plonge dans une immense tristesse ".
Poème
La mort d’Henri m’a paralysé durant 48 heures. J’aurais voulu dire quelques mots ou les écrire, j’en étais incapable. Pour les lecteurs de
H comme humain.
Quand il s’agit d’un homme, tout est important, aimait-il dire. Il s’est battu contre les aliénations, les exploitations de la personne humaine. Il croyait à l’homme debout, libre et responsable.
E comme équipe.
Elle lui était indispensable. Avec les échanges,les rencontres , la vie de groupe, il recevait des autres, puis avec sa clarté d’analyse et d’expression, savait transmettre avec conviction.
N comme nature.
C’est là que se situait le paysan enraciné dans sa terre, amoureux de tout ce qui fait la beauté de la nature. Je l’ai entendu en parler avec beaucoup de poésie et je dirai mieux qu’un poète, car il le vivait et ça lui sortait des tripes.
R comme respect.
Il pensait que toutes les personnes étaient respectables et s’il a eu des adversaires, il ne s’est jamais trouvé d’ennemis. Il combattait non pas en attaquant les personnes, mais par des arguments, si bien étayés, que face à cela, même dans le désaccord, il était aimé et se faisait respecter. C’est là qu’apparaissait son souci de la libre expression dans une démocratie ouverte et participative.
I comme idéal
Il l’a puisé dans le creuset familial et celui des paysans de la région, cette vision de changer le monde s’est élargie à toute la société et particulièrement à l’Europe. Oui, l’Europe à construire est l’avenir incontournable des générations futures, nous disait-il. Le repli nationaliste peut conduire vers une dictature et il ajoutait :
Seuls, ceux qui n’ont connu que la paix, n’ont pas peur de la guerre.
Merci Henri.
signé : René Philippot
Courrier de Hubert Vallet, ancien curé de Châteaubriant :
Henri Baron, chrétien
Merci pour la belle page consacrée à Henri Baron, que j’ai eu la joie de rencontrer souvent pendant quatre ans, pour de longs cafés où j’essayais de profiter de sa culture et de ses analyses. Cependant, tout comme dans la page de La Mée consacrée il y a quelques années à André Roul, je m’interroge de ne trouver aucune ligne sur l’engagement profondément chrétien d’Henri, et sa motivation de catholique pratiquant en cohérence avec ses combats. Il ne faisait pas mystère de sa foi comme moteur de son action, et retrouver sa chère Thérèse auprès de Dieu était pour lui une certitude que la messe dominicale alimentait.