Ecrit le 29 octobre 2014.
Gaz de schiste
L’Humanité.fr du 21/10 : Une quinzaine d’industriels français, dont Total, GDF Suez, Vallourec, veulent mettre en place un observatoire pour convaincre des bienfaits de l’exploration du gaz de schiste malgré l’interdiction par la loi de l’exploitation par fracturation des hydrocarbures non conventionnels en 2011 [...]
Face à cette poussée, les opposants s’inquiètent. Sous leur pression, la ministre de l’Écologie, ségolène Royal, a refusé à la société suédoise Tethys Oil AB un permis exclusif de recherche de mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux dans le parc naturel régional du Lubéron. Le permis d’exploration portait, officiellement, sur du pétrole et du gaz conventionnels, mais le directeur adjoint du parc en doute fortement. « »¯Selon un rapport du Bureau de recherches géologiques et minières, 59 forages de recherche pétrolière ont été réalisés en Provence-Alpes-Côte d’Azur et notamment dans le Lubéron entre 1949 et 1988, sans aucun résultat. Ce sont donc bien les hydrocarbures de schiste qui sont visés à terme.« ¯ » []
ll y a une semaine, l’opérateur public Eau de Paris, qui a en charge la distribution de l’eau dans la capitale, a demandé au ministère de l’Écologie le retrait immédiat d’un projet de recherche d’hydrocarbures dans l’Yonne porté par la société Bluebach Ressources. Selon l’opérateur public, une grande partie du périmètre du permis s’étendait sur les aires d’alimentation de captages des sources dont il assure la gestion : « »¯En cas de problème, les effets pourraient être désastreux sur la qualité de l’eau« ¯ ».
Ces deux cas, démontrent que le texte de loi adopté en 2011 à l’assemblée nationale contient des lacunes. []
Les industriels continuent à jouer sur les mots en attendant le jackpot des futurs traités de libre-échange entre l’Europe et les États-Unis. « »¯En effet, par ces accords, les investisseurs vont avoir le droit, s’ils estiment leurs intérêts financiers mis en danger par la décision d’un État ou de collectivités locales, de porter plainte devant une juridiction internationale et indépendante« ¯ », selon les Amis de la Terre. Les effets désastreux d’une telle mesure, le Québec en subit déjà les conséquences suite aux accords de libre-échange signés entre les États-Unis et le Canada. Dernièrement, une compagnie américaine qui exploitait du gaz de schiste a obtenu 151"¯millions d’euros de dédommagement parce que l’État québécois venait d’instaurer un moratoire sur le sujet suite aux dégâts environnementaux constatés. La faille n’a pas fini de s’élargir.
Indifférence générale
LeFigaro.fr du 24/10 : Il est 7h15 le 2 octobre quand Louise* quitte le domicile de ses parents, à Croix, juste à côté de Roubaix, pour se rendre à l’université catholique de Lille. C’est devant la bouche de métro que la jeune étudiante en économie va faire une mauvaise rencontre : trois jeunes filles de son âge, visiblement décidées à en découdre. « Elles m’ont dit : »maintenant tu donnes tout ce que tu as« », se souvient Louise. L’étudiante se défend, mais la scène dégénère rapidement : elle se fait arracher les cheveux, reçoit des coups de pied et de poings sur le corps et la tête, tombe. Au final, la jeune fille écopera de 4 points de suture et deux jours d’ITT. Une enquête a été ouverte par la Brigade de répression des actions violentes de Roubaix. Pour l’heure, les trois jeunes filles, auteurs des violences, n’ont pas encore été appréhendées.
Pour Louise et sa famille, le pire est qu’aucun des passants n’ayant entendu les cris de l’étudiante ne se soit arrêté pour lui porter secours. Les images enregistrées par les caméras de vidéo-surveillance confirment leurs propos : il y a bien eu des témoins de cette agression, et personne ne s’est arrêté. Un témoin a toutefois prévenu le commissariat de Roubaix. Dans les colonnes de la Voix du Nord, la mère de Louise tempête : « Est-ce que ces personnes ont pu travailler ou aller en cours ce jour-là sans que cette scène ne leur revienne à l’esprit ? Quel jugement ont-ils d’eux-mêmes après ça ? Je parle là de lâcheté (...) On espère que vous avez des remords et que l’image de notre fille qui se fait tabasser vous hante ! » . Une sombre affaire qui fait tristement écho à l’agression sexuelle, en avril dernier, d’une jeune fille dans le métro de Lille. Là encore, aucun témoin n’était intervenu pour aider la victime.
Sainte famille
Le Canard enchaîné du 22/10 : depuis son « qui suis-je pour les juger ? » lancé, en 2013, à propos des homosexuels, le souverain pontife semblait parti pour passer les dogmes à la paille de fer. Finie la mise à l’index des cathos divorcés ! Et place à la reconnaissance des « aspects positifs » des couples gays et des unions libres ! Le pape a attaqué en fanfare son synode sur la famille persuadé qu’il n’y aurait guère plus de « 15 à 20 opposants » sur près de 200 évêques.
Mais face à une pieuse alliance, réunissant une bonne partie des clergés africain et nord-américain, et les mitrés tradi de tous pays, sa Sainteté a dû ravaler ses textes décapants et les transformer en molles motions de synthèse dignes d’un congrès radical. Et, même affadies, les plus importantes d’entre elles n’ont pas pu rassembler la majorité des deux tiers du synode indispensable à leur adoption.
Dans le clan des archi-conservateurs, le cardinal archevêque de Paris, André Vingt-Trois, s’est surpassé avec une sortie très remarquée. Son éminence est allée jusqu’à s’inquiéter des couples hétéros qui communient tout en ayant recours à la pilule, alors qu’il s’agit là d’un « péché » nécessitant une « confession ». Un de ses confrères, l’américain Raymond Burke, s’en est carrément pris au pape : « il a fait beaucoup de mal au synode » en se croyant « libre de changer la doctrine de l’Église sur l’immoralité des actes homosexuels, l’indissolubilité du mariage ou toute autre doctrine de foi ». Et, à en croire la presse italienne, les sacristies bruissent désormais de messes basses où l’on prie le ciel d’expédier le plus vite possible ad patres ce pape impie.
En toute charité chrétienne
Les mineurs grévistes de 1948 réhabilités en 2014
leMonde.fr du 25/10 : C’est l’aboutissement d’un long parcours pour obtenir réparation des injustices subies par les mineurs grévistes du Pas-de-Calais, en 1948 et 1952, réprimés par les armes, licenciés et expulsés. La garde des sceaux, Christiane Taubira, a annoncé, ce 23 octobre, à l’Hôtel de ville de Paris, à l’occasion d’une soirée d’hommage et de la projection du film L’Honneur des gueules noires, de Jean-Luc Raynaud, consacré à la grande grève de 1948, que le gouvernement déposera un amendement au projet de loi de finances pour 2015 reconnaissant le « caractère discriminatoire et abusif » de leur licenciement.
Parmi les invités d’honneur de cette soirée d’hommage, Norbert Gilmez, 92 ans, l’un des rares survivants des grèves de 1948. Il avait alors 28 ans. Mineur gréviste à Mazingarbe, il avait été emprisonné pendant deux semaines puis licencié, comme 3000 de ses collègues. Couvert de dettes, il avait dû revendre sa bicyclette et jusqu’au landau de sa fille pour refaire sa vie loin de la mine, parce que les employeurs de la région refusaient de prendre un « licencié de 1948 ». Depuis, il n’a jamais lâché le combat pour obtenir justice. Comme lui, ils seront trente et un survivants ou leurs ayants droit qui pourront bénéficier du versement d’allocations réparatrices, dont le montant sera fixé par l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs. « Ce geste de l’État est si peu de chose. Je m’incline avec modestie, humilité et un sentiment de fraternité profonde devant les acteurs de cette histoire que je tiens pour une leçon de vie », a souligné Mme Taubira au cours de cette émouvante soirée d’hommage.
Car, malgré le temps passé, la mémoire de ces journées d’octobre 1948 reste intacte. Les décrets Lacoste, le ministre de l’industrie d’alors, qui remettent en question le statut du mineur voté à l’Assemblée nationale en 1946 et le salaire minimal. La grève, votée à 90 % par les mineurs. Et le ministre socialiste de l’intérieur, Jules Moch, qui envoie les CRS contre ceux qu’il appelle les « renégats ». Il y aura six morts parmi les « gueules noires ». Plus d’un millier de grévistes feront de la prison ferme, trois mille seront licenciés, expulsés de leurs maisons des corons fournies par les Charbonnages, bannis des houillères. « On n’avait plus rien, on était des parias », se souvient Norbert Gilmez. Aujourd’hui, c’est la fierté qui brille dans ses yeux.