Ecrit le 24 juin 2009
Marie vend 200 œufs bio par jour
Sur la route de Soulvache à Ercé en Lamée, à un quart d’heure de Châteaubriant, voici un ensemble de maisons anciennes en pierres, c’est La Pignerie. Une pancarte attire l’attention : Oeufs bio. n’hésitez pas à entrer et à rencontrer Marie Jolivel, tous les jeudis de 18h30 à 19h30. Vous aurez des œufs ayant moins de 7 jours de ponte.
Marie, 25 ans, a fait durant ses études des stages de longue durée au Nicaragua et en Sierra Leone « en forêt tropicale, après la pacification du pays » dit-elle. Puis elle est devenue animatrice à la Confédération Paysanne, dans le secteur volailles, porcs, fruits et légumes, en attendant de démarrer son activité agricole.
« J’ai préféré faire une installation progressive, sur 2 ha que mon père, éleveur de vaches allaitantes, a mis à ma disposition en échange de l’aide que je peux lui apporter. Je ne voulais pas m’engager trop vite ». Marie a alors acheté 249 poules pondeuses, élevées en bio « Je les ai trouvées à la coopérative Cooperl. Ma demande était un peu atypique parce que cette coopérative fournit les agriculteurs qui possèdent communément de plus gros effectifs. Moi je voulais seulement voir si je pouvais créer mon activité et trouver des débouchés ».
Des rideaux rouges
Marie a participé à la construction de son premier poulailler en bois, conçu et fabriqué par un menuisier. Le poulailler est monté sur un châssis métallique, facile à déplacer. « Je me suis contentée de clouer les plaques de bois ! ». Mais pourquoi déplacer le poulailler ? « pour se débarrasser des parasites de la litière sans désinfection chimique ! ».
Le poulailler comporte une partie « séjour » avec sol en sable, ouvrant sur le champ voisin, et comprenant les perchoirs qu’adorent les poules. Au fond se trouve la partie « ponte », en hauteur, sur faux gazon vert et doux, avec réserve d’eau à proximité : les poules vont y pondre spontanément, de préférence derrière les rideaux rouges ! Elles ont de la pudeur, ces poules ! L’œuf roule tout seul vers le fond du pondoir, tout propre la plupart de temps, sans rester dans les pattes des poules ce qui évite qu’il soit cassé. Il n’y a plus qu’Ã le ramasser.
« Tous les matins je vais ramasser les œufs, je les examine un à un, éliminant ceux qui ont un peu de crotte ou une fêlure ». 249 poules, 225 œufs environ, 215 bons à vendre. Pourquoi 249 poules ? Pour rester une petite exploitation !
215 œufs par jour, cela paraît énorme ! « et pourtant je les vends tous les jours, principalement dans les AMAP* et groupements d’achat ». Le mardi, Marie porte ses œufs à Cesson-sévigné et Bain de Bretagne. Le mercredi et le jeudi, une fois sur deux, à La Gacilly, Châteaubriant, Corps-Nuds et Treillières. Pour être producteur, de nos jours, il faut accepter de se déplacer. Marie souhaiterait aussi faire des marchés « Mais pour cela je n’ai pas assez d’œufs ». Elle a commencé, cependant, au marché bio du Petit Auverné. « Je me sens très bien là -bas ».
Tout ceci est de la vente directe. Marie n’a pas le droit de vendre dans une épicerie (comme à Fercé), ni de mettre des œufs en dépôt chez un commerçant ami : la réglementation l’interdit. Si elle voulait le faire, il lui faudrait acheter une machine réalisant le calibrage des œufs et marquant la date de ponte. « Ce n’est pas pour tout de suite, un jour peut-être. Pour l’instant je n’ai pas envie de me sur-endetter ». 249 poules, cela ne représente pas encore un revenu complet.
Des poussins ?
Les poulettes sont nourries exclusivement de céréales bio, avec un mélange spécial acheté à Edou Breizh à Janzé : colza, orge, maïs, féverole et autres. « J’avais pensé faire mon mélange de céréales moi-même, mais les poules sont exigeantes. Le mélange que j’achète, garantissant un bon rythme de ponte, est conçu pour apporter une alimentation parfaitement équilibrée pour les poules pondeuses ». Pour 250 poules il faut une tonne de céréales par mois. « Et puis les poules s’en vont courir dans le champ voisin, elles aiment manger de l’herbe, et des petits vers. l’autre jour elles ont tué et mangé un gros orvet ! ». Elles aiment faire des trous dans la terre et s’asperger de poussière. Elles aiment surtout l’ombre des arbres et des buissons. Et le soir, pour rentrer ses poules, Marie s’accompagne du chien initialement dressé sur le troupeau de mères à veaux !
Achetées à 4 mois, les poules ont une période de ponte de 18 mois. Et après ? « Il va me falloir racheter 249 poules. Je songe à élever des poussins. La réglementation m’interdit d’avoir un coq » . Et les « vieilles » poules alors ? « je ne sais pas encore ce que j’en ferai. Peut-être les vendre prêtes à cuire. Mais pour cela il faut que j’apprenne à tuer. Ce n’est pas ce qui me réjouit le plus ». Ou alors fabriquer des rillettes de volaille, grâce à la coopérative « De la terre à l’assiette ». Et pourquoi ne pas les vendre avec une recette originale, comme celle de la « poule au pot façon Henri IV » ?
Sous les pommiers
Marie a bien d’autres idées : « par exemple installer les poules dans un verger ». Elle vient de faire greffer 550 pommiers de pommes à couteau : Pattes de loup, Reinettes d’Armorique, Chailleux « et une quinzaine d’autres variétés pour le plaisir », comme la fameuse « Pomme St Jean » qu’on appelle ici « Pomme de la Madeleine ».
« Le verger protège les poules du soleil et des prédateurs venus du ciel (comme les buses) - Les poules entretiennent le verger, mangent les pommes pourries et débarrassent de la tavelure ». En somme une alliance écologique bien construite. Cela se fera plus tard, car il faut laisser aux pommiers le temps de pousser : 5 à 10 ans .
Dans l’immédiat Marie va acheter un cochon, qui sera nourri des produits de la ferme et notamment des œufs non vendables.
Plein de projets dans la tête : n’est-ce pas une aventure qui s’ouvre sous de bons auspices ? Bonne chance à Marie !
Pour contacter Marie :
– 02 99 44 35 05
– Ou 02 99 44 34 55
(*)
AMAP
Les AMAP - (Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne) - sont destinées à favoriser l’agriculture paysanne et biologique qui a du mal à subsister face à l’agro-industrie.
Le principe est de créer un lien direct entre paysans et consommateurs, ceux-ci s’engageant à acheter la production des paysans à un prix équitable et en payant par avance : légumes, fromages, pommes, viande, œufs ...
Deux AMAP viennent de se créer : Nozay et St-Michel-et-Chanveaux.
Sinon il est toujours possible de trouver des produits bio au magasin Biosphère à Châteaubriant (rue d’Ancenis) et au marché bio le 1er vendredi du mois au Petit-Auverné. Le prochain est le 3 juillet de 16 à 18 h : légumes, porc, volailles, cidre, pain, produits laitiers, fromage de chèvre, galettes, confiture, œufs et vin de Saumur.