(écrit le 11 septembre 2002)
L’Urinoir, nous aussi
Voilà une histoire qui ressemble à un canular et qui est pourtant très sérieuse.
Selon le journal Libération du 17 août 2002, tout juste 150 ans après l’inauguration des premiers WC publics à Fleet Street, à Londres, les défenseurs des toilettes publiques broient du noir. En à peine huit ans, la moitié des « loos » publiques du Royaume Uni a disparu. « Sauvons nos toilettes publiques ! », sans elles, « les droits des femmes font un saut en arrière et les rues menacent de retourner à l’insalubrité de l’ère victorienne », clament les lobbyistes de l’Association britannique des toilettes (BTA).
La Royal Society of Chemistry s’en est même mêlée, avec un appel solennel à la population : « Arrêtons de vandaliser nos toilettes ! ». La corporation des pharmaciens britanniques s’adresse aussi aux « gens de la nuit » : « Drogués, prostitués, homosexuels, cessez de vous y retrouver. » La dégradation criminelle de nombreuses toilettes est en effet souvent à l’origine de leur destruction.
Le sens de l’édicule
Pourtant, la ville de Londres essaie par exemple de les remplacer par des urinoirs mobiles temporaires pour soulager les envies pressantes des soûlards du week-end et freiner une pratique de plus en plus courante : uriner dans la rue à la vue de tous.
« Revo-loo-tion ». Le Council de Westminster ne peut cependant s’enorgueillir aujourd’hui que de 32 toilettes publiques dont seulement 2 fonctionnent 24 heures sur 24, à Covent Garden et à Leicester Square. C’est peu pour les trente millions de touristes déferlant chaque année à Londres. Les conseillers de Tony Blair ne manquent pas d’idées pour « revo-loo-tionner » (c’est le jeu de mots favori de la British Toilet Association) le concept du pipiroom. A l’automne, des urinoirs « télescopiques » prendront place au cœur de la capitale. Il s’agit d’urinoirs pouvant jaillir du sol à la moindre demande, à l’instar des bornes de stationnement rétractables. Ces urinoirs « télescopiques » sortiront de terre, dans un premier temps, les vendredis et samedis soir.
Comme dit Le Canard Enchaïné, si ces bijoux technologiques restent coincés en terre, pourra-t-on pisser dessus pour les faire pousser ?
Revo-loo-tion !
En attendant, les experts en environnement urbain s’inquiètent. « Sans toilettes publiques, les gens ont tendance à faire leurs besoins dans la rue, à pisser contre les arbres ou les murs des immeubles. Or tout le monde sait que l’urine est corrosive. Sans parler des risques pour l’hygiène publique », témoigne un écologiste. L’acide urique généreusement distillé par les fêtards attendant leur bus de nuit à Trafalgar Square à Londres, aurait déjà commencé à grignoter les pierres de la National Gallery...
La docteure Clara Greed de l’université de West England à Bristol s’est penchée sur le sujet et a récemment déclaré à la BBC : « La fin annoncée des toilettes publiques reflète bien l’évolution de notre société. Les gens ont perdu tout respect pour l’environnement, leurs semblables et eux-mêmes. Pourtant, les loos publiques constituent un droit fondamental. L’Asie est bien plus avancée que l’Europe en ce domaine. Investir dans un système de loos publiques arrive en Asie au même rang de priorité que la construction d’un aéroport »
Le premier sommet international des toilettes s’est d’ailleurs tenu en novembre dernier à Singapour.
Seuls heureux bénéficiaires d’une situation jugée dramatique : les agents immobiliers du Royaume Uni. La reconversion des vieilles toilettes a, semble-t-il, de l’avenir. Devant la crise du logement dans le sud-est du pays, certains édicules historiques ont été mis sur le marché foncier, transformés en « idéal pied-Ã -terre pour investisseur ». Avis aux amateurs....
Rendez-vous
A Châteaubriant, les travaux de construction de toilettes publiques, prévus depuis plusieurs années du côté du château, deviennent de plus en plus urgents. Les « lieux » qui existent au bout de foyer-restaurant des Anciens, ne comportent que deux installations non-confortables, même pas munies de barres au mur permettant aux personnes d’un certain âge de se relever facilement. Pas de papier hygiénique, pas de lavabo non plus, même pas un robinet d’eau froide. Quant aux murs, le blanc laqué porte des traces douteuses et, au 7 septembre, des « rendez-vous galants » en termes « choisis » (!) pour hommes et femmes, avec même parfois un petit plan du lieu de rendez-vous. Ces petits mots dataient de la fin juillet et n’avaient pas été effacés six semaines plus tard ;
Pour les touristes qui viennent visiter le Château, cela ne donne pas une bonne image de notre ville.
Comme à Londres, les petites Anglaises verraient rouge, à Châteaubriant, en fréquentant cet urinoir ...
Si vous cherchez un site humoristique sur les toilettes, voici une adresse :
http://chiottes.cgx-online.com/
Pour un musée des horreurs :
http://www.baignade-interdite.com/
Voici aussi un livre historique qui ne manque ni d’informations, ni d’humour :
« Les lieux », histoire des commodités - par Roger-Henri Guerrand, Editions La découverte.
On y apprend comment un certain léon Bourgeois, l’un des plus importants politiciens de la IIIe République radicale expliquait que « les mesures sanitaires sont conformes aux principes de la démocratie républicaine car elles profitent avant tout aux petits, aux faibles et aux malheureux. Elles répondent aussi aux nécessités du patriotisme, car elles ont pour but et pour effet de conserver et d’accroître ce capital humain dont la moindre parcelle ne peut être perdue sans une atteinte à la sûreté nationale et à la grandeur de la patrie » (page 159)
Et voilà pourquoi nous attendons avec impatience les vécés prévus place Charles de Gaulle à Châteaubriant .
(écrit le 16 octobre 2002) :
Besoin pressant
Il ne faut pas être pressé à Châteaubriant : les pissotières qui auraient dû être faites avant l’été 2002 sur la place Charles de Gaulle sont reportées sine die !
où c’est-y qu’on fait pipi ?
note du 24 juillet 2004 : rien n’est encore fait
Ecrit le 31 août 2005
Des pissotières ultra-modernes
Le 7 juin 2005, le Conseil Municipal de Châteaubriant a lancé un avis d’appel à concurrence pour la construction de sanitaires publics « sur le parking, à l’ouest de l’église St Nicolas ». Les cabinets (d’architecture !) prêts à effectuer une mission de conception et de direction des travaux, avaient jusqu’au 28 juin 2005, à 11 h, pour poser leur candidature. Exigence particulière : les dits cabinets devaient avoir une expérience de 5 ans dans les WC.
Pour les aider, Ouest France a publié un intéressant articulet sur les édicules japonais. Modernes, dame ! Pire qu’on pouvait l’imaginer !
Figurez-vous que, dès l’installation du client sur le « trône » , un bras articulé s’en vient positionner une éprouvette à l’endroit adéquat et réalise immédiatement une analyse d’urine. Tandis qu’un tensiomètre judicieusement placé près du PQ permet de mesurer la tension artérielle. Lorsque le client se lave les mains, une balance, encastrée dans le sol, réalise une pesée automatique. Evidemment, ceux qui sortent sans se laver les mains ne bénéficient pas de ce contrôle médical.
Si le client a un peu de temps, il peut manipuler une sorte de guidon qui, au-to-ma-ti-que-ment calcule la masse graisseuse de son corps. Le tout est analysé et envoyé sur l’ordinateur personnel du client, avec quelques conseils appropriés.
La machine n’envoie pas la facture des analyses et ne réalise pas encore un test automatique de contrôle du sida. Mais ça viendra.
Aurons-nous à Châteaubriant des pissoires ultra-modernes ? Il faudrait y prévoir un système d’analyse de la pensée. Cela donnerait un attrait touristique supplémentaire à la ville.