écrit en septembre 2000
Hors de l’Eglise, point de salut
Ca y est, on a compris pourquoi Jean Paul II, qui n’est pas un pape d’ouverture comme l’était Jean XXIII, a décidé de béatifier le Pape Pie IX : c’est le pape qui a incarné une église réactionnaire et autoritaire, qui a combattu les idées libérales développées dans sa propre Eglise par un Montalembert pour qui la liberté de religion est compatible avec la doctrine catholique. Le pape Pie IX a publié un « syllabus », catalogue de toutes les idées modernes dont le rationalisme et le socialisme, il a rejeté l’idée de séparation de l’Eglise et de l’Etat et toute idée de liberté des cultes, de liberté de la presse, de liberté de pensée, de liberté d’association. Adversaire des droits de l’homme et de l’émancipation des juifs, il est aussi le pape qui a défini le dogme de l’infaillibilité pontificale, cela veut dire que, pour lui, un pape ne peut pas se tromper.
Ratzinger
On comprend mieux cette béatification de Pie IX quand on découvre le document publié à Rome le mardi 5 septembre, et signé du Cardinal Ratzinger, « préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi » depuis 1981, et bien connu pour ses idées conservatrices.
Ce document intitulé « Dominus Jesus » est une claque magistrale à tous ceux qui travaillent pour le rapprochement des églises. C’est un document de fermeture notamment vis-Ã -vis du Protestantisme.
La claque
Le Cardinal Ratzinger part en guerre ouverte contre trois dangers (selon lui) :
– le relativisme, selon lequel « toutes les religions se valent » ;
– le subjectivisme, qui permet à chaque individu de « zapper » dans le « marché » des croyances ;
– et, le pluralisme qui met sur un pied d’égalité toutes les religions, au lieu de dialoguer avec la certitude de ses convictions.
Il affirme que seul le christianisme peut être qualifié de « foi », et que les autres confessions sont de simples « croyances »
Il affirme que Jésus est « l’unique médiateur entre Dieu et les hommes, et le sauveur universel », ce qui veut dire qu’il n’y a pas d’autre voie de salut que le christianisme. Il condamne ainsi les écrits de théologiens asiatiques ou africains, qui cherchent à donner au christianisme un visage capable de se concilier avec des cultures locales et des sagesses aussi anciennes et vénérables que le bouddhisme, l’hindouisme et les religions traditions africaines. Il oublie de quelle façon la religion catholique a adopté, en les « christianisant », par exemple des fêtes druidiques anciennes.
Le cardinal Ratzinger s’oppose aussi à la « Réforme protestante ». On se croirait revenu 500 ans en arrière. Il affirme que l’épiscopat protestant n’est pas « valide », que la célébration du mystère eucharistique par les Protestants n’est « ni authentique, ci complète » et que les églises protestantes ne sont pas des « Eglises au sens propre ».
Indigence
Il affirme enfin que les adeptes des autres religions se trouvent « dans une situation de grave indigence par rapport à ceux qui, dans l’Eglise, ont la plénitude des moyens de salut ». C’est bien ce qu’on vous dit : hors de l’Eglise (catholique, la seule, la vraie), point de salut ! Le feu éternel attend les damnés de la terre et du Ciel ; sûrement.
Du côté des Protestants, c’est la stupéfaction complète. On ne comprend plus pourquoi Jean Paul II a multiplié ces derniers temps les « baisers de paix » avec « les frères séparés » protestants, anglicans ou orthodoxes, les visites dans les synagogues ou les mosquées, les poignées de mains aux hindouistes et aux bouddhistes . C’était du cinéma alors ?
(1) (source : Le Monde du 3 septembre 2000)
date : 2000
Dans l’affaire du curé Bissey à Caen, poursuivi pour des faits de pédophilie sur onze mineurs entre 1987 et 1996. l’attitude de plus d’un membre du clergé suscite écœurement et colère.
– Ce prêtre, pendant des années, a confessé ses actes. Après l’avoir écouté raconter « ça » en détail (dit-il) ses confrères se contentaient de pardonner en lui assurant que « ça » s’arrangerait ( !). Lequel lui a demandé de se dénoncer pour être pardonné ? De se soigner ? Aveuglement, incompétence, lâcheté, complaisance, ou tout ça ensemble ? Comme dans la pub : un coup de barre ? Parle, et « ça » repart ! Et donc, les victimes se succédaient.
– Son évêque, informé, se borne à l’envoyer d’abord au repos, puis le nomme dans une autre paroisse .
– Le même évêque, au procès, assure que Bissey a toujours sa place dans l’Eglise. Demandez donc aux prêtres qui ont eu le courage et l’honnêteté de révéler leur amour pour une femme s’ils sont aussi bien traités !
Son avocat affirme que « Le secret de la confession n’a pas à être violé ». Les victimes auraient aimé en dire autant ! L’avocat de René Bissey demande qu’on juge l’homme et non le prêtre : c’est pourtant comme ça qu’il a attiré ses victimes !
« René Bissey, dans cette affaire, était un éducateur. Il était investi d’une mission. Il a oublié qu’il était prêtre pour tomber dans la déchéance », a dit l’avocat général, ajoutant que l’ecclésiastique n’était pas seulement « l’homme de pulsions incontrôlables, mais aussi de stratégies » (en ce sens que ses rencontres avec les victimes étaient préparées, comme ont dit les experts). L’abbé « ne considérait pas les enfants comme des personnes, mais comme des objets ».
Dans cette affaire l’Eglise Catholique, comme d’autres institutions en d’autres circonstances (l’Armée, les Partis Politiques, la Franc-Maçonnerie et d’autres) a tenté d’étouffer le scandale, prenant en compte son propre intérêt et non pas celui des enfants.
Ecrit le 6 avril 2005 :
La mort du Pape Jean Paul II
Le Pape est mort
Le pape Jean Paul II est mort le 2 avril 2005 après un pontificat de 26 ans. « Le Monde des Croyants est en deuil » dit-on. C’est vrai sans doute pour ceux qui font référence « au livre » : Catholiques, Protestants, Musulmans, Juifs. Il n’en est pas de même pour les peuples attachés à une autre religion, ou agnostiques qui, cependant, ont eu de la compassion pour la mort d’un homme bien médiatisée (il a eu la chance de ne pas mourir seul, comme tant d’inconnus).
Certains voient en lui un homme de paix, de dialogue entre les religions. Les médias parlent d’un grand Pape. Ils ont dit la même chose à la mort de Jean XXIII qui a plus fait pour la modernisation de l’Eglise que Jean Paul II. Ce dernierI restera dans l’histoire pour son rôle dans la chute du communisme et pour sa défense stricte des doctrines traditionnelles du Vatican.
Pour les catholiques très progressistes « Cet homme n’a eu de cesse de propager une culture d’interdits plutôt que de vie, avec un regard très pessimiste sur le monde. Ce n’est pas le sens du message chrétien qui est un message d’espérance ! » (comme dit Ch.Terras, directeur de la revue Golias, dans Libération)
(l’enterrement a eu lieu le 8 avril)
(Pour la suite : voir Opus Dei ->1681]