(écrit le 28 avril 2002)
La brume, lentement ...
Jean Martin se reposait tranquillement sur sa chaise longue, dans son jardin. Ils avaient eu raison de partir à la campagne ce week-end, sa famille et lui : le temps avait été magnifique pendant ces trois jours. La fin de l’après-midi approchait et il faisait encore bon dehors. Bien sûr, une petite voix lui chuchotait de temps en temps qu’il devrait peut-être annoncer le départ et rentrer en ville avant 20 h ce soir. N’y a-t-il pas des élections en ce dimanche 5 mai ?
Mais quand il voyait ses enfants s’ébattre joyeusement dans l’eau de la piscine, il ne pouvait plus s’y résoudre. Et puis après tout, il n’y avait pas vraiment de péril, le Grand Dadais allait gagner les élections, c’était sûr !
Jean était bien en cet instant. La vie était belle et tout allait pour le mieux. Grâce aux 35 h, sa femme et lui avaient même pu se libérer un jour plus tôt pour partir. Et ils avaient eu raison de profiter de leur temps libre : ils avaient bien le droit de se reposer aussi. L’esprit léger, rasséréné par la joie de ses gamins et les bruits de préparation venant de la cuisine, Jean s’endormit tranquillement.
– « Jean ! Jean ! ». Il se réveilla en sursaut devant le visage inquiet de sa femme. « Quoi ? Qu’est ce qui se passe ? » marmonna-t-il.
– « Lève toi et viens voir la télé vite ! » lui répondit-elle péremptoire.
Alarmé, il se précipita vers le salon pour découvrir stupéfait le visage du nouveau président : L’ancien Borgne fasciste !!!
« Non c’est impossible ! Mais comment... ». Sa phrase resta en suspens quand il découvrit un chiffre : 63,2% d’abstentions.
La mine dévastée, PPDA se tourna vers son analyste politique pour tenter de trouver une réponse à cette abstention record.
Ce dernier prit un ton professionnel où pointait tout de même une légère incrédulité : « La majorité des Français a, semble-t-il, pensé que l’élection était jouée d’avance et ne s’est donc pas déplacée pour voter. Le beau temps annoncé par la météo et le week-end prolongé par les ponts du 1er mai et du 8 mai ont certainement joué dans ce résultat catastrophique... »
Toute la soirée, Jean ne put qu’assister impuissant à l’effondrement de ses convictions, alors que, les uns après les autres, les différents dirigeants politiques annonçaient, qui leur retrait des affaires de l’Etat, qui leur intention de prendre le maquis et la résistance. La plupart lançait déjà les mots d’ordre d’une manifestation générale.
La soirée électorale tourna vite en soirée catastrophe : les gens descendirent dans la rue pour scander « A bas le fascisme ! ». Des pillages et des émeutes se déchaînèrent aussi bien dans les banlieues que dans les centre-villes. Les forces de police et de gendarmerie étaient sur le pied de guerre. L’insurrection grondait.
Puis, vers minuit, vint le coup de grâce. Le Borgne apparut à l’écran :
– " A une très large majorité, les Français m’ont élu président de la France. Au vu des affrontements à grande échelle qui ont lieu actuellement dans nos rues et nos cités, et à l’état avancé de désordre et de crise que vit notre pays, je mets immédiatement en application l’article 16 de la Constitution, me conférant les pleins pouvoirs pour gérer cette situation.
– Je déclare donc l’état martial et le couvre-feu jusqu’Ã nouvel ordre. Je mobilise sur le champ toutes nos forces armées pour mettre en application ce décret. J’en appelle à votre civisme et à votre raison. Rentrez chez vous et restez calmes et tout se passera bien. Mes chers compatriotes, je vous promets de ramener l’ordre dans notre pays. Vive la France ! "
Jean se tourna vers ses enfants pour découvrir qu’ils avaient les larmes aux yeux : ils pleuraient en voyant leur parents pleurer. Dehors, la nuit était tombée depuis longtemps et un brouillard recouvrait lentement la campagne
Petit rappel d’histoire pour les pêcheurs
du dimanche
Allemagne 1923 : pour la première fois, après un putsch minable raté à Münich, le parti Nazi apparaît aux élections législatives....il fait à peu près 6 %. Tout le monde considère ces gens-là comme des clowns. Hitler va en prison. Il écrit « Mein Kampf »
Allemagne 1928 : Elections législatives en Allemagne. Streseman (socialiste) est renversé par une majorité plutôt conservatrice (Hindenburg) à cause de deux problèmes fondamentaux : l’insécurité et le chômage. Les nazis approchent les 20 %, mais personne n’en parle vraiment. Les conservateurs s’appuient sur le report des voix.
Allemagne 1932 : aux élections présidentielles (suffrage indirect) c’est la grande surprise : Hitler arrive au second tour des élections alors que tout le monde s’accordait à dire que l’Allemagne allait virer à gauche (percée des communistes avec l’extrême-gauche de l’époque qui condamnent les socialistes). Hindenburg bat Hitler 60 % contre 40 %. L’Allemagne respire mais s’habitue à cet orateur de talent.
Allemagne, janvier 1933 : les élections législatives sont remportées par le parti Nazi et Hindenburg appelle Hitler à la chancellerie. L’abstention avait atteint les 34 %
Vous connaissez la suite ?
On dit toujours « Non, cela n’arrivera jamais ». Encore faut-il ne pas aller à la pêche.
N’OUBLIEZ PAS !
Le détournement des mots
Le candidat d’extrême-droite est le spécialiste du détournement des mots : il les reprend à son compte et les vide de leur sens
Il a appelé « Front National » son mouvement raciste et fasciste, alors que le Front National était un mouvement de la Résistance de 39-45.
Il a parlé de « Résistance » à propos de son attitude vis-Ã -vis de l’immigration. Alors que la Résistance était un mouvement de lutte contre le nazisme qui, lui , prônait le rejet de l’étranger.
Il s’est assimilé à de Gaulle en disant, le soir du 21 avril 2002 : « Il s’agit là d’un véritable séisme, s’apparentant à d’autres époques à ce qu’avait provoqué Clemenceau ou le Général de Gaulle »
Il n’a pas hésité à qualifier de « Français Libres » ceux qui voteraient pour lui au deuxième tour des présidentielles, alors que les « Français Libres » sont ceux qui ont combattu, en 39-45 contre le nazisme.
Il a même emprunté des paroles du Pape, en disant « n’ayez pas peur, entrez dans l’espérance ». Ce qui lui a valu une réplique vive du Cardinal Lustiger.
(note du 5 mai 2002) : dans sa profession de foi pour le deuxième tour, LE PEN n’a pas hésité à reprendre « la force tranquille » à François Mitterrand et « j’ai fait un rêve pour vous » de Martin Luther King !
Le Pen ne recule devant rien pour dévoyer et salir tout ce qu’il touche. A ce point c’est incroyable.
Et comme il est spécialiste d’un humour de bas étage, voilà ce qu’il a déclaré au journal israélien Haaretz, qui l’interrogeait sur diverses choses, dont le racisme. « Que pensez-vous du voile musulman » interroge le journal ? réponse de Le Pen : « Il nous protège des femmes laides ».
« Je suis socialement à gauche, économiquement à droite et plus que jamais, nationalement de France. » (Le Pen, au soir du 21 avril 2002). Si ce n’est pas du National-socialisme (NA-ZI), cela y ressemble bougrement.
Le massacre des innocents
« Venez à moi, les petits, les sans-grades, n’ayez pas peur, entrez dans l’espérance » c’est en substance ce que disait le chef de l’extrême-droite, LE PEN, au lendemain du premier tour des présidentielles, le 21 avril 2002. Sous son apparence bonhomme, le bougre cache des desseins sombres pour la France.... Au point que même les partis d’extrême-droite du reste de l’Europe disent qu’il leur fait honte. LE PEN ne se réfère pas ouvertement à Hitler mais il n’hésite pas à dire « le fascisme est une doctrine politique de gauche, comme le nazisme » (cf Ouest-France du 29 avril 2002), et il reprend à son compte les valeurs de Vichy, celles qui étaient en vigueur quand pétain gouvernait la France, en accord avec Hitler.
Or il se trouve que, le dimanche 28 avril 2002, l’Autriche a rendu un hommage solennel à 25 000 victimes du nazisme, 25.000 handicapés physiques et mentaux —dont 5.000 à 8.000 enfants— exterminés sur son sol par les nazis pendant la 2e Guerre mondiale pour « épurer la race aryenne ». C’est un point d’histoire qu’il importe de rappeler quand Le Pen parle de « Rendre la France aux Français »
Le 28 avril, donc, le président de la République autrichienne, et le maire de Vienne, ont participé aux obsèques symboliques de deux des quelque 800 enfants exterminés à la clinique du Spiegelgrund de Vienne, devenus des symboles de ce monstrueux « programme d’euthanasie » et de la barbarie du IIIe Reich.
Enfants torturés
« Depuis 1945, nous avons refusé de reconnaître des crimes commis par nombre de nos compatriotes » pendant la dernière guerre, a déclaré M. Klestil en s’adressant aux familles des victimes. Le « programme d’euthanasie » avait été lancé en 1939 par les nazis dans tout le territoire du Reich auquel l’Autriche avait été annexée en 1938.
Handicapés physiques ou mentaux, « asociaux » ou simplement nés de parents alcooliques ou criminels, plusieurs milliers d’enfants et d’adolescents sont passés par le « Pavillon Am Spiegelgrund », un ensemble de bâtiments situé à la périphérie de Vienne, sur une colline surplombant la capitale autrichienne.
« Nous ne saurons jamais exactement combien d’enfants ont été, ici, victimes des plus abjectes humiliations et des plus indescriptibles tortures », a déclaré, très émue, Waltraud Hauepl dont la soeur, Anne-Marie, est morte à quatre ans au Spiegelgrund où sa famille croyait qu’elle serait traitée pour son rachitisme.
Les noms et les âges des enfants victimes des tortionnaires nazis ont ensuite été lus dans une atmosphère lourde où le chagrin et la colère étaient perceptibles.
Dans ce centre de « soins » qui recevait tous les enfants de la région jugés indignes d’appartenir à la « communauté du peuple allemand », plusieurs dizaines de bocaux contenant des têtes de petites filles et de jeunes garçons conservées dans du formol ont été retrouvés après la guerre.
Selon certains témoignages, les enfants n’étaient pas seulement assassinés mais ils étaient également torturés. Ils mouraient fréquemment de pneumonie après avoir dû absorber des somnifères et des médicaments.
Certains d’entre eux ont été immergés dans l’eau jusqu’Ã ce qu’ils perdent conscience ou enveloppés dans des draps trempés dans l’eau glaciale jusqu’Ã ce que ceux-ci sèchent sur leur corps. D’autres ont reçu des piqûres provoquant des nausées et ont été ensuite obligés à manger leur vomi.
« Souvenons-nous de ces enfants humiliés, torturés et assassinés », a encore déclaré le président autrichien. « N’oublions jamais ces victimes du national-socialisme et restons vigilants pour en combattre les résurgences », a-t-il ajouté.
Le médecin-chef du Spiegelgrund, le psychiatre autrichien Heinrich Gross, un vieillard aujourd’hui âgé de 86 ans, n’a toujours pas été jugé bien qu’il ait comparu à deux reprises, poursuivi pour complicité de meurtres.
Le deuxième procès du « Mengele autrichien », ancien membre du parti nazi qui avait adhéré après la guerre au ... Parti socialiste autrichien, et qui avait exercé comme expert judiciaire, avait été ajourné sine die en mars 2000 en raison de « démence » de l’accusé.
Cet ajournement, qui a fait scandale, a été interprété par les survivants de la clinique comme le refus de l’Autriche de se confronter à son passé nazi.
Venez à moi, les petits, n’ayez pas peur
Ne nous y trompons pas, l’extrême-droite est bien vivace, elle va encore se présenter aux élections législatives. Des électeurs se laisseront abuser par des belles phrases, généreuses en apparence, dangereuses en réalité.
L’école : établir les conditions du libre choix - cela revient à supprimer la mixité sociale, à permettre le regroupement des plus favorisés . Le Pen veut aussi limiter les écoles maternelles et revenir sur la scolarité obligatoire jusqu’Ã 16 ans.
La famille : Le Pen veut interdire l’interruption volontaire de grossesse, stimuler la natalité (donc remettre en cause la contraception). Cela revient à renvoyer la femme dans ses foyers (puisqu’il propose même un SMIC parental), à remettre en cause la parité et l’égalité des sexes. C’est oublier que, dans le passé, ce ne sont pas les familles aisées qui avaient le plus d’enfants, mais les familles pauvres qui ne connaissaient pas les moyens contraceptifs, qui n’avaient pas les moyens d’emprunter les filières d’avortement à l’étranger, qui n’avaient pas les moyens de faire garder leurs enfants chez des nourrices, ni de leur faire donner l’éducation qui pouvait leur changer la vie. L’expérience prouve que, partout dans le monde, y compris dans les pays sous-développés, lorsque l’éducation avance, le nombre d’enfants par famille diminue.
Le Pen envisage même « l’adoption prénatale », ce qui revient à « destiner » certains enfants, avant même leur naissance, à d’autres couples que leurs parents. C’est la porte ouverte à un trafic d’enfants entre riches et pauvres ...
Les impôts : l’extrême-droite (imitée en cela par la droite et même une certaine gauche), parle de réduire les impôts. Le Pen en serait le premier profiteur puisqu’il paie l’impôt sur les grandes fortunes. Les autres bénéficiaires seraient ceux qui paient des impôts. Les autres, aux trop petits revenus, n’ont rien à gagner à cette mesure et au contraire tout à perdre : moins de budgets sociaux, privatisation de nombreux services et ... augmentation de la TVA. Or cette dernière pèse sur tout le monde, y compris les plus défavorisés, par le biais de la consommation.
Les libertés : l’extrême droite veut refondre les syndicats, interdire les manifestations. Ce serait la fin de la liberté d’expression.
Rétablir la peine de mort, comme le propose l’extrême-droite, c’est revenir à la barbarie, c’est accepter toutes les injustices (Les USA viennent de gracier leur 100e condamné à mort, condamné par erreur, comme aurait pu l’être, chez nous, Patrik Dils). On ne combat pas la barbarie par une autre barbarie : la peine de mort.
Ecrit en mai 2002 :
Voter chirac ? Moi ? Jamais !
Et pourtant je vais le faire ...
Voter Chirac ? Moi ? Jamais ! Et pourtant je vais le faire ...Parce que Chirac et Le Pen ce n’est pas la même chose. L’un est un homme de droite républicain, l’autre un fasciste qui ne rêve que de remettre en cause notre démocratie, même s’il cherche, maintenant, à faire croire le contraire
Parce que voter Chirac est le seul moyen de voter CONTRE LE PEN
Parce que toute abstention, tout vote blanc ou nul sera en réalité une voix pour Le Pen (ou plutôt une demi-voix) et qu’il vaut mieux voter complètement pour Chirac que même à moitié pour Le Pen
Parce que je n’ai pas envie de participer, le 6 mai, à la plus grosse manifestation de ma vie, mais peut-être aussi à une des dernières
Voter Supermenteur
plutôt que Superfacho
Pas plus que vous, je ne voterai Chirac de gaieté de cœur, _ pas plus que vous je n’aurais imaginé de le faire un jour,
pas plus que vous je le ferai facilement et sans effort.
L’enjeu est véritablement très sérieux et je n’ai pas envie de regretter toute ma vie mon incapacité à ME SALIR LES MAINS POUR EVITER LE PIRE. Si je ne le fais pas, c’est que je ne crois pas à la réalité de ce danger et que je suis prêt à me rendre complice de son éventuel succès.
Je préfère voter 10 fois Chirac,
Que de regretter une seule fois de ne pas l’avoir fait
Car cette fois-là , ce sera trop tard.
L’enjeu n’est pas aujourd’hui dans la rue, il est dans les urnes
Le 5 mai, je voterai Chirac, la mort dans l’âme,
la rage au cœur,
Pas pour Chirac,
mais pour DEFENDRE LA DEMOCRATIE
(extrait d’un tract syndical)
Ecrit en mai 2002
Tous ensemble
Les organisations syndicales castelbriantaises se sont rencontrées pour examiner le contexte politique et social préoccupant qui place un candidat d’extrême droite au second tour d’une élection présidentielle.
Elles appellent les salariés de l’ensemble des secteurs à exprimer avec force leurs revendications et leur exigence de démocratie et de paix tant au niveau national qu’international.
Elles lancent un appel commun pour un 1er mai unitaire qui, tout en conservant son caractère syndical, constitue une étape importante pour la démocratie, pour le progrès social et les revendications.
Le syndicalisme doit jouer pleinement son rôle pour contribuer à construire en toute indépendance des alternatives pour une meilleure répartition des richesses produites, la justice sociale, la lutte contre le chômage et les exclusions.
Nos organisations ont toujours été de tous les combats contre le racisme et la xénophobie portées par les organisations d’extrême droite.
Dans la tradition ouvrière le premier mai 2002 doit être l’occasion de réaffirmer les valeurs de tolérance et de démocratie qui sont les principes mêmes de la République.
A l’issue du rassemblement, une marche sera organisée vers la Carrières des Fusillés pour un dépôt de gerbe.
Appel commun des organisations syndicales
CGT - CFDT - UNSA - FSU - G10 Solidaires
Ecrit en mai 2002
Tous aux urnes avec des gants
Vous qui, le 5 mai 2002, voterez Chirac la rage au cœur, allez aux urnes avec des gants. Le code électoral ne l’interdit pas. Gants de bricolage, gants de chirurgien, gants de ménage ... symboles de refus, de dégoût, de rejet de cette élection tronquée, signes que nous ne sommes pas complices.
Le bulletin Le Pen
dans la boîte de Chirac
Lorsque vous voterez au deuxième tour, prenez les deux bulletins. Mettez celui de Chirac dans l’urne, parce qu’il le faut bien..., vous pouvez le plier en 4 en 8 en 16, que ce soit un petit vote, du bout des doigts. Le code électoral ne l’interdit pas.
Quant au bulletin du Front National, envoyez le à « J. Chirac, président de la République, Palais de l’Elysée . Paris » (inutile d’affranchir l’enveloppe). Pour qu’il n’oublie pas. Et qu’il sache bien que nous non plus, on n’oubliera pas comment il est arrivé à ce poste.
Le printemps sera chaud. Pas facho.
Ecrit en mai 2002
Dagobert, mon ami, remettez à l’endroit
L’esprit fort dépité du pauvre Saint-Eloi.
Je ne dirais jamais que c’était prévisible,
Comme chacun j’attendais, la joute légitime,
Entre un Jacques, un Lionel, dont je n’espérais rien,
D’autre que des querelles pour des peaux de lapins.
Surgissant, en couleur sur mon écran télé,
Certains soirs un chômeur ou un déshérité,
Venait à ma rencontre. Qui sont ces pauvres gens,
Que l’on ne voit jamais dans nos arrondissements ?
Il parait qu’en banlieue, les soirs de canicule,
Des bons à rien haineux brûlent les véhicules,
J’ai même entendu dire, cela vous surprendra,
Qu’il est des lieux où la police ne va pas.
Surgissant, Oh douleur ! sur mon écran télé,
Dimanche soir, (une erreur sans doute), un gougnafier,
Venait à ma rencontre. Comment ! Des malfaisants,
Ont voté pour ce monstre ? Mon Dieu c’est effrayant !
Mais qui sommes-nous enfin, nous autres les bourgeois
Citadins fortunés, éduqués et courtois,
Qui de gauche, qui de droite. Que signifie ceci
Quand on a tout pour soi, bonne conscience compris ?
Ne nous étonnons pas, que ceux qui désespèrent,
Nous bottent quelque fois, le cul. Ma foi j’espère,
Que lorsque le cauchemar, se sera évanoui,
On écoutera un peu, les gens de ce pays.
Zina
(écrit le 8 mai 2002)
Trois manifestations ont marqué la semaine du 28 avril au 4 mai 2002
déportation
La première eut lieu le 28 avril 2002, journée Nationale de la déportation. La municipalité n’a pas donné d’éclat particulier à cette journée. Et nous, avons-nous oublié ?
Cela aurait pourtant été l’occasion de rappeler un certain « DETAIL » de l’histoire, comme l’a dit Marcel LETERTRe à la cérémonie de La Baule : « Des millions d’êtres humains exterminés dans les camps de concentration nazis : un DETAIL ! L’auteur de cette ignominie, au demeurant orateur talentueux, porté dimanche dernier sur son piédestal par des millions de Français, risque de faire des ravages dans l’Europe entière. (...) A l’heure des égoïsmes de toutes sortes qui sont lâcheté et complicité, les anciens déportés Résistants veulent faire lever dans la conscience des jeunes l’implacable vertu du civisme qui n’est ni docilité, ni obéissance aveugle, ni culte des chefs ».
Deux jeunes filles du Collège Robert Schuman, Louise et Chloé, lauréates du Concours de la Résistance, ont, de leur côté, lu le message national des déportés qui ont tenu à réaffirmer « que l’avenir harmonieux de l’humanité est fondamentalement lié au respect de la dignité humaine, à la sauvegarde des libertés, aux perspectives de développement des populations en proie à la misère »
Premier Mai
Le 1er mai 2002 a rassemblé 500 à 1000 manifestants à Châteaubriant, avec un bon nombre de jeunes. Le défilé vers la Sablière, haut lieu de la mémoire de la barbarie nazie, était impressionnant. De mémoire de syndicaliste, on n’avait pas vu tant de monde depuis mai 68. Une remarque cependant : on a surtout vu des gens de Gauche, salariés essentiellement. Des femmes et des en-
fants, des élus de gauche aussi, quelques commerçants-artisans et professions libérales, quelques paysans et même un chef d’entreprise. Les autres, où étaient-ils ? « ce n’est pas dans notre culture de manifester » disent les gens de Droite. Sauf en mai 68 derrière de Gaulle, sauf à Versailles en 1984 pour défendre l’école privée. Et qu’on ne nous dise pas que les paysans de droite n’ont pas l’habitude de manifester ... ! Même les médecins manifestent pour l’augmentation du prix de la consultation. Mais pas pour la défense de la République menacée par l’extrême-droite ? Ou bien parce qu’on ne mélange pas les serviettes et les torchons, la Jeune Chambre Economique et les salariés de base ...
Les seules prises de parole ont été syndicales (sinon il aurait fallu ouvrir la tribune à tout le monde). Paul Rabel a d’abord rappelé le souvenir de Guy Môquet, mort pour la France à 17 ans et demi.
Yves Le Gall : « Le 1er mai 2002 a un caractère tout particulier en France car la démocratie, les droits des travailleurs, les libertés sont menacés par la présence au 2e tour de l’élection présidentielle d’un candidat d’un parti d’extrême droite qui n’est pas un démocrate, qui se sert du système démocratique pour faire passer ses idées de haine et de xénophobie. ».
Yvan Etiembre : « Notre premier devoir est un devoir de mémoire. Le deuxième devoir est celui de voter, le troisième devoir consiste à entretenir une mobilisation vigilante, le quatrième devoir est un devoir d’analyse : dans le désespoir de l’individu, licencié, délocalisé, méprisé, parqué dans des ghettos dortoirs de masse pour le profit des seuls actionnaires et capitaux spéculatifs, se trouve le terreau fertile ou va croître le fascisme ».
Serge Adry : « les résultats du 21 avril ont des causes. Ils stigmatisent la désespérance, les incompréhensions, la condamnation de ceux et celles qui vivent les inégalités sociales les plus criantes »
La manifestation du 1er mai, syndicale, était soutenue par la Confédération Paysanne, les Partis de Gauche, et diverses organisations comme Amnesty International, et le CCFD. Le CCFD a clairement condamné « le rejet de l’étranger, la vision d’une France repliée sur elle-même, le rétablissement de la peine de mort » Il estime que la lutte contre les inégalités sociales « constitue la priorité absolue si l’on veut guérir les maux qui rongent le monde actuel : désespérance, intolérance, violence, xénophobie »
Du côté des jeunes
Enfin le 4 mai, les jeunes des trois lycées publics et privés de la Ville (Guy Môquet, Etienne Lenoir, St Joseph) ont organisé un après-midi pour la démocratie, avec des groupes musicaux, du théâtre et des débats sur le thème de la démocratie.
Des stands divers et des interventions ont donné la parole au CCFD (comité catholique contre la faim et pour le développement) qui a parlé de ses interventions à Madagascar, à Amnesty International qui a expliqué que la pression populaire a pu faire libérer deux jeunes militants en Tunisie, au MRAP (mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), au Comité Palestine du Pays de Châteaubriant , à la Communauté Turque de Châteaubriant, au mouvement ATTAC, et à l’association « Rencontres » qui fait un gros travail auprès des jeunes. Le représentant turc a dit que, jusqu’Ã maintenant, sa communauté n’avait pas eu de gros problèmes à Châteaubriant et que les Turcs commençaient à s’intégrer en achetant des maisons ou en faisant construire. Il a conclu d’un « vive la démocratie ».
L’après-midi s’est poursuivi autour de stands divers, et d’un podium où se sont produits des groupes musicaux locaux de bonne qualité. Il faisait beau sur les berges du camp de Choisel. « Black, blanc, beur » sont les trois couleurs de la France disait une banderole ....
hélas, si les jeunes étaient là , les adultes n’y étaient guère, à part quelques militants de gauche ou d’associations caritatives.