Ecrit le 27 février 2008
Langage : la rupture
Ca y est : la rupture est amorcée ! Samedi 24 février un visiteur du Salon de l’agriculture a refusé de serrer la main de Sarkozy, en ajoutant « Si tu me touches, tu me salis » . « Casse-toi pauvre con » a répliqué alors N.Sarkozy. Expression vulgaire qui a été approuvée par ses ministres. Brice Hortefeux, ministre de l’identité nationale, a déclaré par exemple : « eh bien moi je trouve ça très bien que le président de la République s’exprime comme chaque Français ». Comme chaque Français ? Hou là !
Le ministre de l’Agriculture, Michel Barnier, présent aux côtés du président au moment des faits, estime que le président a répondu « d’homme à homme ». Le secrétaire d’Etat aux relations avec le Parlement, Roger Karoutchi, pense pour sa part que Nicolas Sarkozy a démontré un calme et une sérénité vraiment exceptionnels et que, lui-même, « aurait mis une baffe » à l’interlocuteur. Une baffe ? Hou là !
Le seul censé, dans cette affaire, c’est Robert Badinter qui a condamné à la fois l’interlocuteur et le président pour insultes réciproques.
Il n’empêche que Sarkozy ouvre ainsi la voie à la liberté des langages. Demain un élève pourra traiter un enseignant de pauvre con. Un automobiliste pourra traiter un jeune flic de « Petit con » et nous disserterons pour savoir ce qui est le plus correct : pauvre con, sale con, petit con, ou peut-être connasse ou connard ?
Rappelez-vous ce qu’a dit Sarkozy le 1er mai 2007, quand on lui a proposé de visiter le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage à Plouarzel. « Je me fous des Bretons. Je vais être au milieu de dix connards en train de regarder une carte ! » . Langage fleuri ...
Con-plexité
Un président au langage châtié, c’est chouette. Michel Audiard dans « Les Tontons flingueurs » a très bien su expliquer le phénomène en faisant dire à un des personnages : « Les cons ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît. »
En tout cas, à l’étranger, une fois de plus on rigole, mais on fait preuve de perplexité : comment traduire « pauvre con » ? Bloody idiot ? Poor crétin ? Stupid bastard ? Pobre imbecile ? Ou Kasstoi Povkon à la hongroise ? Complexité !
Caméra cachée
Valérie pécresse, ministre des Universités, s’est élevée contre « toutes ces caméras cachées, ces micros, cet internet » qui ont permis à trois millions de personnes de revoir l’algarade présidentielle. c’est pourtant ce gouvernement qui souhaite généraliser l’installation de caméras de surveillance !
Histoire
Vers 1967, lors d’un de ses déplacements en province, un quidam se prit à crier, à l’arrivée du général de Gaulle : « mort aux cons ! » Nullement décontenancé, le président de la République répliqua, paraît-il : « Vaste programme ! » . Réflexion pleine de bon sens tant nous sommes cernés par les cons.
Si l’on cessait de jouer au con, tout irait peut-être bien mieux dans ce monde malade de la connerie ordinaire. Le plus grave, pourtant, serait d’imaginer que nous sommes gouvernés par des cons...
Lire aussi :
http://infos.samizdat.net/article229.html
Putain ! Ça monte !
Selon les Echos du 29 février 2008, « Le nombre de demandeurs d’emploi immédiatement disponibles et à la recherche d’un emploi à temps plein (catégorie 1) a augmenté de 13.200 en janvier (+ 0,7 %), selon les données publiées par le ministère de l’Emploi. Une hausse qui suffit à faire repasser leur nombre au-dessus de 1,9 million. Les jeunes sont les premiers touchés (+ 2,1 %). ».
Cette hausse est due en partie à la diminution des « Contrats aidés » En janvier, seuls 14.000 contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE ) ont été signés. C’est presque deux fois moins qu’en janvier 2007 (26.000). Et le phénomène devrait se poursuivre dans les mois à venir. Sympa, à la veille des élections !
A propos de la loi sur la rétention de sûreté, voici un dessin de Maître Eolas :
http://www.maitre-eolas.fr/2008/02/28/883-realpolitik
Note du 5 mars 2008
Le Général Cornecul cause bien aussi
Voir la Lettre à Lulu n° 59 et Presse Océan du 30 janvier 2008
Casse-toi pauvre con ! Sarkozy s’énerve au salon :
http://www.leparisien.fr/home/info/politique/articles.htm?articleid=296079848
L’Elysée regrette à sa place :
http://www.lexpress.fr/info/infojour/reuters.asp?id=65737&1335
Note du 12 novembre 2008
« Casse-toi pov’con »
Lepoint.fr du 06/11 : Le tribunal correctionnel de Laval a condamné Hervé Eon à une « amende de principe » de 30 euros avec sursis pour offense au chef de l’État . Il avait brandi le 28 août une affichette portant la mention « Casse-toi pov’con » devant la voiture de Nicolas Sarkozy. Lors de l’audience du 23 octobre, le parquet de Laval, qui avait engagé les poursuites, avait requis 1.000 euros d’amende à l’encontre de ce chômeur de 56 ans, ancien conseiller général Ps à Laval, estimant que « lorsqu’on insulte le président, on insulte l’institution ». Son avocate, Me Dominique Noguères, avait plaidé la relaxe, estimant que le délit d’offense n’était pas constitué. Hervé Eon a décidé néanmoins de faire appel de cette condamnation.
« Si le prévenu n’avait pas eu l’intention d’offenser, mais seulement l’intention de donner une leçon de politesse incongrue, souligne le jugement, qui se veut un »simple avertissement« , il n’aurait pas manqué de faire précéder la phrase »Casse-toi pov’con« par une formule du genre : on ne dit pas... »
Rappel : N.Sarkozy avait prononcé ces mots « Casse-toi pauvre con » au salon de l’agriculture, à l’adresse d’un visiteur qui refusait de lui serrer la main. 30 euros avec sursis, c’est indirectement une gifle à Sarkozy !
Ecrit le 20 mars 2013
Casse-toi pov’ con
leMonde.fr du 15/03 : La France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), le 14 mars, pour « ingérence des autorités publiques » dans le droit à la liberté d’expression. En cause, la condamnation, le 6/11/2008, pour « offense au chef de l’Etat » d’Hervé Eon, un militant du Parti de gauche.
Au passage de Nicolas Sarkozy, lors d’une visite à Laval le 28 août 2008, le militant altermondialiste avait brandi une pancarte sur laquelle était inscrit « Casse-toi pov’con », en référence à l’invective lancée par l’ancien président de la République, à l’encontre d’un agriculteur qui avait refusé de lui serrer la main.
Le parquet avait engagé des poursuites et requis une amende de 1 000 euros pour offense au chef de l’Etat, réprimée par la loi sur la presse du 29 juillet 1881. Le tribunal correctionnel de Laval avait condamné M. Eon à une amende de 30 euros avec sursis, qu’il avait eu manifestement l’intention d’offenser le chef de l’État. Après la condamnation en appel, son pourvoi avait été rejeté en cassation. Pour M. Eon, pas question d’en rester là . « Cela n’avait rien à voir avec l’argent, c’était une question de principe, d’où la saisie de la CEDH », affirme son avocate.
La Cour européenne estime que « la critique formulée par M. Eon était de nature politique » et « ne constituait pas une attaque personnelle gratuite » contre la personne de Nicolas Sarkozy. L’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, applicable au droit français, protège la liberté d’expression dans le domaine politique. « La Cour rappelle qu’un homme politique s’expose inévitablement et consciemment à un contrôle attentif de ses faits et gestes par les citoyens ». [...]