Ecrit le 30 novembre 2005 :
Affif Cherfaoui : d’un rivage à l’autre
Une très belle exposition a eu lieu à l’école Claude Monet à Châteaubriant.
Fermez les yeux
Imaginez un instant que vous êtes à Oran
Et respirez doucement les odeurs
de Bretagne.
Un éclat blessera soudain vos pupilles :
Vous serez au cœur de la déchirure
(Hamid Skif)
déchirure ? Ou convergence ? Les œuvres que présente Affif Cherfaoui ont été réalisées en 2003, au moment de l’année de l’Algérie en France. Encre, gouache, huile, aquarelle, sanguine : l’artiste multiplie les techniques au gré de sa fantaisie et de ses supports (toile, carton), au gré de son inspiration
Il peint Oran et pense à la Bretagne, il peint Châteaubriant et pense à l’Algérie. « D’un rivage à l’autre » : le thème de l’exposition montre le lien entre la France et l’Algérie, un lien d’histoire, un lien de culture. Affif Cherfaoui n’est pas avare de commentaires. Sa peinture est chaude, vivante, colorée, figurative et en même temps symbolique. Il sait construire un paysage dans toute sa complexité et en souligner les éléments avec la finesse des triangles, des ronds et des points qui caractérise l’art arabe..
Dans tous ses tableaux on ressent l’amour du pays, l’Algérie bien sûr(Oran, Tlemcen), mais aussi la France sa patrie d’adoption (Ile de Ré, île de Bréhat, St Malo). L’artiste affectionne également les constructions graphiques qui expriment son imaginaire et son humour.
D’un côté il explique que les trois boules et le croissant qui ornent le sommet des mosquées, évoquent les « Peuples du Livre », l’Islam qui reconnaît les autres religions
D’un autre côté, il présente « Les héritiers en goguette » avec le chandelier juif, le croissant de l’islam et la croix du christianisme. Mais que représente donc le quatrième personnage, à droite sur le tableau ? « Ce que vous voulez, l’enfant ou le chien. Histoire de rire ». Humour.
Histoire
Pour lui, le kiosque de Châteaubriant rappelle les kiosques de son pays natal, lieux de rencontre et de fête.
L’un de ses tableaux porte trois noms :
– « les enfants d’octobre » évoque cette épisode tragique de 1988 où l’armée écrasa dans le sang la première révolte des étudiants d’Alger.
– « Le fleuve détourné » fait référence à l’écrivain Rachid Mimouni et évoque aussi la première manifestation publique des islamistes en Algérie.
– Enfin « Le bleu tragique de l’Algérie » fait référence au bleu algérien qui, cette fois, marqua un des drames de l’histoire de l’Algérie.
« C’est pas des petites fleurs dans des vases » dit lui même Affif Cherfaoui qui sait si bien accueillir de jeunes élèves, leur raconter des histoires et des anecdotes autour de chacun de ses tableaux.
Et s’il montre des mosquées, lui l’athée, c’est parce que les religions ont durablement façonné les civilisations et l’art.
Femme
Affif Cherfaoui est aussi un peintre de la Femme avec majuscule et ce n’est pas un hasard si l’exposition présente des extraits des poèmes de son ami Hamid Skif.
La mélancolie de « Chaouia », les nus de « Amour et fiel », l’énigme de « Nedjma », « Femme-ville, Femme-forêt, Femme-paysage, Femme-terre, images multiples d’une Algérie, image des Algéries dans les cœurs » écrit Nicole Auffret dans le catalogue de l’expo.
Voir Affif Cherfaoui, à La Meilleraye de Bretagne -
02 40 55 21 27 - afik@club-internet.fr
HOMMAGE
Femmes assises dans les replis du temps
les coins tendres de l’âge
Femmes soumises à la corrosion
des regards acides
des menaces chuchotées
et hurlées
Femmes de terre et d’eau
palpitantes au premier sifflement d’Adam
Les pommiers ont détourné leurs promesses
et les chariots n’empruntent plus
les sentiers menant aux prairies
Lire la suite de ce très beau poème de Hamid Skif
Voir l’expo : à la manière de...
Ecrit le 7 février 2007
Peintre algérien, installé à La Meilleraye, Affif Cherfaoui a exposé au Collège de la Ville aux Roses, à Châteaubriant, sur le thème « D’une rive à l’autre ». Au mois de novembre prochain il exposera dans sa ville natale, Oran, des paysages qui parlent aux gens de là -bas comme aux gens de chez nous.
Par exemple en montrant le kiosque à musique de Châteaubriant et celui d’Oran. Affif Cherfaoui espère nouer des relations entre des collèges de France et d’Algérie ... d’une rive à l’autre.
Le Pont de Mostar : dans ce tableau Affif Cherfaoui veut évoquer « la métaphore de la bêtise humaine ».
L’histoire du Pont de Mostar
Avant 1945, la population de Mostar comptait 33 % de Croates, 35 % de Bosniaques et 19 % de Serbes
Durant la guerre des Balkans (1945-2001), le siège de Mostar est resté largement ignoré des médias internationaux, focalisés sur Sarajevo. Pourtant, la lutte a été féroce dans la ville et aux alentours. Après avoir repoussé ensemble les attaques serbes en 1992, les forces croates et musulmanes se sont déchirées pendant onze mois en 1993.
La ligne de front coupe la ville en deux, le long des berges abruptes de la Neretva. Dans la partie Est, la population musulmane va terriblement souffrir du siège : manque de nourriture, pénurie de médicaments, absence d’électricité et de gaz, la vie quotidienne est bien pire que dans la capitale.
Dans la partie ouest, où se trouvent les Croates, le ravitaillement est assuré depuis la côte dalmate.
Les rares convois humanitaires de l’Onu destiné aux Musulmans sont systématiquement dépouillé de 50% de leur contenu aux check-points croates, au nom d’un « équilibre entre les parties ». Les combats se calmeront progressivement, et les deux armées finiront par coopérer contre les Serbes en 1995 sous la pression internationale.
Mais la violence des combats et les souffrances endurées ont marqué les esprits. Douze ans après, les gens n’ont pas oublié ou pardonné, et la ville reste divisée selon l’ancienne ligne de front. Une purification ethnique de fait a eu lieu : Bosniaques à l’est et Croates à l’ouest. Et les deux communautés vivent en s’ignorant : Musulmans et Croates envoient leurs enfants dans des écoles différentes, regardent leurs propres chaînes de télévision et ont leur propre équipe de football. Les tensions restent fortes, et les rares téméraires qui se hasardent sur « l’autre rive » sont encore trop souvent la cible d’agressions provoquées par des groupes de jeunes nationalistes. La mixité entre Serbes, Croates et Musulmans n’est plus qu’un souvenir, un passé que la nouvelle génération n’a pas connu.
Le vieux pont qui reliait les deux parties de la ville et qui datait de 1566 a été détruit le 9 novembre 1993. Un nouveau pont a été construit par la communauté internationale et inauguré le 23 juillet 2004. Mettra-t-il fin à la division ethnique ?
Le vieux pont de Mostar avait été construit en 1566 par Mimar Hajrudin, un élève du fameux architecte Sinan (père de l’architecture ottomane classique). Le pont était une arche en dos-d’âne qui avait une ouverture de 27 mètres, 4 mètres de largeur et 30 mètres de longueur. La hauteur du pont était de 20 mètres, par rapport au niveau de la rivière en été (niveau maximum).
Le pont était flanqué de deux tours fortifiées, la Tour Halebija (rive droite) et la Tour Tara (rive gauche), toutes les deux datant du XVIIe siècle.
La solidité de cet ouvrage était telle qu’il résista lorsque, pendant la Deuxième Guerre mondiale, des tanks nazis le traversèrent . Avant la destruction de novembre 1993, le principal danger qui guettait le pont était l’érosion due à l’humidité, mais le processus de dégradation était toutefois bien maîtrisé.