Ecrit le 5 décembre 2007
Demain 61 ans, 62 ans, voire 67 ans !
Le 5e rapport du Conseil d’Orientation des Retraites (COR), rendu public le 22 novembre, actualise le rapport de janvier 2007. Son objectif est de préparer la conférence tripartite (Etat, syndicats, patronat) de 2008 et l’offensive de Sarkozy contre les régimes de retraite.
Ce rapport confirme qu’Ã l’horizon 2050, les prévisions catastrophistes qui avaient présidé à la réforme de 2003 ne sont plus de mise : au lieu de reculer de 2 200 000 personnes entre 2015 et 2050, la population active devrait rester stable.
A court terme, en revanche, le rapport constate la dégradation de l’équilibre financier des régimes de retraites par répartition : la loi Fillon est donc un échec
Rappelez-vous, la loi Fillon, votée en 2003, prétendait équilibrer le financement des régimes de retraites, sans diminuer le montant des retraites, simplement en amenant les salariés à différer leur départ en retraite.
Ce départ différé devait mécaniquement entraîner
– une hausse de la masse des cotisations retraites (les salariés restant au travail),
– et une baisse de la masse des pensions versées (les salariés n’étant pas à la retraite).
En fait, en 2006, la masse des cotisations a rapporté 1 milliard d’euros de moins qu’espéré et celle des pensions 1,5 milliards de moins. c’est donc un constat d’échec pour la loi Fillon.
Explication : la fréquence des départs en retraite à 60 ans s’est accélérée et le nombre de départs anticipés pour carrière longue a été plus important que prévu.
La loi Fillon prévoyait la liberté, pour les salariés, de partir ou de ne pas partir en retraite dès l’âge de 60 ans. Elle prévoyait une carotte (= bonification, surcote) pour ceux qui resteraient au travail, et un bâton (= pénalité, décote) pour ceux qui partiraient avant d’avoir tous les trimestres nécessaires.
Licenciés avant ...
Mais tout ce château de sable s’écroule dès qu’il est confronté à la réalité sociale. c’est-y que les salariés sont paresseux ? Non ! c’est seulement que 60 % d’entre eux n’ont aucune possibilité de choisir de rester au travail ou de partir en retraite pour la bonne et simple raison qu’ils ne sont plus au travail au moment de leur départ en retraite. Ils sont au chômage, en maladie ou en invalidité. Le patronat continue, en effet, à licencier à tour de bras les salariés de plus de 50 ans.
Quant aux 40 % de salariés qui sont encore au travail lorsqu’ils arrivent à 60 ans, très peu ont le choix de rester au travail. Pour la très grande majorité, c’est la retraite ou, dans le meilleur des cas, le « licenciement pour motif personnel ». Les patrons ne veulent surtout pas de salariés de plus de 60 ans.
De toute façon, les salariés qui ont réellement le choix se hâtent de prendre leur retraite dès qu’ils le peuvent. Les conditions de travail sont de plus en plus insupportables pour tous et en premier lieu pour les salariés âgés. Ce constat est valable pour le secteur privé mais aussi pour la fonction publique où la « surcote » n’a obtenu aucun succès.
La dégradation continuelle des conditions de départ en retraite dans le régime général comme dans les régimes complémentaires (1993, 1996, 2003, 2005) va dans le même sens et incite les salariés (dans le privé comme dans le public) à prendre leur retraite le plus tôt possible.
Toujours plus
Tout en admettant l’inefficacité de la loi Fillon et en reconnaissant que la majorité des salariés n’a pas le choix puisqu’ils ne sont plus au travail au moment de prendre leur retraite, le COR propose d’aller encore plus loin dans l’absurde et ne remet nulle part en question le passage de 40 à 41 annuités de cotisation entre 2009 et 2012. !
L’emploi des « seniors » n’augmente pas
Le COR constate que le taux d’emploi des 55-64 ans est moins élevé en France (37,8 %) que dans l’ensemble de l’Union européenne (42,5 %). Il ne s’interroge pas pour autant sur ce que signifie la vie quotidienne d’un retraité du Royaume-Uni. Il ne cherche pas à savoir pourquoi tant de retraités britanniques sont obligés d’accepter des « petits boulots » passés 70 ans.
Il constate, cependant, que le « Plan national » pour l’emploi des « seniors » ne semble pas, « à ce jour, avoir infléchi les comportements des salariés et des employeurs ». En l’occurrence, il s’agit avant tout du comportement des employeurs qui continuent à licencier à la même cadence les salariés de plus de 50 ans et qui, au nom de la rentabilisation, rendent les conditions de travail de plus en plus insupportables pour les salariés âgés.
La pièce maîtresse de ce dispositif a fait long feu : l’instauration, d’un « contrat vieux », un CDD d’une durée maximale de 18 mois renouvelable une fois pour les chômeurs de plus de 57 ans a connu un échec magistral : 40 contrats de ce type en tout et pour tout en 2006 ! On ne peut, d’ailleurs, que s’en féliciter car ces contrats ne font qu’accroître la précarité des salariés âgés.
Le COR propose de diminuer les indemnités de départ en retraite, et de faire sauter l’âge butoir de 65 ans. Cette dernière mesure est une attaque contre des centaines de milliers de salariés, en très grande majorité des femmes, qui n’ont pas de carrière complète mais qui peuvent à 65 ans bénéficier d’une retraite à taux plein.
Il propose également de supprimer le droit à la retraite à 60 ans, ouvrant ainsi le passage aux exigences du Medef de différer ce droit à 61 ou 62 ans. Cette disposition vise à empêcher de partir à la retraite à 60 ans les personnes qui disposent de la totalité de leurs annuités. Il leur faudra, malgré cela, attendre 61 ou 62 ans.
Il n’est pas possible, de toute façon, de séparer l’emploi des salariés âgés de celui de l’ensemble des salariés et notamment des jeunes. Il n’est pas possible de voir la société uniquement à travers le prisme des retraites.
Encore faut-il se poser la question de savoir pourquoi il faudrait obliger à travailler plus longtemps des centaines de milliers de salariés âgés alors que des centaines de milliers de jeunes ne trouvent pas d’emploi.
Le niveau des retraites continue à se dégrader
Le COR estime que le taux de remplacement net global à la liquidation de la retraite diminuera, pour les salariés du privé, de 10 points entre la génération née en 1938 (retraite à 65 ans en 2003) et celle née en 1985 (retraite prise en 2050).
Il estime également que si les accords Agirc-Arrco de 2004 étaient maintenus, ce taux de remplacement diminuera de 20 points. Ainsi pour un salaire de 1000 euros (constants), le montant de la retraite qui aurait été de 830 euros en 2003 ne serait plus que de 630 euros en 2050.
Mais ces calculs ne sont pas complets. Ils reposent sur l’hypothèse que les salariés seront encore au travail à 65 ans. Ce qui dans l’état actuel des politiques patronales est une absurdité. c’est donc à un recul beaucoup plus important qu’il faut s’attendre : surtout si la durée de cotisation continue à augmenter. En effet la durée moyenne d’une carrière dans le secteur privé est inférieure à 37 ans. Tant que cette durée n’aura pas évolué, augmenter la durée de cotisation, au-delà de 37,5 annuités, reviendra à réduire le montant des retraites. Tout le restant n’est qu’hypocrisie.
Le but réel de la réforme Fillon est en passe d’être atteint
Cette chute vertigineuse du montant des retraites est bien évidemment le but réel de la réforme Fillon : diminuer le montant des retraites pour ne pas augmenter la part patronale des cotisations retraites et pour faire une large place à l’épargne salariale et aux fonds de pension.
La Droite et le Medef sont sur la bonne voie. Mais cela ne va pas encore assez vite pour eux. Ils veulent donc encore allonger la durée de cotisation pour diminuer encore plus le montant des retraites.
L’équilibre financier des régimes de retraite est loin d’être hors de portée
Les besoins de financement des retraites à l’horizon 2020 représentent 24,8 milliards d’euros (constants). L’équilibre des régimes de retraite n’est donc pas un véritable problème.
Pour s’en convaincre, il suffit, tout d’abord, de rapprocher ce chiffre de 24,8 milliards d’euros des 15 milliards d’euros de cadeau fiscal (par an) que vient de faire Sarkozy aux ménages les plus riches.
Il suffit, ensuite, de mettre en lumière une donnée que le COR se garde bien de dévoiler : avec une croissance moyenne de 1,7 % par an, en 2020, le PIB de notre pays aura augmenté de près de 30 %. Cela représente (en euros constants, hors inflation) un accroissement de la richesse nationale de 410 milliards de francs. Qui peut affirmer qu’avec un tel accroissement de richesse il ne serait pas possible de trouver moins de 25 milliards d’euros pour équilibrer les régimes de retraites ? Cela n’empêcherait ni l’augmentation des salaires directs, ni le financement de la sécurité sociale, ni les investissements productifs Cela éviterait simplement que le patronat confisque, comme il en a bien l’intention, la part de cette augmentation de richesse qui revient aux retraités.
Le COR constate lui-même qu’il y a trois possibilités pour équilibrer les retraites en 2020 :
– soit diminuer le montant des retraites de 20 %,
– soit relever l’âge de départ en retraite d’un peu plus de 3 années supplémentaires,
– soit augmenter de 4,5 points les cotisations retraites.
Comment se fait-il que cette 3e possibilité ne soit jamais soumise au débat ? Cela correspondrait à une augmentation des cotisations annuelles de 0,34 point des cotisations retraites.
A raison de 0,24 point pour la part patronale, afin de commencer à rééquilibrer le partage de richesse, et de 0,10 point pour la part salariale, qui peut nier que pour la grande majorité de la population, cette solution est mille fois préférable aux deux autres options ?
Tout le monde en 2008
Ce rapport du COR avec lequel la CGT, FO, la FSU et Sud ont pris leurs distances, prépare le rendez-vous de 2008 (Etat, syndicats, patronat) qui devra négocier les suites à donner aux mesures prises en 2003 par la loi Fillon.
d’ores et déjà le COR nous a prévenus : allongement de la durée de cotisation, accentuation des décotes, fin des départs anticipés pour carrière longue, diminution des primes de départ en retraite, « emplois-vieux » encore plus précaires, suppression du droit à la retraite à 60 ans, suppression de l’âge-butoir de 65 ans
c’est donc une riposte d’ensemble qu’il faut préparer pour faire ravaler à la Droite non seulement ces projets pour 2009 mais tout ce qu’elle nous a imposé depuis 1993. c’est à ce prix uniquement que les revenus de la grande majorité des retraités ne seront pas sous le seuil de pauvreté dans 20 ou 30 ans.
Ecrit le 28 mai 2008
L’UNEDIC et l’emploi des Seniors
Selon que vous serez jeune ou « vieux » ....
Le nouveau président de l’assedic, Geoffroy Roux de Bézieux, a reconnu que l’entreprise qu’il dirige, Virgin Mobile France, n’employait aucun salarié de plus de 55 ans. « Ce n’est pas un racisme anti-vieux, a-t-il expliqué, c’est que je ne peux pas recruter des gens de plus de 50 ou 55 ans dans un métier qui a 10 ans ».
Façon de dire que passé 50 ans, on ne peut plus être utilisable ! Si même le président de l’aSSEDIC le dit ..