Ecrit le 7 juillet 2004 :
35 heures et plus si affinités
On nous a dit « l’Europe ce sera formidable ! », on nous a parlé d’harmonisation, de modèle social européen. On nous a promis que ce serait l’Europe des peuples après avoir été celle des affaires.
Et voilà que la marche arrière est enclenchée, à toute vitesse. Le monde des affaires tente une harmonisation par le bas, c’est le règne du moins-disant social. « On » prend prétexte des conditions de vie des pays les moins favorisés pour faire pression sur les salariés de nos pays. On menace de « délocalisation » pour obtenir une augmentation du temps de travail (de ceux qui travaillent !) et une mise en cause du droit du travail.
En arrière, toute !
Nicolas Sarkozy, dont le frère est un grand ponte du MEDEF, n’y va pas par quatre chemins : le 30 juin 2004 il s’est prononcé, devant un aréopage de petites et moyennes entreprises (CGPME) pour un retour sur la loi des 35 heures, lancée par le gouvernement Jospin. Faut-il rappeler encore que le but de cette loi était de diminuer le travail des uns pour donner du travail aux autres ?
Foin de tout cela, N.Sarkozy veut que
la règle des 35 heures devienne « obsolète »
et va jusqu’Ã envisager de ne pas payer
en supplément les heures
qui dépassent la durée normale du travail.
« Je ne vois vraiment pas pourquoi on devrait pénaliser un entrepreneur qui veut donner davantage de travail ou un salarié qui veut en faire davantage », a-t-il lancé. Sauf que le jeu n’est pas égal. Sauf qu’on connaît, dans les grands magasins par exemple, des salariés à 35 heures qui font 45 heures (sans en avoir le choix) et qui, de plus, ne sont même pas payés pour ce dépassement ! La loi veut donc rendre « normal » ce qui est fautif.
On baisse d’abord, On délocalise ensuite
Ne nous y trompons pas : l’expérience nous a appris que le patronat agite les menaces de délocalisation, pour obtenir une baisse des salaires. Et quand il l’aura obtenue, il délocalisera quand même ! Baisse de salaires dit baisse des revenus, baisse de la consommation, baisse des indemnités de chômage, baisse des indemnités maladie.
Augmentation sans limite de la durée du travail
dit pression accrue sur les salariés,
risques accrus d’accidents du travail ou de maladie,
donc déficit accru de la sécurité Sociale.
Le cercle est doublement vicieux, les salariés y perdent pas tous les bouts. Mais en même temps nul ne songe à toucher aux revenus faramineux des grands patrons, des boursicoteurs à grande échelle, des footballeurs et autres vedettes de la télévision. Les grosses sociétés affichent des résultats insolents. Leurs salariés y sont pour quelque chose. Pourquoi doivent-ils encore se serrer la ceinture ?
Le premier ministre JP. Raffarin n’a pas caché qu’il estime « nécessaire d’augmenter les heures travaillées ». Et puisqu’il n’y a plus d’élection pendant trois ans, comme le lui a dit Seillière, Chirac devrait se laisser convaincre.
N.Sarkozy y voit le moyen de tailler dans les allégements de charges sociales (coûtent 16 milliards d’euros). Ironie, les entreprises, elles, rechignent, elles tiennent à leurs réductions de charges. Sur ce point le ministère des finances a déjà plié : il n’y touchera pas. Ainsi les entreprises gagneront doublement : sur la durée du travail et sur les allègements de charges.
Les autres pays européens ne sont pas en reste.
Jeudi 24 juin, Siemens a fait grand bruit en annonçant un accord avec le puissant syndicat IG Metall pour introduire la semaine de 40 heures sans hausse de salaires sur deux sites en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, les primes de vacances et de Noë l étant de plus remplacées par une prime de « résultat ». En échange de cette baisse de 30 % des coûts de personnel, qui touche 4 000 salariés, les 2000 délocalisations d’emplois vers un site de Hongrie, ont été abandonnées. Pour combien de temps ?.
A Sindelfingen, dans le Bade-Wurtemberg, où travaillent 40 000 salariés de DaimlerChrysler, les demandes de la direction sont claires : le géant de l’automobile conditionne de nouveaux investissements sur le site à une hausse du temps de travail. Selon les représentants du personnel, le maintien d’un quart des postes, à Sindelfinden, serait dans la balance.
Au chantier naval HDW, un quota d’heures supplémentaires gratuites a été autorisé. Ailleurs en Allemagne, par exemple chez Bosch ou Philips, des négociations ont abouti à une hausse du temps de travail sans hausse des salaires, voire avec suppression de primes.
Pas acceptable
Même les secteurs non industriels s’y sont mis. Ainsi, dans l’entreprise allemande de voyage Thomas Cook la Direction propose de passer de 38,5 à 40 heures le temps de travail, sans augmentation de salaire, afin d’obtenir rapidement des économies sur les frais de personnel. La proposition concerne les 2 000 salariés employés
dans les agences de voyage, touchés par un plan de réduction de 25 % des coûts salariaux. C’est dans ce cadre qu’a été supprimée l’agence de voyage située au 3 rue Aristide Briand à Châteaubriant .
En mai, la Deutsche Bahn, la compagnie des chemins de fer allemands, a également annoncé qu’elle proposait aux syndicats de négocier une hausse du temps de travail à 40 heures par semaine pour ses 243 000 agents à partir de 2005, sans compensation de salaire, au lieu d’environ 38 heures actuellement. En contrepartie, elle maintiendrait jusqu’en 2008 son engagement de ne pas recourir à des licenciements secs dans l’entreprise. Le chef du personnel voudrait aussi aménager un « corridor » de plus ou moins 10 % du temps de travail en fonction de la conjoncture et des besoins régionaux, réduire la comptabilisation des pauses et des interruptions de service dans le temps de travail, transformer des primes fixes en rémunération au mérite et diminuer et forfaitiser les primes et les majorations horaires.
En France se multiplient les opérations de chantage destinées à mettre en cause les 35 heures
A vénissieux, la direction de Bosch a proposé aux syndicats une réduction de 12 % des coûts salariaux avec une liste de plus de quinze points de perte des acquis. Les 820 salariés sont appelés à se prononcer individuellement d’ici le 13 juillet sur ce protocole, qui prévoit, sans augmentation des salaires, le passage à 36 heures, soit la perte de six jours de RTT sur vingt, la suppression du pont de l’Ascension et entre autres, la réduction du budget du comité d’entreprise.
Liberté de choix ?
Si les salariés acceptent, la direction promet 12 millions d’euros d’investissements (chez Focast à Châteaubriant la direction avait, aussi, promis des choses. On a vu ce que cela a donné). Si les salariés refusent, il est question de 300 suppressions d’emplois dans un premier temps.
Le problème, maintenant, c’est la liberté de choix des salariés : ils doivent donner personnellement leur accord à un avenant à leur contrat de travail. S’ils le refusent, aucune garantie ne leur est donnée : ils s’exposent à un licenciement. Le patronat espère ainsi se débarrasser des opposants au projet : FO et CGT qui contestent, depuis le début, ce qu’ils dénoncent comme un chantage.
Le groupe avec ses 3,1 milliards d’euros réalisés en France n’est pas en difficulté, il investit en Italie et en République tchèque. De la recherche de main-d’œuvre à bas prix à la casse des savoir-faire, il n’y a qu’un pas.
(source : l’Humanité)
Ecrit le 7 juillet 2004 :
35 heures ? Vous rigolez ?
En France, ce n’est pas le règne des 35 h, loin de là . Les 35 h - insuffisamment appliquées ! - ont créé 350 000 emplois à 450 000 emplois. La démolition progressive des 35 h, l’allongement des durées du travail sur la vie, sur l’année (jour férié en moins) et sur la semaine, recréent du chômage de masse...
L’immense majorité des salariés travaillent déjà plus près de 45 h que de 35 h.
– 750 000 salariés dans la restauration travaillent plus près de 60 h que de 35 h
– 700 000 chauffeurs travaillent plus près de 56 h que de 35 h
– 1 100 000 ouvriers du bâtiment travaillent plus près de 50 h que de 35 h
– sur 2,5 millions de salariés du commerce et de la distribution, il y en a 1 million qui sont condamnés au sous-travail à temps partiel contre leur gré, mais il y en a 1 million qui travaillent plus près de 60 h par semaine que de 35 h
– 333 000 nettoyeurs travaillent plus près de 250 heures par mois que de 151 h 66
– 200 000 gardiens sont plus près de 50 ou 60 h que de 35 h
– Doit-on parler des travaux saisonniers ? Des médecins des hôpitaux ? De la confection ? De l’agriculture où l’on peut travailler légalement jusqu’Ã 72 h.. ?
Les « équivalences » (genre 11 h valant 8 h, pour les plongeurs de salle de restaurant) existent encore dans la restauration, le gardiennage, le commerce, la coiffure, les transports...
– les boulangers pâtissiers travaillent jusqu’Ã 60 h
– dans les défilés de haute couture, on trouve des pointes à 70 ou 80 h
– il y a 3,5 millions de cadres : 25 % de ceux-ci seulement travaillent moins de 45 heures, l’immense majorité en forfaits jours est entre 45 et 60 h...
– il y a ainsi plus de 6 à 7 millions de salariés en situation de surtravail, souvent en dépit des contingents autorisés d’heures supplémentaires, souvent sans repos compensateur.
– Plus d’un employeur sur deux est en situation de délinquance vis-Ã -vis des heures supplémentaires impayées.
L’essentiel du travail dit « au noir »
n’est pas dans les « petits boulots » non déclarés ",
il est surtout dans les milliards heures supplémentaires
non déclarées !
La seule durée du travail qui compte (et elle-même n’est pas toujours respectée) c’est les 48 h hebdomadaires car elle est la « durée maxima d’ordre public ».
Cela permet donc légalement 13 h supplémentaires par semaine ! (du temps des 39 heures, il n’y avait que 9 h supplémentaires hebdo possibles !)
M. Borloo parle d’un contrat « volontaire » dérogatoire à 120 % de la durée du travail : cela ferait une durée maxima du travail à 58 h ! un recul de 150 ans ! Même en Corée ils ont réussi à diminuer récemment la durée du travail de 56 à 54 puis à 50 h... Même « l’opt out » en Grande-Bretagne est censé être contrôlé..
Sur, sous, sans
On est en fait, déjà , dans une spirale infernale d’heures travaillées augmentées par milliards. Elles provoquent un chômage de masse qui augmente depuis que la droite est revenue aux affaires :
– Sur-travail (des milliards d’heures sup’)
– Sous-travail (17 % de salariés à temps partiel, 85% de femmes, 80% non qualifiées)
– Sans-travail (Le chômage a enregistré une nouvelle progression de 0,8 % en mai, totalisant 2.451.000 demandeurs d’emploi, soit 20.300 chômeurs supplémentaires, selon les statistiques du ministère de l’Emploi. C’est en fait plus 211.000 chômeurs de plus en deux ans de gestion Chirac-Raffarin-Sarkozy-Fillon-Borloo.
Les salariés français sont les héros de notre temps, ils effectuent les plus forts gains de productivité au monde ! Mais hélas, ils ne sont pas récompensés comme ils le devraient : il faut augmenter leurs salaires ! (ce qui réglerait tous les problèmes de déficit des caisses de retraite ou de sécu). Il faudrait aussi en revenir à de véritables 35 h pour toutes et tous, ce qui ferait reculer le chômage de masse qui ronge notre société.
Depuis la suppression de la loi de modernisation sociale, les licenciements sont facilités, l’emploi recule, les salaires stagnent sous la pression... le droit du travail recule, davantage d’accidents, davantage de maladies professionnelles, davantage de souffrance au travail...
Ce que veulent donc Raffarin et Sarkozy, c’est « baisser les salaires » ! Ne plus payer d’heures supplémentaires ! Travailler plus en gagnant moins !
Avec la gauche on n’a, hélas, pas eu vraiment les « 35 h sans perte de salaire », mais avec la droite, on va donc avoir « les 45 h sans gain de salaire » !
gérard Filoche
(voir « Carnets d’un inspecteur du travail » Ed Ramsay mai 2004)
Ecrit le 7 juillet 2004 :
AFPA : formation en péril
La formation professionnelle des adultes est menacée par la prochaine loi de décentralisation qui se traduirait par 600 à 700 suppressions d’emploi au niveau national de façon à préparer l’AFPA à se mettre en concurrence avec des organismes privés. Le service public de formation professionnelle des chômeurs est en danger, alors qu’on ne cesse de nous répéter que la formation des salariés est insuffisante. En fait, les chômeurs, on s’en fout !
Ecrit le 22 septembre 2004 :
Remise en cause européenne
Les décisions européennes,
on n’y prête pas trop attention.
Et puis, boum !
ca vous tombe sur le nez
et vous boucle le bec.
Faites le dos rond,
acceptez n’importe quoi
Et on vous en imposera encore davantage.
Et encore il faudra dire Merci,
avec un grand sourire
Une nouvelle exigence des patrons
La Commission européenne doit proposer, mercredi 22 septembre 2004, la révision d’une directive, adoptée en 1993, qui limite à 48 heures la durée hebdomadaire du travail, heures supplémentaires comprises, mais autorise les Etats à dépasser cette limite si les travailleurs, consultés individuellement, donnent leur accord. (c’est ce qu’on appelle : la clause de renonciation)
Souvent, les employeurs font signer cette clause de dénonciation par les salariés en même temps que le contrat de travail, ce qui prive largement ceux-ci de leur liberté de choix. De plus, aucun contrôle n’est possible sur le temps de travail réel de ceux qui travaillent au-delà de 48 heures.
La Confédération européenne des syndicats (qui est d’habitude bien timorée) demande la suppression de la clause de renonciation, le maintien à quatre mois de la
période de référence sur laquelle est calculé le temps moyen de travail (qui peut être porté à douze mois par convention collective) et la reconnaissance du temps de garde comme temps de travail.
Mais les patrons tiennent à cette clause de renonciation, proposent l’allongement à douze mois de la période de référence (au lieu de 4 mois) avec possibilité d’extension par convention collective. Et ils considèrent que seules les périodes de travail effectif pendant les temps de garde devraient être comptées.
65 heures
La Commission Européenne suggère que la clause de renonciation, avant d’être proposée individuellement aux travailleurs, fasse l’objet d’un accord avec les organisations syndicales.
Si l’accord n’est pas possible ou si l’entreprise ne dispose pas de représentation syndicale, le choix restera individuel, dans la limite de 65 heures maximales par semaine, dûment contrôlées.
La période de référence, pour le calcul des 48 heures, serait portée à douze mois.
Sur le temps de garde, la Commission propose, au-delà du temps de travail et du temps de repos, une troisième catégorie : le temps de garde inactif
La construction de l’Europe ......
ou les lendemains qui déchantent
BP
Ecrit le 15 décembre 2004 :
Opération destruction
Il nous ment, il nous ment /
C’est du vent il nous balade/
Il nous vend que des salades/
Y en a marre des boniments
(extrait des Fabulous Trobadors)
Ca y est : l’opération de destruction des droits des salariés a fait un pas de géant. Le gouvernement vient mettre en échec les 35 heures. Et tout le monde, encore une fois, va faire le dos rond. Pourquoi donc que le patronat il se gênerait ?
Au nom de la liberté de travailler (ou non), au nom de l’égalité (dans les discussions patronat-salariés), voilà que Raffarin lance un « accord pour le temps choisi » qui conduira les salariés à travailler au delà du contingent local.
« Le temps choisi » : la formule est belle. La réalité est plus triste : aucun salarié de ce pays n’a le choix de son temps de travail. Tout salarié est « subordonné » : c’est son employeur et son employeur seul, qui décide de son temps de travail.
Seul l’employeur décide de la naissance du contrat, de l’exécution du contrat et de la fin du contrat. C’est lui qui décide d’embaucher, à temps partiel ou à temps plein, et de faire faire ou non des heures supplémentaires...
A temps plein, il peut faire faire des heures supplémentaires dans la limite de la durée maxima hebdomadaire du travail qui est de 48 h. C’est lui qui décide en fonction de ses besoins et à la tête du salarié. Parfois, il peut avec autorisation préalable de la DDTE, faire faire travailler jusqu’Ã 60 h. Toutes ces heures s’entendent en « temps de travail effectif » ce qui exclut les temps où vous êtes « sous les directives de l’employeur » tout « en vaquant librement à vos occupations personnelles » (astreintes, pauses, transports pour l’entreprise, etc...)
La commission européenne est en train de discuter de la façon de porter ces deux durées maxima de 48 et 60 h respectivement à 65 h et 78 h.
Tout employeur peut faire travailler un salarié jusqu’Ã 48 h par semaine à concurrence d’un contingent annuel qui était de 91 heures en 1995 (dans la métallurgie) mais qui est devenu de 130 h, puis de 180 h dans les entreprises de moins de 20 salariés et qui tend à être allongé par Raffarin-Borloo, etc... à 220 heures.
déjà dans la poissonnerie, le contingent est de 230 h : cela revient à faire travailler un salarié 14 mois en 11 mois, cela nuit à la santé et à l’emploi.
Il nous ment
Et tout ça sans augmenter les salaires ! Car le gouvernement ment : avant les heures supplémentaires étaient payées au moins à 25 % (et certaines à 50 %), il les ramène à 10 % dans la majorité des cas, ce qui revient à vous faire travailler plus en gagnant moins.
Les heures comptabilisées en « compte épargne temps » et en « RTT », le gouvernement dit qu’elles peuvent être payées au lieu d’être prises : c’est le pire ! Cela évite toute majoration des heures en question ... Encore une fois vous travaillerez plus en gagnant moins !
Le Figaro, qui rend compte de ces projets affirme que cette réforme permettrait de « responsabiliser » les salariés « en leur indiquant clairement le coût de leurs jours de RTT ». Le problème, c’est que les salariés ont déjà « payé » les 35 heures, par la modération salariale et par l’intensification du travail, la modulation et l’annualisation : des outils de flexibilité contenus dans les lois Aubry ! Le patron, lui, a été payé avec des aides financières considérables !
Finalement les salariés perdent sur tous les tableaux.
D’après gérard Filoche, Inspecteur du Travail
démocratie et Socialisme
Ecrit le 15 décembre 2004 :
Compte épargne-temps
Quel le principe du compte épargne temps et son fonctionnement actuel ?
– A la naissance des congés payés, ceux-ci étaient obligatoires, un employeur qui proposait de les payer, au lieu d’accorder le repos légal que le salarié méritait, commettait un délit. Il s’agissait de protéger à la fois la santé du salarié, et l’emploi.
La création du « compte épargne temps » (CET) a remis cela en cause, en faisant semblant de donner le « choix » au salarié : ne prendre ses congés qu’en partie ou de façon différée, ou être payé à la place. Mais c’est un faux « choix » car le salarié, d’après ce qui caractérise son contrat de travail, est « subordonné » à l’employeur. La plupart des accords qui incluent des « comptes épargne-temps » prévoient que les dates en sont fixées selon les besoins de l’employeur. C’est donc une méthode d’ajustement au détriment du salarié, de sa santé et de l’emploi.
Certains accords ont prévu que, dans les dernières années avant la retraite, on puisse cumuler des congés non pris, pour... partir plus tôt... Si on y arrive sain et sauf ! Car un tel rythme annuel entre 55 et 60 ans, est plus que nuisible à la santé.
D’autres accords prévoient qu’on peut cumuler sur trois à quatre ans, des congés : mais si le cadre, après quatre ans, « choisit » de prendre en forçant la main à son patron, plusieurs mois de congés, ça désorganise l’entreprise, cela peut conduire à le remplacer, à l’écarter de son poste...
En fait le « compte épargne temps » est une forme de flexibilité maximale, pluri-annuelle, qui vise, sinon à supprimer les congés payés annuels, du moins à les réduire et à les étaler, sans tenir compte des besoins biologiques, humains, familiaux, etc... C’est présenté comme étant non obligatoire, basé sur le volontariat, mais en fait, en pratique, c’est imposé et c’est défavorable au salarié...
Que changera concrètement pour le salarié la réforme proposée par le gouvernement ?
– Cela étendra le système du CET (« compte épargne-temps ») aux jours de « RTT ». Le fait qu’il y ait des jours de RTT signifie déjà des « accords » où existe une annualisation : les salariés travaillent davantage selon les pics de production, quand cela arrange l’em-ployeur. Avec le nouveau projet gouvernemental, le salarié aura, en compensation, non pas des jours de repos, mais de l’argent. [ndlr : ce qui, pour les petits salaires, ne serait pas négligeable, mais se ferait au détriment d’autre chose]
Ce serait une augmentation substantielle des durées du travail annuelles. Non seulement cela va contre la santé des salariés mais cela fabrique du chômage ; autant d’embauches en moins, autant d’heures supplémentaires en plus.
Tout ce que fait ce gouvernement Raffarin fabrique délibérément, consciemment, du chômage, en faisant travailler davantage ceux qui ont un emploi tout en maintenant à l’Anpe ceux qui y sont inscrits ou exclus.
Le gouvernement entend également modifier le quota d’heures supplémentaires. Peut-on faire un bilan de ces « assouplissements » successifs des 35 heures ?
– Le gouvernement laisse les 35 h en place (virtuellement !) mais comme « seuil de déclenchement des heures supplé-mentaires » (car il a peur de modifier 22 millions de bulletins de paie) mais il augmente farouchement le nombre d’heures supp, (jusqu’Ã 220 heures annuelles soit 4 heures supplémentaires par semaine) supprime les RTT, diffère les congés, tout cela sans même majorer le coût desdites heures supp’ : en vérité rien pour les salariés, tout pour le maximum de profit des employeurs, et pour les beaux yeux du Medef qui en redemande toujours plus.
De surcroît, il y a déjà des milliards d’heures supplémentaires non payées et non déclarées, (premier motif de délinquance patronale massive) ce qui est la principale source de travail dissimulé, clandestin, dans ce pays, et qui nuit à nos caisses de sécurité sociale et de retraite...
gérard Filoche, inspecteur du Travail
démocratie et socialisme
35 heures : à améliorer
Une étude publiée par l’Insee en février dernier révèle que 15% seulement des Français estiment que la loi sur les 35 heures a dégradé leurs conditions de travail, alors que 50% les trouvent améliorées.
Cela n’a pas empêché Mme ségolène Royal de déclarer, sur son blog, que les 35 heures ont entraîné « une dégradation de la situation des plus fragiles, notamment les femmes ayant des emplois peu qualifiés, pour lesquelles la flexibilité s’est traduite par un empiètement accru sur leur vie personnelle ». et que « la répartition de l’effort et des avantages a été fortement inégalitaire »
Aussitôt M. Nicolas Sarkozy a réagi ironiquement, en estimant que ségolène Royal était « sur le bon chemin » et l’UMP s’est félicitée que les « 35 heures soient définitivement enterrées » par une candidate à l’investiture socialiste.
Devant ce qui est apparu comme une remise en cause des 35 heures, Mme Royal a précisé que
– les 35 heures constituent une « conquête sociale de première importance »
– qui a « créé 350 000 emplois » et « permis de libérer du temps »
– et que tout le monde devrait pouvoir profiter de « leurs bienfaits », ce qui n’est pas le cas « pour les salariés au bas de l’échelle sociale », envers qui les 35 heures « ont été mal appliquées par certains patrons sans vergogne ».
En cela elle a tout à fait raison.
Mais pourquoi les 35 h ont-elles eu une application inégalitaire ?
– Parce que 97 % des entreprises ont moins de 50 salariés.
– Parce que un salarié sur deux travaille dans ces entreprises-là (8 millions)
Parce que c’est là que, souvent, les salaires sont les plus bas, les durées du travail les plus longues, les accidents du travail les plus nombreux, les maladies professionnelles les plus fréquentes, les conditions de travail les plus dures, le taux de temps partiel le plus élevé, il n’y a pas de délégués du personnel, pas de syndicats, c’est là que le nombre d’heures supplémentaires est le plus important.
Or, c’est là , dans les entreprises de moins de 20 salariés, (5 millions de salariés), que la deuxième loi Aubry a ouvert le plus de « souplesses » (comme s’il en était besoin...) et que les heures supplémentaires entre 35 et 39 h n’ont été majorées qu’à 10 % ! Les employeurs ont souvent maintenu leurs salariés à 39 h payées 39 h 24’
Cela devait s’arrêter le 1er janvier 2005 et la majoration devait passer à 25 % ce qui aurait été une petite augmentation de salaires pour les bas salaires, soit 39 h payées 40. Mais François Fillon a reporté cette date au 1er janvier 2008...
Heures sup’ à 10 %
C’est dans les petites entreprises que des centaines de millions d’heures supplémentaires sont faites à bas coût par les salariés à bas salaires...
Lorsque les heures supplémentaires sont peu coûteuses, quel sens peuvent avoir les 35 h ? Aucun !
La durée légale ce n’est que le seuil de déclenchement des heures supp’ : comme la durée maxima du travail hebdomadaire est restée à 48 h, il y a place pour 13 h supplémentaires par semaine (au lieu de 9 h du temps des 39 h)
70 % des employeurs contournent les 35 h en faisant faire des heures supplémentaires.
Que faire ?
Si l’on veut faire bénéficier les salariés les plus modestes des 35 h, il faut majorer les heures supplémentaires de façon à les rendre plus coûteuses que l’embauche (50 % dés la première heure).
et il faut limiter le nombre des heures supp’ : baisser la durée maxima de 48 h à 44 h
il faut réduire les contingents annuels d’heures supplémentaires autorisées (allongés à 130 h par la loi Aubry et à 220 h par la loi Fillon) sachant que le dépassement de ce seuil est déjà source d’une majoration de 100 % pour les heures supplémentaires en sus. (Ce qui veut dire que lorsque F.Fillon a fixé le contingent à 220 h, il faisait perdre 90 h de salaire au pauvre salarié qui travaillait 220...)
Il faut réintroduire le paiement des heures de trajet professionnel imposées, que la loi Borloo a supprimé !
il faut réimposer les deux jours de repos consécutifs dans le Code du travail : ce sont les salariés les plus défavorisés qui n’en profitent pas !
Il faut se donner les moyens du contrôle car la fraude principale en droit du travail, la source essentielle du travail dissimulé (« au noir » ) c’est le non paiement des heures supplémentaires à taux légal par les employeurs et actionnaires, c’est l’objet de 4 plaintes sur 5 à l’inspection du travail, qui n’a pas les moyens (effectifs, sanctions pénales, suivi judiciaire) pour faire respecter actuellement, même les lois insuffisantes qui existent.
il faut sanctionner les entreprises qui font des « coupures » de plus de 2 h dans la journée aux salariés pauvres à temps partiel : il faut légiférer sur les priorités des passages à temps partiel à temps plein dans les entreprises, il faut faire une « indemnité de majoration des temps partiels » et faire que les « heures complémentaires » (non majorées pour les temps partiels) deviennent des « heures supplémentaires » (majorées)
D’après gérard Filoche, Inspecteur du Travail,
démocratie et Socialisme
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