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Ecrit le 1er avril 2009
A Derval, les salariés de la laiterie ne comprennent pas :
– La laiterie a dégagé des bénéfices en 2006 et 2007
– Elle est médaille d’or au concours agricole de 2005 et bronze en 2008
– Elle est médaille d’or en février 2009
– Elle a satisfait à toutes les certifications demandées « Nous n’avons jamais raté une marche »
– Elle s’est engagée dans une démarche écologique en recyclant 95 % de ses déchets et en faisant des économies d’énergie de l’ordre de 15 %
A la fin du troisième semestre 2008, au Comité d’Entreprise, la direction annonçait « Nous serons à l’équilibre ». Et trois mois plus tard elle relève un déficit de 435 000 €uros. « Nous ne comprenons pas ! Quelles charges a-t-on mis sur Derval, tout-Ã -coup, pour nous faire avaler la fermeture de l’usine ? ». Les salariés font appel à un expert comptable et à un avocat « car nous n’avons plus confiance ».
La Compagnie Laitière Européenne (CLE), filiale de Bongrain,veut fermer l’usine de Derval d’ici au mois d’octobre, en disant que le volume de production n’est pas sufisant pour garantir la pérennité du site.
Cette unité, qui traite plus de 80 millions de litres de lait par an, emploie 83 salariés. Sa production de lait UHT est cédée au groupe Coralis, dont l’usine est située à Cesson-sévigné (Ille-et-Vilaine), tandis que sa production de crème fraîche rejoindra le site CLE de Condé-sur-Vire (Manche). Près de 50 salariés seront invités à rejoindre les repreneurs et des reclassements seront proposés aux 30 autres.
Touche pas à ma crème
Le fleuron de Derval, c’est la crème liquide UHT. « Elle est renommée dans le monde entier. Elle part aux USA, en Afrique, en Chine, dans les Pays arabes. Elle est destinée aux pâtissiers et aux cuisiniers ». L’usine de Derval offre toutes les garanties de qualité. c’est pas comme d’autres usines du groupe. « Et on veut envoyer la production de crème à Condé-sur-Vire ! Nous sommes prêts à comparer nos coûts de production. c’est sur le bassin de Derval que les coûts de collecte du lait sont les plus faibles. La production de crème est encore une activité rentable ».
Alors : « touche pas à ma crème, touche pas à mon usine, touche pas à mon emploi » a dit le millier de manifestants du 27 mars. Sûrement que Derval n’en avait jamais vu autant !
Seule une trentaine de salariés resteraient à Derval pendant 15 mois encore, pour assurer la collecte du lait. Pour la suite c’est le flou complet. Et 83 autres salariés se verraient proposer un poste à quelque 150 km de Derval (ou rien !). Et dans 15 mois on arrête la collecte sur Derval. Mise à mort en deux étapes !
« Nous entendons dire, pourtant, que le groupe Coralis n’est pas florissant. Alors pourquoi lui transférer la production du lait UHT ? Nous avons le sentiment que la direction du groupe veut simplement se débarrasser de l’usine de Derval et de ses salariés. La crise économique a bon dos ! ».
Cappio tête de veau Bongrain assassin Du lait, du lait, du lait Pour la laiterie de Derval
Le cortège s’ébranle, coloré et bruyant. Les commerçants dervalais ont baissé les rideaux et se sont joints au défilé. Mme le maire de Nozay est au milieu des manifestants, ainsi que quelques commerçants nozéens. De la ville, les gens sont venus à pieds, on trouve même des poussettes et de fauteuils roulants. Des salariés de Charal sont venus en soutien. Le cortège rejoint la mairie de Derval où l’attendent les élus de la Com’Com’, ceints de leur écharpe tricolore. « Nous avons rencontré la direction, sans doute plus irresponsable que responsable » a dit le maire, Jean Louë r, annonçant « Je me battrai jusqu’au bout avec mes collègues maires » dit-il en ajoutant que, à l’initiative du député, il a un rendez-vous avec Michel Barnier ministre de l’agriculture. Pour Yves Daniel, conseiller général, « vous avez raison de vous battre pour qu’on ne détruise pas l’outil à Derval. Il faut que Bongrain accepte de négocier ».
La manifestation a ramené tout le monde vers la laiterie. Au milieu du cortège : les élus. Pour certains c’était sans doute la première fois qu’ils défilaient derrière des drapeaux CFDT.
Alternatifs
(Communiqué des Alternatifs) : Le 11 mars dernier le groupe Bongrain présentait ses comptes 2008 : 3 555 millions d’euros de chiffre d’affaires pour un excédent net de 38 millions d’euros. Une semaine plus tard, il annonçait la fermeture avant octobre prochain de l’usine de Derval de la Compagnie Laitière Européenne qui emploie 83 salarié-e-s et le transfert de la production des 80 millions de litres de lait UHT au groupe Coralis situé à Cesson-sévigné et de la production de crème au site CLE de Condé/Vire.
L’engagement de Coralis à maintenir une antenne à Derval avec 29 salarié-e-s et de créer 33 postes à Cesson-sévigné (60 kilomètres de Derval) est sensé calmer la colère ouvrière et celle des 3000 habitants de Derval en ramenant à un peu plus de 30 le nombre de licenciements secs
Pour les Alternatifs 44, il est inacceptable qu’un groupe qui a réalisé de copieux bénéfices en 2006 (112 millions d’euros) et en 2007 (161,7 millions d’euros) et qui reste largement bénéficiaire en 2008 (38 millions d’euros soit le salaire annuel de plus de 1200 salariés) se comporte ainsi en prédateur du pays de Derval.
Le 30 mars 2009 Communiqué :
La Confédération paysanne apporte son soutien aux salariés
Suite à l’annonce de la fermeture d’ici au mois d’octobre de la laiterie de Derval (Compagnie Laitière Européenne, filiale de la SA Bongrain), la Confédération paysanne de Loire-Atlantique apporte son soutien aux 83 salariés de cette laiterie.
La concentration des entreprises agroalimentaires est malheureusement la suite logique de la concentration des exploitations agricoles, et aboutit à la disparition d’emplois.
Dans un contexte de crise économique et de disparitions d’emplois, l’agriculture pourrait contribuer, par son besoin de main-d’œuvre, à la diminution du chômage, à condition d’adopter une autre politique agricole et alimentaire.
Cette fermeture de site pose également le problème de l’aménagement du territoire, et affaiblit une zone rurale en quête de développement économique.
30 mars 2009
Le président du Conseil Général interpelle le préfet
Le président du Conseil général, Patrick Mareschal, a saisi aujourd’hui le préfet de Région des Pays de la Loire sur le dossier de la laiterie de Derval, dont la fermeture a été annoncée ces derniers jours.
Dans le courrier ci-joint, Patrick Mareschal demande à l’Etat d’organiser une table-ronde, et indique la disponibilité du Conseil général « Ã participer à toute solution qui puisse sauvegarder les emplois localement et assurer une transformation du lait collecté dans le département ».
Note du 2 avril 2009 - désespoir des élus ?
Ecrit le 8 avril 2009
Du côté des paysans
La Confédération Paysanne a apporté son soutien aux salariés de la laiterie, de même que le président du Conseil Général se déclarant, avec son collègue Yves Daniel, prêt à « participer à toute solution qui puisse sauvegarder les emplois et assurer une transformation du lait collecté dans le département ». Le maire de Derval à qui le député Michel Hunault avait promis une entreveue avec le Ministre de l’agriculture, n’a été reçu finalement que par un sous-fifre. « La décision des responsables du groupe Bongrain est prise, l’accord avec Coralis concernant la collecte du lait est déjà signé » dit Jean Louë r qui commente : « Je me bats contre les murs. Notre proposition de retarder l’échéance a été fermement rejetée ».
Le directeur de Coralis (groupe de Cesson-sévigné ayant racheté l’activité laitière à Bongrain) se veut rassurant. Mais les 324 producteurs de lait de la région de Derval sont inquiets et demandent des garanties. Rappelons que la fermeture de la laiterie de Derval n’a rien à voir avec la crise économique mondiale !
Note du 29 avril
Viroflay
51 salariés se sont rendus au « Panthéon » de Bongrain à Viroflay
Syndex
COMMUNIQUE DE PRESSE SUR LA LAITERIE DE DERVAL
Lors de la dernière réunion du Comité d’Entreprise qui s’est tenue le 16/04/09 à la CLD (Cie Laitière de Derval), les élus CFDT remettent en cause le motif économique du projet de fermeture du site de Derval, filiale du groupe BONGRAIN.
Le cabinet d’expertise SYNDEX mandaté lors de cette procédure a rendu son rapport d’audit, le 28 avril 2009, il en ressort que le site de la CLD est viable et devrait le rester.
c’est donc bien une décision stratégique qui est à l’origine de ce projet de fermeture. Le groupe se dégagerait ainsi de son activité Lait UHT, qui n’est pas, aux dires de Mr CAPPIO (DG d’ELVIR et de la CLD), son cœur de métier, même si la CLD produit du lait et de la crème UHT depuis 1973 et fut l’un des pionniers dans ce domaine ! (1re Usine UHT en France)
Il semble également que cette fermeture serve à remonter les comptes d’ELVIR (autre site basé à CONDE/VIRE dans la Manche), déficitaire de 5 M€ EN 2008 .
L’ensemble des salariés au travers des membres du CE considère qu’il est inadmissible de fermer un site qui gagne de l’argent tout en laissant 83 Familles sur le bord de la route, sans compter les conséquences dramatiques sur l’Economie locale (Ecole, logement, fournisseur)
Que sont devenues les valeurs du groupe BONGRAIN, la tolérance, le courage, l’honnêteté et la loyauté ?
Contact : Tel du Comité d’entreprise : 02-40-07-78-27
Michel MOREAU : 06-77-18-07-18
Ecrit le 3 juin 2009
Mardi 26 mai à la nuit tombée : dans le vaste hangar de la laiterie de Derval une salle de réunion a été improvisée entre des murailles de briques de lait. Tout un symbole : des producteurs de lait sont venus apporter un soutien officiel aux salariés en lutte pour conserver la laiterie à Derval. La réunion est à l’initiative de la Confédération Paysanne mais une dizaine de participants de la FNSEA précisent : « Nous n’appartenons pas tous à votre syndicat, mais nous sommes tous solidaires des salariés ».
« Ce qui se passe à la laiterie se passe de même dans le monde agricole. On nous pousse à être de plus en plus gros, en faisant miroiter des profits qui, de toutes façons, ne seront pas pour nous » dit Dominique Lebreton.
Michel Moreau, délégué au Comité d’entreprise de la laiterie, explique :
" nous avons une usine rentable, mais le rapport d’expertise comptable montre que le groupe Bongrain nous impute des charges du groupe.
Nous avons une usine performante : c’est nous qui sommes médailles d’or de la production de crème. Nous avons un savoir-faire que les autres usines du groupe n’ont pas.
Nous avons une usine viable : nous avons des bâtiments de bonne qualité, mieux qu’Ã Cesson-sévigné. Nous avons une chaudière neuve et une station d’épuration. Nous sommes aux normes. Nous recyclons 95 % de nos déchets.
Et de plus, malgré l’annonce de la fermeture, nous tournons à pleins tubes ! "
Cinq ans et Bain ?
Les salariés ont une certitude : le groupe Bongrain veut fermer cette usine à tout prix, la vider avant de chercher un repreneur. En sachant qu’il existe une clause de non-concurrence : impossible de recréer une laiterie dans ces équipements, pendant une période de 5 ans ! Les bâtiments serviront peut-être de plateforme de stockage .
En même temps on entend dire que le groupe Bongrain (ou un de ses satellites) aurait retenu 40 hectares du côté de Bain de Bretagne. Si c’est vrai, cela éclaire la stratégie que l’on voit partout : licencier ici pour embaucher là , en triant les salariés pour éliminer ceux qui sont capables de revendiquer, et en supprimant tous les avantages acquis. c’est là une stratégie mondiale, la revanche du grand capitalisme contre ces besogneux de salariés qui ont besoin de leur salaire pour subsister !
On ne discute plus
Entre les grands patrons qui ont une stratégie économique (= faire le plus de profits possible) et les salariés qui défendent leur subsistance, les discussions se font toujours plus difficiles. « Le patron ne veut plus venir à Derval, il nous convoque à Paris. Nous avons réussi à ce qu’il vienne plus près : une rencontre a eu lieu sur le port de Nantes le 27 mai. Les salariés y sont descendus nombreux. La discussion tourne actuellement sur les indemnités financières à accorder aux licenciés » explique Michel Moreau.
Territoire
Mais les meilleures indemnités du monde ne résoudront pas les problèmes locaux. « On nous propose de partir travailler ailleurs, loin. Cela signifie la perte de l’emploi du conjoint, la nécessité de reconstruire un logement ».
Cela signifie aussi une perte de compétitivité du territoire. « La Com’Com’ de Derval va perdre 53 % de sa taxe professionnelle, il y aura donc moins de services à la population. Le territoire sera moins attractif, les grosses entreprises refuseront de s’y installer, il y aura perte d’emplois pour tout le monde ».
Les producteurs de lait, présents, disent qu’ils se sont renseignés sur la possibilité d’acheter la laiterie de Derval. Mais la clause de non concurrence est rédhibitoire. « Et puis, produire du lait UHT et de la crème, ce serait faisable, mais le problème est de commercialiser ensuite et les grands groupes laitiers ne nous laisseront pas faire. Nous sommes en face d’un rouleur compresseur » dit Loïc Bothamy.