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Ecrit le 29 juin 2016
Le général Delawarde, lors d’une conférence donnée le 10 juin 2016 pour La Croix-Rouge et pour MISAS sénégal, à Châteaubriant, a évoqué les formes modernes de la guerre, celles qui évitent de faire appel aux moyens militaires et permettent de l’emporter contre son adversaire sans risquer la vie des soldats.
1 - La guerre de l’information.
Il s’agit de chauffer les opinions publiques et de les préparer à accepter des opérations de guerre ou des actions de représailles (sanctions économiques par exemple) contre un pays du camp opposé. Toutes les formes de mensonges possibles, appuyées par tous les moyens modernes de communication et d’information, sont utilisées : agences de presse, journaux télévisés, facebook, twitter, Google, Wikipédia avec utilisation d’images d’archives ne correspondant pas aux faits d’actualité, chiffres fortement surévalués, organisations non gouvernementales bidon servant de couverture à des activités moins louables. Attaques mensongères, permanentes et répétées du dirigeant adverse visant à le salir, à le déconsidérer pour mieux pouvoir, ensuite, attaquer son pays. Les mensonges récents les plus connus sont celui de Timisoara et celui du général Colin Powell à l’ONU. Ces mensonges ont obtenu les résultats escomptés. Mais il y en a eu beaucoup d’autres que j’ai personnellement vécus. La guerre de l’information est un domaine où les Occidentaux, disposant de moyens faramineux, ont encore un léger avantage. Mais les Russes et les Chinois, commencent, ensemble, à savoir neutraliser ces attaques, voire à rendre coup pour coup à l’adversaire. Cette guerre de l’information et du mensonge, me direz-vous, n’est pas très meurtrière. Ça n’est pas vrai lorsqu’elle finit par provoquer une guerre (Irak en 2003) ou une guerre civile qui, elle, est toujours très meurtrière (Syrie, Libye, Printemps arabe, Ukraine, par exemple). Toutes ces guerres ont été rendues possibles par un travail préalable de guerre de l’information et du mensonge manipulant les opinions publiques occidentales..
2 La guerre économique.
Il s’agit de mettre en place des sanctions économiques, d’isoler, d’affaiblir l’économie d’un pays, voire de le ruiner et d’y provoquer éventuellement des révoltes pour obliger ses dirigeants à composer, voire à capituler. Cette forme de guerre, très propre en apparence, l’est beaucoup moins qu’on l’imagine parce qu’elle est souvent appliquée du fort au faible. Exemple de l’Irak où l’embargo sur les médicaments a causé la mort de plusieurs millions de femmes, d’enfants et de vieillards, donc de personnes vulnérables, qui ne pouvaient pas être soignées et ce, dans le silence assourdissant des médias occidentaux et l’indifférence internationale la plus totale. Cela relève de la sanction collective. On n’est pas d’accord avec un dirigeant, on punit le peuple qu’il dirige pour l’inciter à se révolter, sans le moindre souci des centaines de milliers de vies humaines qui seront le prix à payer par ce peuple. Ces sanctions économiques, pour être efficaces, doivent être appliquées par tous les pays de la communauté internationale simultanément. Ces sanctions économiques appliquées aujourd’hui à de grands pays (Russie par exemple) par un nombre limité de pays, fussent-ils occidentaux, peuvent être contre-productives. Si les Russes ont été surpris et initialement affectés par les sanctions économiques, ils ont pris des contre-mesures très pénalisantes pour l’Union Européenne, ont précipité la création d’une Banque des BRICS, qui va concurrencer la banque mondiale, participé avec les Chinois à la création de l’AIIB (Banque Asiatique d’Investissement), multiplié les liens commerciaux et les contrats du siècle avec les très nombreux pays ne participant pas aux sanctions et représentant une forte majorité des habitants de la planète. In fine, la grande perdante des sanctions anti-russes aura été l’Union Européenne qui aura beaucoup de mal à retrouver les marchés qu’elle a perdus à l’Est lorsque les sanctions seront levées et qui se verra dans l’obligation de signer un traité commercial transatlantique calamiteux la rendant, pour longtemps, vassale soumise des États Unis.
3.Diiviser pour régner
La 3e forme de guerre est l’application du vieux principe : diviser pour régner. On relève une faiblesse, des manifestations, des antagonismes existants dans la population d’un pays du camp opposé. On chauffe les opposants, on les finance par le biais d’individus glissés dans des ONG travaillant dans le pays. Bref de manifestations en manifestations on réussit parfois ce qu’on appelle joliment une « révolution colorée ». Cette révolution qui tourne parfois à la guerre civile, crée un chaos dont on peut profiter pour affaiblir l’adversaire, pousser ses propres pions, et prendre le contrôle d’un pays à moindre frais. Ça ne réussit pas toujours, mais ça coûte moins cher qu’une guerre, tant en argent qu’en vies humaines pour son camp. (Syrie, Libye, Ukraine, Brésil sont des illustrations parfaites de ces « révolutions colorées » organisées et financées de l’étranger).
4.- réactiver des oppositions religieuses multiséculaires
On peut aussi réactiver, et attiser certaines oppositions religieuses multiséculaires qui s’étaient apaisées et aboutir à faire s’entre-déchirer deux adversaires potentiels (diviser pour régner). Par exem-ple réveiller et attiser, chez les musulmans, l’antagonisme chiite-sunnite, ou l’opposition religieux-laïque, ou encore l’opposition « modérés-intégristes ». La guerre civile syrienne en est une illustration parfaite. En affaiblissant les deux camps (Arabie Saoudite, Qatar, Turquie, Islamistes d’un côté, Iran, Irak, Syrie, appuyés par la Russie et par la Chine de l’autre), il est possible d’espérer déguster les marrons tirés du feu. Dans ce genre de guerre, on peut aller jusqu’Ã s’allier avec le diable et jusqu’Ã lui donner des armes. (exemple : la phrase bien connue de M. Fabius : Al Nostra fait du bon boulot/ Al Nostra = Al Quaïda a été soutenu et armé par nous, les Français, pour chasser Bachar el Assad du pouvoir en Syrie).
5.- DAESH et Terrorisme
Il y a aussi la nouvelle forme de guerre de type DAESH et Terrorisme. C’est une forme de guerre qui va généralement du faible au fort. C’est le World Trade Center, le Bataclan, l’aéroport de Bruxelles, les attaques de Londres, la gare d’Attocha à Madrid. On peut se demander pourquoi et comment cette nouvelle forme de guerre a pu naître et se développer aussi vite. Des experts auto-proclamés nous parlent doctement de développement du salafisme et de radicalisation à longueur d’émissions télévisées mais ils oublient souvent de nous rappeler des faits. En 2003, sur la base d’un mensonge avéré, celui des armes de destruction massives, les États-Unis et leurs alliés occidentaux sont allés porter la mort en Irak, puis ils ont poursuivi leur action en Afghanistan, puis en Libye. Les dommages directs ou collatéraux de ces actions se montent à plusieurs millions de vies humaines, dont beaucoup de femmes, d’enfants ou de vieillards, tous ou presque musulmans. Les Occidentaux ont pratiqué dans cette affaire le mensonge et le terrorisme d’État, ils ont suscité, organisé et attisé les oppositions et la haine, et ils l’ont fait dans des conditions pas toujours très propres... ll faut être clair, les États Unis et/ou certains de leurs alliés violent les conventions de Genève et le droit de la Guerre qu’ils entendent faire respecter par les autres. Ils ont violé ces conventions et ce droit à Abou Graib, la sinistre prison irakienne dans laquelle l’humiliation, la torture, voire l’exécution extrajudiciaire des prisonniers étaient la règle. Ils les ont violé et les violent encore à Guantanamo, ils les ont violé à Gaza sur Glane par l’utilisation d’armes interdites et le massacre de nombreux civils qui n’avaient rien de combattants mais qui tentaient de vivre dans cette zone concentrationnaire dans laquelle ils sont enfermés depuis plus d’un demi-siècle.
Les images de ces faits et ces tristes nouvelles ont fait le tour du monde. Elles ont certainement contribué au recrutement de très nombreux djihadistes. Posez-vous la question : Vous êtes né Irakien, on accuse votre pays d’avoir des armes de destruction massive alors que c’est faux, on vient vous écraser sous les bombes, on tue aveuglément votre mère, votre père, vos grands parents, plusieurs de vos frères et soeurs, on vous enferme à Abou Graib, où une gardienne US vous promène nu, en laisse, comme un chien, on vous torture, que faites-vous lorsque vous êtes libéré ? Les images et les témoignages faisant le tour du monde, que pensez-vous dans les banlieues lorsque vous voyez vos frères en religion se faire massacrer et humilier sur la base de mensonges.......?? N’avez-vous pas la haine ? Un désir de revanche pour ne pas dire de vengeance contre cette loi du plus fort ? Vous n’avez pas de chars, pas d’avions, peu d’armes, vous n’avez rien à perdre puisque vous avez déjà presque tout perdu. n’êtes-vous pas tenté de faire un maximum de mal à l’adversaire. On débouche évidemment sur cette technique de guerre du faible au fort, c’est à dire sur le terrorisme. Observez que DAESH est né en Irak, là où les excès occidentaux ont été les pires et les moins justifiés.
6.- La guerre électronique
La 6e forme de guerre qu’on peut évoquer est la guerre électronique. Ses facettes sont multiples et certaines ont été développées par Edgard Snowden. On peut écouter ou suivre les échanges électroniques ou téléphoniques des grands leaders de la planète, saisir leurs petits secrets pas toujours avouables et obtenir leur soumission ou leur coopération par chantage. On peut s’attaquer à de très nombreux sites industriels en pénétrant les systèmes de contrôle, en perturbant leur fonctionnement, voire en s’emparant des commandes. Cette forme de guerre peut s’avérer extrêmement efficace et provoquer des dommages très importants chez l’adversaire.
(extraits des propos du Général Delawarde)
Droit humanitaire international
Le CICR ’Comité International de la Croix-Rouge) met en avant le DHI (Droit Humanitaire International) : un ensemble de règles qui, pour des raisons humanitaires, cherchent à limiter les effets des conflits armés. Le DHI protège les personnes qui ne participent pas ou plus aux combats et restreint les moyens et méthodes de guerre. Du fait de la nature des conflits armés contemporains, l’application et le respect du DHI continuent de poser des défis dans plusieurs domaines comme les nouvelles technologies ou la qualification des conflits. Il est nécessaire de comprendre ces défis et de les surmonter pour faire en sorte que le DHI continue de jouer son rôle protecteur. Du fait de la nature des conflits armés contemporains, l’application et le respect du DIH continuent de poser des défis dans plusieurs domaines comme les nouvelles technologies ou la qualification des conflits. Il est nécessaire de comprendre ces défis et de les surmonter pour que le DHI continue de jouer son rôle protecteur.