Accueil > Pays (international) > Les peuples en colère et sans espoir
Ecrit le 14 août 2013
C’est avec plaisir et inquiétude qu’on assiste au soulèvement spontané des peuples. Plaisir, car cela montre que, malgré les fortes interdictions, les peuples sont capables de bouger. Inquiétude car ce sont souvent des mouvements sans lendemain car les « politiques » professionnels s’entendent à récupérer les choses.
Maroc, pédophilie
Les affaires de pédophilie se développent au Maroc où Marrakech est de plus en plus présentée comme la capitale du sexe. Un comble dans un pays islamiste où la pudeur est, théoriquement, de règle (du moins celle imposée aux femmes !). Colère noire au sein des associations marocaines pour la protection des enfants et notamment à l’association « Touche pas à mon enfant », dont la présidente Mme Najat Anwar, dénonce « le Maroc, terrain de chasse des pédotouristes ».
Dans ce pays, permissif sur les abus sexuels contre les mineurs, le roi Mohammed VI a gracié un pédophile espagnol, condamné à 30 ans de prison pour avoir violé au moins 11 enfants marocains. Mais c’en était trop : vendredi 2 août, plusieurs milliers de personnes ont exprimé leur colère dans les rues de Rabat, à Tanger et à tétouan, bravant la répression policière.
répression violente ! Selon Le Nouvel Obs, des dizaines de photos et de vidéos de manifestants en sang ou matraqués par la police ont été diffusées sur internet. Plusieurs représentants de la société civile et d’organisations des droits de l’Homme ont fustigé l’attitude des forces de l’ordre et le roi a dû annuler la grâce !
Lors du Printemps arabe, le Maroc est resté relativement préservé des troubles : en réaction à des manifestations de rue, le roi a rapidement initié une nouvelle Constitution censée renforcer les pouvoirs du gouvernement. L’affaire de la grâce relancera-t-elle la contestation ?
Inde, brûlée
début août 2013, une fillette indienne de 11 ans a été immolée après avoir résisté à un viol. Elle est décédée des suites de ses graves blessures. La police a arrêté un suspect de 18 ans. Lui et un complice, toujours recherché, avaient été dénoncés par la victime. Les deux hommes ont tenté de violer la fillette qui a résisté et menacé de révéler leur identité. Les individus l’ont aspergée de kérosène et l’ont brûlée.
Le 16 décembre 2012, une agression menée par six hommes dans un bus de la capitale, avait entraîné la mort de la victime, une jeune étudiante de 23 ans et provoqué une vague inédite de protestations en Inde, contre un modèle traditionnel et patriarcal imposant généralement aux fem-mes de devenir la propriété des hommes et, bien souvent, de subir le viol en silence. Des jeunes hommes ont rejoint en masse les manifestantes, brisant les barrières de genre. Ce mouvement n’était plus celui des féministes, ou des femmes, mais d’une génération en passe de changer le visage de l’Inde, dans un pays où la moitié de la population est âgée de moins de 25 ans. Mais depuis six mois les manifestations sont retombées et les changements semblent se faire attendre. Le verdict du procès des agresseurs du 16 décembre devrait être rendu le 19 août . il a déjà été reporté trois fois !
La solution passerait par l’éducation. On n’en prend pas le chemin. Est-ce pour cela que trois étudiants ingénieurs indiens ont imaginé des sous-vêtements envoyant une décharge électrique à toute main baladeuse s’aventurant sur le buste ou les fessiers d’une femme qui n’a rien demandé. Mieux, cette lingerie équipée d’un GPS enverrait également une alerte aux proches de la victime afin de lui porter secours dans les meilleurs délais.
(Note du 31 août : parodie de justice)
Algérie, ramadan
En France sous Louis XIV (1661-1715), la devise de la Monarchie absolue était : un roi, une foi, une loi. Ce qui a conduit, notamment, au rejet de la nouvelle religion (le protestantisme) et aux guerres de religion. Dans les pays islamistes on en est encore là : un président, une religion (l’Islam) qui s’impose à tous . Le 19 juilet 2013, les gendarmes sont intervenus à Tifra, dans la région côtière de Tigzirt, à la recherche de non-jeüneurs qui se trouvaient dans une cafétéria. En réaction, quelques centaines d’Algériens ont mangé et bu en public, samedi 3 août, en plein ramadan, dans la ville de Tizi Ouzou, en Kabylie, pour dénoncer affirmer leur liberté de conscience.
Contestation religieuse ? Même pas ! « La Kabylie n’a pas de problème avec l’islam. Elle a un problème avec l’islamisme et avec l’État algérien, qui instrumentalise la religion à des fins d’aliénation de la population » dit un participant. « Nous voulons être libres de jeûner ou pas » dit-il en rappelant que jusqu’aux années 1980, « dans les villes au moins, les restaurants étaient ouverts et ne jeûnaient que ceux qui le voulaient ».
Bulgarie : corruption
En Bulgarie, le peuple se révolte aussi mais la couverture médiatique est réduite. Tout a commencé le 14 juin 2013 après la nomination d’un député controversé, Delyan Peevski, à la tête des services de renseignement. Ce député, un magnat des médias, a été impliqué dans plusieurs scandales de corruption ces dernières années. Les manifestations contre cette nomination, ont conduit à la démission de Delyan Peevski, dès le 16 juin.
Mais les manifestations dans les rues de la capitale Sofia et des autres villes du pays se poursuivent, pour plus de transparence et moins de corruption dans l’administration du pays, une action contre le crime organisé, et la fin du « règne de l’oligarchie ». La période des vacances ralentit quelque peu le rythme des manifestations quotidiennes. La détermination demeure.
Bahreïn : 14 août
Au Bahreïn, un mouvement baptisé « Tamarod » (« rébellion »), inspiré du mouvement égyptien du même nom, a appelé à organiser des manifestations le 14 août prochain. Objectif : renverser le régime en place.
Mais une loi interdit les manifestations dans la capitale Manama depuis 2011, en plein printemps arabe, depuis que la population à majorité chiite s’est soulevée contre la dynastie sunnite des al-Khalifa.
Malgré une répression meurtrière des manifestants durant cette période, les chiites réclament toujours une monarchie constitutionnelle. l’appel à manifester le 14 août prochain est donc lancé par le mouvement clandestin Tamarod, mais aussi par des partis de l’opposition chiite. Cette date n’a pas été choisie par hasard : chaque année depuis 1971, les Bahreïniens fêtent le départ des Britanniques le 14 août. (1)
Brésil : crimes en ligne
La dictature au Brésil (1964-1985) a officiellement fait 426 morts et disparus, 50000 arrestations arbitraires, 20 000 personnes torturées, 2 400 dissidents jugés et 10 000 Brésiliens poussés à l’exil, dans la période . Des photos, vidéos et autres documents qui illustrent les abus commis pendant la dictature sont désormais mis en ligne dans un document appelé « Brasil : nunca mais digital »
Voir ici : http://bnmdigital.mpf.mp.br/#!/
Egypte, Syrie, Tunisie, Birmanie, Thaïlande ...
Un peu partout les peuples manifestent, contre la vie chère, contre la corruption, contre les régimes oligarchiques, contre le manque de démocratie et le réseau internet, malgré tous ses défauts, contribue à faire connaître ces mouvements, à populariser leurs motivations, à donner des exemples de ce qu’il est possible de faire et de ce qu’il vaut mieux éviter. Ces mouvements, même s’ils n’atteignent pas le but espéré, contribuent aux évolutions.