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Ecrit le 12 décembre 2012
Des conventions de citoyens
Le 4 décembre à Châteaubriant, J.Testard a eu des mots très durs pour les députés et sénateurs de tous horizons. « Dès qu’il sont élus, ils estiment avoir toute la légitimité pour décider dans tous les domaines et n’écoutent plus les citoyens ». Même récemment élus, ils perdent toute « humilité » (s’ils l’ont quelquefois eue !) Ils écoutent les experts (même quand ceux-ci sont liés à des intérêts mercantiles), les quelques intellectuels médiatiques et la poignée de chroniqueurs-vedettes...
« De véritables leurres démocratiques sont souvent agités par le pouvoir politique pour résoudre les contradictions entre les projets qu’il veut imposer et les choix de la société ». Ainsi, que ce soit pour la culture de plantes transgéniques, le tracé d’une autoroute, l’implantation d’un incinérateur, l’escamotage des déchets nucléaires, la dissémination des produits nanotechnologiques, ou l’aéroport de Notre-Dame des Landes, etc le gouvernement promet d’informer le public et de le consulter, la plupart du temps quand le dossier est ficelé, bétonné !
Jacques Testard propose : « les autorités devraient collecter et discuter les points de vue des simples citoyens. Il faut définir une méthodologie permettant de recueillir les avis de citoyens » naïfs « (non spécifiquement impliqués dans la controverse) mais bien éclairés grâce à des informations complètes et contradictoires. Les bases pour une telle procédure ont été proposées il y a 20 ans par le Danemark sous l’appellation » conférence de citoyens « (CdC) » .
Un essai d’humanité
« La conférence de citoyens combine un temps de formation préalable (où les citoyens étudient) avec une intervention active (où les citoyens interrogent) et un positionnement collectif (où les citoyens discutent en interne puis avisent). Le prix à payer pour cet exercice démocratique est de le limiter à une quinzaine de personnes plutôt que de consulter la population entière. Composée de personnes volontaires, mais après tirage au sort sur les listes électorales, la CdC apparaît aujourd’hui capable de produire des avis précieux à l’usage des décideurs mais aussi des autres citoyens ».
Les observateurs des conférences de citoyens se sont étonnés de la capacité de personnes candides à délibérer sur des sujets complexes, en se dégageant des enjeux seulement locaux et immédiats pour proposer des solutions souvent ignorées par les spécialistes, et rarement entendues des instances politiques. « Ainsi peut-on, le temps d’un essai d’humanité, transformer en citoyen responsable le gogo que nous sommes tous au jour le jour » .
Pourvu qu’elles soient médiatisées, ces procédures améliorent la compétence de toute la population et peuvent rétablir la confiance vis à vis des scientifiques et de leurs propositions...
Comment faire entrer ces procédures dans l’ordre juridique et politique,
pour que les dirigeants, mieux informés des enjeux des technologies
et des attentes de la population,
puissent tenir compte
de ces recommandations ?
A l’initiative de la Fondation sciences citoyennes (FSC ) une méthodologie précise a été élaborée pour que des gens « ordinaires » puissent fournir des avis éclairés. Un projet de loi va même être soumis à ce sujet.
« Afin de sortir des leurres démocratiques pour aller vers une véritable participation, les recommandations de la CdC doivent faire l’objet d’un débat parlementaire avec vote d’une résolution où toute divergence des élus avec les recommandations des citoyens devra être motivée ». S’il y a, sur le territoire, plusieurs conventions donnant des avis différents sur le même sujet, le débat n’en sera que plus approfondi. « Car la démocratie participative ne peut devenir crédible aux yeux des citoyens que si les élus prennent en compte les avis émis ».
Cette proposition de « convention » ne rencontre guère de soutien (mis à part chez les Verts). Le monde associatif se sent éliminé du panel des citoyens « naïfs ». Le monde médiatique ne s’intéresse pas à l’avis de citoyens anonymes. Les partis politiques imaginent qu’on leur retire le pain de la bouche. Et les parlementaires, qui deviennent vite des spécialistes de n’importe quoi, n’ont guère envie de « perdre du temps » à consulter, réellement, des citoyens.
députés tirés au sort !
Pourquoi ne serait-ce pas une « convention » de citoyens qui désignerait les candidats aux élections ? Jacques Testard va même plus loin, il imagine un sénat, qui pourrait être tiré au sort ! Les sénateurs ainsi nommés le seraient pour un an ou deux non renouvelables ce qui limiterait les possibilités d’influence de la part des lobbys !
Utopique ? Sûrement ! Mais faut-il rappeler que, jusqu’au Moyen-Age, les catholiques élisaient leurs évêques ? Cela n’a pas donné des catastrophes !
« Aujourd’hui, le métier de citoyen ne peut se réduire à celui d’électeur ni même à celui d’adhérent à une association ; il doit pouvoir s’exercer en dehors des moments électoraux et en dehors des formes associatives à condition toutefois que cet exercice soit reconnu, institutionnalisé et organisé car il serait vain : et dangereux : de prétendre que l’on naît citoyen ».
« De plus, la méthode de gouvernement qui veut faire passer d’innombrables consultations pour d’authentiques concertations devient insupportable en faisant primer l’intérêt de lobbies organisés sur l’intérêt public » dit Jacques Testard.
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