Écrit le 3 décembre 2003
En France, 2,5 millions de gens mal nourris
Le troisième millénaire, les progrès de l’humanité, les fantastiques avancées des sciences, les communications en « haut débit »… et une situation en cours de dégradation pour les 2,5 millions de personnes qui ont recours à l’aide alimentaire en France.
Comme chaque année depuis près de vingt ans, les Français ont été invités à donner, les 28 et 29 novembre, des denrées non périssables aux quelque 80 000 bénévoles répartis sur 10 000 points de collecte à travers le pays.
« On ne meurt pas de faim en France, mais on y souffre de malnutrition ou de sous-nutrition », a rappelé la FFBA (Fédération française des Banques Alimentaires), qui assure le tiers de cette aide dans le pays. En 2002, les 60 500 tonnes distribuées ont permis de servir 121 millions de repas à 800 000 personnes.
L’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), dans son rapport 2003, a signalé que la faim regagne du terrain dans le monde : 842 millions de personnes sont sous-alimentées, dont 10 millions dans les pays industrialisés.
« J’ai eu faim, et… »
En France, cette « pauvreté alimentaire perdure et la situation se dégrade : on constate une augmentation de la demande », a déclaré Pierre de Poret, président de la FFBA, qui regroupe 79 banques alimentaires. Pour lui, il s’agit d’une « répercussion, chez les populations les plus touchées, de la précarisation croissante de la vie en société ».
De plus, « les conséquences à venir de la multiplication des plans sociaux » sont autant de motifs d’inquiétude pour les banques alimentaires. Fin septembre, le ministère des Affaires sociales évaluait à 155 000 le nombre de licenciements économiques depuis le début de l’année. Le chômage entraîne « une chaîne de traumatismes » dont on n’a pas idée tant qu’on ne l’a pas vécue. Et au bout de cette chaîne, « on retrouve des personnes qui viennent chercher une aide alimentaire », a déploré M. de Poret.
Membre du collectif Alerte, qui regroupe une quarantaine d’associations de lutte contre la précarité et l’exclusion, la FFBA « s’inquiète des conséquences possibles de certaines mesures gouvernementales en cours d’adoption », comme le RMI-RMA (revenu minimum d’activité) et la réduction de l’ASS (allocation spécifique de solidarité pour les chômeurs en fin de droits).
L’Évangile, dont se réclame volontiers « la France d’en haut », rappelle qu’un des critères de la damnation éternelle sera cette accusation terrible :
« J’ai eu faim, et tu ne m’as pas donné à manger… »

