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Ecrit le 10 mars 2004
Focast : c’est Pebeco, mais pas l’euphorie
Vendredi 5 mars 2004 : la décision du Tribunal de commerce est prise mais le secrétariat ne doit pas la divulguer tant que le président du Tribunal est absent. Un, deux, trois appels, c’est l’angoisse. A l’usine les salariés l’ont dit : « si le tribunal choisit le plan »Lebret« nous serons en grève lundi 8 mars ». Retour sur une semaine chargée en émotions.
Ecrit le 10 mars 2004
Mercredi 3 mars a eu lieu la présentation au Tribunal de Commerce des deux projets en lice. Les syndicalistes CFDT et CGT, main dans la main, les ont étudiés à fond, posant et se posant de nombreuses questions avant de fixer leur choix. Ils ont retenu PEBECO. Quand enfin le Tribunal annonce le 5 mars, à 15h45, que c’est également son choix, il y a un moment de satisfaction. « Exit Lebret » disent-ils tandis que, par téléphone portable et messages SMS, ils informent les camarades de l’usine.
Satisfaction, oui, mais pas euphorie, car le plan prévoit 103 licenciements plus un apprenti. Sur les cinq syndicalistes de la photo ci-contre, quatre savent déjà qu’ils font partie de la charrette.
Pebeco : Un professionnel
PEBECO est une entreprise de Laval, qui fait de la fonte d’art, des inserts de cheminée, des chaudières, voire un peu de mobilier urbain. Une entreprise créée en 1620, qui s’est développée avec Chappée et l’apport de marques comme Jacob delafon. Le PDG est Daniel Alleaume, fondeur lui-même, qui a repris l’entreprise depuis quelques années. Elle compte 140 salariés. Le plan de reprise prévoit 104 licenciements à Châteaubriant mais promet une priorité de réembauche pour 40 salariés, d’ici trois ans, au fur et à mesure des départs en retraite à Laval.
L’autre plan de reprise émanait de « Green-Recovery ». Les syndicats ont interrogé « Cofacerating.fr » qui « note » les entreprises en fonction de leur solidité. Dans ce classement Grenn-Recovery (auquel se sont adjoints MM. Lebret et Debray, directeur et directeur commercial actuel de Focast) est en 4e position (sur 5) avec 20 000 € : « encours de risque que vous pouvez raisonnablement prendre sur cette société ». Autant dire rien !
Flou et Cie
Au Tribunal de Commerce les salariés ont expliqué que M. Lebret a été propriétaire de Focast quand l’entreprise a été achetée à Huard, et qu’il a été directeur commercial ces quatre dernières années. « Il a participé à la chute actuelle, le chiffre d’affaires a baissé de 7 % par an depuis 4 ans » (ce qu’a contesté M. Lebret !). Le délégué des salariés a détaillé « les aides financières énormes » accordées par l’Etat à l’entreprise. « Nous étions adossés à un groupe financier solide, l’Union des Banques Suisses, qui nous a abandonnés, alors, du côté des sociétés financières ça suffit, nous avons assez donné ! ».
Le Tribunal de Commerce a interrogé les deux repreneurs. M. Alleaume, PDG de Pebeco, a parlé sans notes, en homme qui connaît bien son métier. Il a répondu aux questions sans ambiguïté. A côté de lui, le représentant de Green-Recovery a fait pâle figure, avec des phrases passe-partout du style « Nous allons affirmer notre position de leader ». Il a même osé promettre une progression de 13 % par an (alors que la chute est déjà de 7 % depuis 4 ans) en ne conservant au Bureau d’Etudes (qui est le « moteur » de l’entreprise) qu’une seule personne (sur 3), là où Pebeco a promis d’en garder deux.
Il n’a pas pu donner de précisions sur les apports financiers qu’il compte faire, se contentant de dire que Green-Recovery est l’alliance de 25 entreprises. Quand le président du Tribunal lui a demandé de citer quelques noms, il a été incapable de répondre. Enfin, il est resté évasif sur le nombre de personnes reprises, promettant d’en garder 76 « si les conditions économiques restent conformes à ce qui est prévu » et réduisant les rares avantages des salariés (par exemple, ceux qui ont plus de 18 ans d’ancienneté auraient dû se contenter d’une prime de 15 % au lieu de 18 %). Enfin, le projet « Lebret » n’a aucunement la confiance des salariés qui vont jusqu’Ã condamner la direction actuelle pour les relations très tendues qui existent dans l’entreprise.
De nombreux « détails » ont agacé les délégués syndicaux. Par exemple, lorsque M. Alleaume est venu rencontrer les cadres, il a dû le faire en présence de M. Lebret qui était donc là avec une double « casquette » : celle de repreneur potentiel, et celle de directeur du site actuel. Autre « détail » : le projet Pebeco a été déposé au Tribunal de commerce deux jours avant la date limite, par courrier et par internet, ce qui a permis aux délégués syndicaux de l’étudier plus vite, tandis que le dossier Green-recovery a été déposé par fax à 11h58, deux minutes avant l’heure limite.
Enfin, dès le 5 mars au matin, avant même que soit connue la décision du Tribunal de Commerce, les salariés ont pu constater que M. Lebret a effectué des changements de classification de nombreux salariés et fait connaître aux délégués syndicaux qu’il les a inscrits sur la liste des licenciés. Atmosphère, atmosphère.
Pebeco ? Pas Besef !
Du côté de Pebeco, il y a un espoir de poursuite de l’entreprise, malgré une certaine fragilité financière. « Il y a des synergies possibles entre Pebeco et Focast » expliquent les délégués. « Par exemple Pebeco est intéressé par le secteur noyautage et notre capacité à faire des chassis de grande dimension ». « Nous avons l’espoir qu’il embauche un nouveau directeur commercial, qui permettrait de balayer l’image Valfond qui nous colle à la peau ». « Pour nous Pebeco, ce n’est pas le meilleur projet de reprise, c’est le moins mauvais, nous allons tout faire pour lui donner les moyens de réussir en mettant les salariés de son côté. Nous pensons que les Pouvoirs Publics vont être plus facilement disposés à aider un industriel régional et nous espérons que notre confiance ne sera pas trahie ». Les délégués s’inquiètent cependant de voir qu’un investissement dans la fusion (installation de trois fours électriques) a été effectué pour un chiffre d’affaires de 15 millions d’euros avec 185 personnes et se demandent comment le repreneur va faire face à un tel sur-investissement
Des réunions ont lieu dans l’entreprise depuis le lundi 8 mars pour étudier le licenciement de 104 personnes. Du chômage partiel est appliqué, par roulement, à une centaine de personnes. Le secteur Petites Pièces est fermé définitivement depuis le 5 mars 2004.
58 personnes de chez Focast ont 53 ans et plus. Si des « mesures d’âge » leur sont appliquées, cela permettra de trouver une solution pour eux.
Pour les 46 autres salariés les syndicats CGT-CFDT ont demandé au Ministère des affaires sociales, le 2 mars 2004, avec l’appui du député :
– financement de la cellule de reclassement à hauteur de 2000 € par salarié
– cellule de reclassement mise en place pour 1 an renouvelable une fois
– objectif de reclassement fixé à 80 % minimum
– participation de l’Etat à la même hauteur que la Région dans l’aide à la formation
– Nomination d’un chargé de mission « référent social » pour faciliter l’expression des salariés.