Ecrit le 25 avril 2018
Asile et Immigration, Solimée témoigne
Ca chauffe à l’Assemblée Nationale, et les chaleurs d’avril n’y sont pour rien. En débat : le projet de loi « asile et immigration », largement approuvé par la Droite et l’EXtrême-Droite, qui demandent cependant davantage, et qui divise la majorité LREM (La République en Marche). L’un des meneurs de cette opposition LREM est Jean-Michel Clément, élu de la Vienne, qui va sans doute voter contre et risque alors d’être exclu du groupe parlementaire LREM. « Mourir pour ses idées, il y a pire comme sanction », dit-il. D’autres députés de la majorité risquent de suivre la même voie. Nous aurions aimé que ce soit le cas d’Yves Daniel ....
Quels changements ?
A Châteaubriant, l’association Solimée a souhaité tirer la sonnette d’alarme, car, avec la loi en cours de discussion :
1 - l’asile sera plus difficile à demander et à obtenir,
2 - l’asile simplifié c’est moins de droits pour les demandeurs d’asile,
3 - L’expulsion sera plus rapide pour les déboutés de l’asile,
4 - il y aura davantage de contrôles des étrangers,
5 - Ce sera plus difficile de revenir en France après une expulsion,
6 - Il y aura davantage d’enfermement pour les sans-papiers, la rétention est allongée de 45 jours à 90 jours. (1)
Pour en savoir plus, lire ici :
voir le site documents/asile
L’association Solimée, qui a fusionné avec l’association Tous-Solidaires, est une association loi 1901 à but non lucratif, qui vient en aide à des familles en situation précaire, en favorisant notamment l’accès au logement. Elle a été créée en 2005, suite à l’arrivée d’une famille déboutée du droit d’asile sur le terrain de camping de Châteaubriant.
Aides financières, logement, déplacements, frais de transport, factures EDF, GDF... Accompagnement démarches administratives, Accompagnement dans le suivi médical (prise de rdv, aide aux déplacements), Lien social : c’est le travail considérable fourni par les miltants (essentiellement des femmes d’ailleurs). Dix familles ont été régularisées depuis l’existence de Solimée.
L’association a été confrontée l’an passé à l’arrivée de familles, logées dans un hôtel de Châteaubriant, via le 115, d’où l’accompagnement de 6 familles dans leurs démarches :
– Inscription des enfants à l’école (maternelle, primaire et collège)
– Accompagnement médical, social et administratif. Accompagnement au CCAS pour demande gratuité de la cantine pour 2 enfants (refus)
– Face au refus de la mairie, contact avec l’UNICEF à propos du label « Ville amie des enfants » et avec le défenseur des droits.
– Appel aux dons pour inscrire un des enfants au club de boxe.
« Nous ne faisons pas de discrimination entre les réfugiés, ceux qui ont des diplômes et ceux qui n’en ont pas. Pour nous, ce qui compte, c’est leur isolement, leur précarité ».
Cette précarité se manifeste dans de nombreux « détails ». Ce peut être une famille de 6 personnes logée dans une unique pièce. Ce peut être la difficulté de trouver à manger. « J’ai accompagné un jour une maman pour acheter du pain à Carrefour, c’était la seule nourriture pour le week-end. Elle en pleurait ».
Des denrées, on en trouve, par les associations caritatives de Châteaubriant qui sont généreuses à cet égard, mais une difficulté se présente : comment manger une boite de cassoulet, quand on n’a aucun moyen de cuisiner ? Car le logement à l’hôtel c’est une chambre pour la famille et le petit déjeuner, mais impossibilité de cuisiner.
« Pour les jeunes scolarisés aux collèges et lycées, pas de problème de cantine le midi : les chefs d’établissement sont très bienveillants. Le problème se posait pour deux enfants, nous avons demandé à la municipalité de Châteaubriant la cantine gratuite pour ces deux petits. La ville est classée »amie des enfants« et dans la charte signée avec l’Unicef il est dit qu’elle doit placer l’innovation sociale au cœur de sa politique de petite enfance. Mais nous avons eu un refus d’aide ».
Au dernier Conseil Municipal, il a été dit que le CCAS (centre Communal d’Action Sociale) a dépensé, en 2017, 100 000 € de moins que prévu. « La cantine pour deux enfants, c’est peu de choses. Nous savons aussi qu’il y a des familles françaises dans la précarité. C’est pour tous ceux-là que la ville de Châteaubriant devrait faire un effort ». Mais on leur répond, non sans mépris : « On ne va pas déclencher le plan ORSEC pour eux »
« Nous avons interpellé le Conseil Municipal des jeunes, nous avons interpellé le député, nous pensons faire appel aux maires de la Com’Com’... »
Récemment le Conseil départemental a organisé une réunion avec les différentes associations caritatives et le CCAS sur le thème de la précarité du territoire et du public orienté par le 115 à Châteaubriant. La problématique de santé publique a été abordée avec le médecin de la PMI (déséquilibre alimentaire, carence nutritive, obésité.....).
Les associations sont bien d’accord : il est urgent d’avoir un endroit où les familles pourraient cuisiner. La question a été posée à la représentante du CCAS pour le partage de la cuisine du logement « Croix Rouge » mis à disposition par la mairie via une convention et sous-occupé. Pour l’instant, aucune ouverture dans ce sens... La responsable du département propose de réunir prochainement un groupe de travail pour un projet « cuisine accessible aux migrants logés à l’hôtel par le 115 ».
« Heureusement l’Amicale laïque va mettre sa cuisine à disposition, nous allons mettre en place tout un accompagnement des familles par des bénévoles ».
Autre souci : le courrier. Les familles ont leur adresse à Nantes, au siège de « France Terre d’asile » et c’est à Nantes qu’elles doivent aller chercher leur courrier ! C’est commode pour les courriers administratifs ! Et on y va comment à Nantes ? Avant il y avait le car Lila à 4 € le trajet aller-retour, maintenant c’est 20 € par le train, et le tarif va augmenter. « Nous cherchons à mettre en place une domiciliation à Châteaubriant ».
En 2017, l’association a compté 6112 € de recettes (dont 218 € de la mairie) et 7597 € de dépenses dont 3650 € de logement ; 2006 € de dépenses d’énergie, et 1091 € de frais d’avocat.
Solimée compte une cinquantaine d’adhérents qui apportent des aides diverses : participation financière, aide bénévole, accompagnement chez le médecin, l’avocat, les administrations etc. Appel est fait à de nouveaux bénévoles !
Chiffres
Rappel de certaines données chiffrées sur l’immigration en France et en Europe
: 65,6 millions de personnes ont fui les conflits dans le monde en 2016,
: les six pays les plus riches de la planète participent seulement à l’accueil de 9% des réfugiés à l’échelle mondiale,
: la France se situe à la 15e place pour l’accueil des migrants en Europe,
: En 2015, l’Union Européenne a reçu 1,2 million demandes d’asile (= 0,2 % des 508 millions d’habitants de l’Union Européenne).
(1) Le doublement de la rétention concerne aussi les enfants ! En métropole, le nombre d’enfants concernés a crû de 45 mineurs en 2014 à 305 l’an dernier, selon la Cimade. « Rien ne justifie l’enfermement d’un gosse », « par essence innocent », a lâché Hervé Saulignac (PS), notant qu’un centre de rétention est « un univers carcéral » et appelant à « renoncer à cette funeste pratique ».