Ecrit le 19 février 2020
Le Conseil constitutionnel vient de se prononcer de façon inédite sur le sujet.
Par sa décision n°2019-823 QPC du 31 janvier qualifiée d’« historique » par les défenseurs de l’environnement, les Sages ont en effet validé l’interdiction, à compter de 2022, de la production, du stockage et de la circulation de « produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées pour des raisons liées à la protection de la santé humaine ou animale ou de l’environnement » au sens du règlement du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009.
Autrement dit, les pesticides fabriqués en France – mais interdits par l’Union européenne – ne pourront plus être exportés quelle que soit leur destination.
Portée par la loi Agriculture et alimentation – dite « Égalim » – du 20 octobre 2018 (art. 83), cette mesure est, depuis son adoption, dans le viseur de l’Union des industries de la protection des plantes (UIPP). Il faut dire que l’enjeu financier est important : la France est le premier exportateur mondial de semences, souvent enrobées de ces pesticides.
Liberté d’entreprendre : oui, mais pas à tout prix
Les entreprises des produits phytopharmaceutiques français (uipp) ont fait appel disant que cette interdiction « serait sans lien avec l’objectif de protection de l’environnement et de la santé dans la mesure où les pays importateurs qui autorisent ces produits ne renonceront pas pour autant à les utiliser puisqu’ils pourront s’approvisionner auprès de concurrents des entreprises installées en France. » . A l’audience ils ont déclaré, sans rire, que : l’interdiction d’exporter des produits notoirement nocifs aurait des effets économiques tels qu’il n’y aurait alors plus de budget pour faire du bio !!
L’environnement, « patrimoine commun des êtres humains »
Les Sages se sont fondés sur la Charte de l’environnement de 2004, de valeur constitutionnelle depuis la loi du 1er mars 2005, suivant les arguments du conseil de l’association France Nature Environnement. Et ils ont déclaré que « les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins » et que « la protection de l’environnement constitue un objectif de valeur constitutionnelle ». En clair, l’UIPP a perdu !
Par ailleurs le Conseil d’Etat, dans une ordonnance du 14 février, a refusé de suspendre le décret et l’arrêté du 27 décembre qui fixent de nouvelles règles encadrant l’épandage des pesticides à proximité des zones habitées.