voir aussi page 154
Le RMI en folie
La commission locale d’insertion
Ecrit le 12 février 2004
Le RMA au 1er janvier 2004
(on l’appelle aussi C-I/RMA : contrat d’insertion/revenu minimum d’activité)
I - le Revenu Minimum d’Activité
La loi portant sur la décentralisation du RMI et créant le RMA est entrée en vigueur à partir du 1er janvier 2004. Ainsi ce sont les Conseils généraux qui en sont les responsables aujourd’hui. Seulement son application effective dépendra de la publication des décrets d’application. A ce jour pas de nouvelles.
L’objectif du gouvernement actuel est que 100 000 personnes en France puissent signer un RMA d’ici la fin de l’année 2004 (d’après les organisations syndicales patronales, le climat économique actuel n’est pas favorable à cette réforme ...)
* Qu’est-ce que le RMA ?
Une allocation minimum contre une activité à temps partiel d’au moins 20 h semaine. « Ce revenu » est payé le SMIC (ou plus si les employeurs sont généreux ...).
On ne peut pas parler de salaire ni de contrat de travail. En effet la personne cotise pour le chômage et la retraite sur le complément versé par l’employeur (soit un tiers du salaire). Ainsi en un an de travail, le titulaire du RMA ne cotisera que pour l’équivalent d’un trimestre pour sa retraite.
Le contrat d’insertion est signé pour une durée de 6 mois renouvelable 2 fois (soit 18 mois au total). Il y a une période d’essai d’1 mois.
Il n’est rien prévu à l’issue de ces 18 mois.
* Qui peut prétendre à un RMA ?
Les personnes bénéficiaires du RMI depuis au minimum 1 à deux ans à déterminer. Le délai sera fixé par un décret qui n’est pas encore paru.
Le C-I/RMA n’est pas obligatoire pour les bénéficiaires du RMI, ceux-ci peuvent toujours refuser à ce qu’un tel contrat figure parmi les actions d’insertion qui leur sont proposés.
* Qui peut être employeur d’un RMA ?
Les entreprises privées et publiques. Sont exclues du dispositif : l’Etat, les départements et les Régions, les Particuliers. Ce dispositif est également ouvert aux entreprises de travail temporaire.
Dans le secteur non marchand (associations notamment) le contrat est réservé au développement d’activités répondant à des besoins collectifs non satisfaits.
Cependant les employeurs ne doivent pas avoir procédé à un licenciement économique au cours des 6 mois précédant le contrat d’insertion-RMA et être à jour du paiement de leur charges sociales.
* Quels avantages pour les employeurs ?
:
– « de la main d’œuvre non qualifiée bon marché »
Au lieu de prendre un salarié à mi-temps au SMIC, l’employeur peut prendre une personne au RMA en le payant au minimum le SMIC. En contrepartie l’employeur perçoit une aide financière égale au montant du RMI, il ne prend donc en charge que la différence entre le Smic et le RMI.
Exemple : Un contrat d’insertion de 87 h est rémunéré 626 € (87 X 7,19 €)
L’aide versée par le département à l’employeur est de 368 € (montant du RMI - forfait aide au logement soit 417,88 - 50,15).
Seule la différence entre le SMIC et l’aide du département (626 - 368 = 258 €) aura le caractère d’un salaire et sera soumise aux cotisations.
C’est cette somme de 258 € qui constitue le supplément perçu par la personne au RMI en contrepartie d’un travail à mi-temps soit 2,96 € de l’heure ! Ce montant est censé motiver le salarié à reprendre le travail (sachant tout de même que ces années de travail ne sont pas comptabilisées dans le calcul pour les droits à la retraite et au chômage !)
Le volet formation de l’employé reste très flou. En effet l’employeur est tenu d’aider à mettre en route des actions d’orientation, de formation, de tutorat, de suivi personnalisé, de validation des acquis de l’expérience professionnelle. Seulement ces actions sont définies par convention avec le département...
* Petit rappel du RMI
Le nombre de bénéficiaires direct en fin 2002 est de 1 084 000 personnes soit environ 2 millions (si l’on prend en compte les conjoints et enfants de personnes au RMI)
Le RMI est fixé au 1
Devant les nouvelles mesures prises par rapport à l’ASS (Allocation Spécifique de Solidarité) qui est à présent limitée à 2 ans, le risque de voir le nombre de RMIStes augmenter d’ici deux ans est inévitable. On situe une hausse probable allant de 100000 à 300 000 personnes en 2004, en fonction de la conjoncture économique.
Comment les Conseils généraux vont-ils pouvoir financer cette hausse du nombre de bénéficiaires, sachant que l’Etat table sur la base du nombre d’allocataires 2002 pour donner une enveloppe globale correspondante au Conseils généraux ?.
Il faut cependant savoir que l’entrée en vigueur de la réforme de l’ASS se fera au 1er juillet 2004 et que l’Etat a accordé 5 milliards d’euros supplémentaires au Conseils généraux pour faire face à cette nouvelle situation.
II - le RMA en Loire-Atlantique
Objectif visé par le Conseil Général : 1000 contrats signés d’ici au 31 décembre 2005 dans le secteur marchand avec 65 % d’accès à un emploi durable ou à une formation qualifiante.
Pour y arriver. Mise en place d’une charte partenariale avec les représentants des entreprises
– les Chambres consulaires (Chambre des métiers, chambres de commerce et d’industrie, chambre d’agriculture)
– les syndicats patronaux (le MEDEF, la CG-PME, l’UPA)
pour favoriser la création, dans des secteurs d’activité ou les emplois ne sont pas pourvu, de contrats d’insertion RMA.
Contenu de cette charte
Elle porte essentiellement sur la communication : promotion de ce dispositif auprès d’un maximum d’entreprises du département pour faire émerger de nouveaux contrats.
Il y a également un volet sur l’importance du tutorat, de la formation sur le poste de travail, la validation des acquis et le transfert des compétences et la formation qualifiante (toutes ces belles notions restent vagues, quelles seront les obligations réelles des employeurs en matière de formation et de suivi de la personne ?)
Le service mis en œuvre par le Conseil Général :
* Recrutement d’un chargé de mission auprès du CODELA (comité dedéveloppement de Loire-Atlantique)qui coordonnera ce dispositif
* Recrutement de médiateurs emploi du Conseil Général pour suivre la mise en place de ces contrats et aider les employeurs et les bénéficiaires dans leur démarche pendant la durée du contrat.
Le Conseil Général s’occupera du traitement administratif de ces contrats. Combien compte-il recruter de personnes ? Quelle direction prendra en charge ce dispositif ? Quel coût supplémentaire cela induit en frais de fonctionnement ?
*Mise en place d’un numéro vert pour la phase de lancement du dispositif seulement pour répondre aux questions des entreprises ! (et les futurs « salariables » ?, à qui s’adressent-ils, à leur assistante sociale ? ...)
Il y aura un suivi de la convention par le biais de deux groupes de travail :
– un comité technique (composé de représentants des services du CG et du CODELA, des référents aux sein des représentants des entreprises signataires). Réunion 1 fois par trimestre en 2004 puis 1 fois par semestre en 2005.
– un comité de pilotage réunissant le président du CG 44, et les représentants des partenaires signataires de cette convention. Il prendra connaissance de l’évaluation décidera des évolutions à lui donner. Réunion 2 fois en 2004 et une fois en 2005.
Ce dispositif se fera en coordination avec le Plan Local Emploi (PLE). Un partenariat avec l’ANPE est recherché pour amener des personnes reçues dans le cadre du PAP vers le RMA, quand cela est possible.
Concernant le secteur non marchand ou le Conseil Général parle également de 1000 contrats créés, rien n’est défini, aucune piste d’action envers de futurs employeurs possibles (les mêmes que pour les emplois-jeunes).
Dans tous les cas, le Conseil Général 44 versera à l’employeur l’équivalent d’un RMI personne seule amputé du forfait logement soit 362 € par mois, réactualisé chaque année par décret.
Chômage, précarité, RMA
(point de vue des conseillers généraux de gauche de Loire-Atlantique)
(12 février 2004)
Dans un contexte de stagnation économique et de montée du chômage, les mesures du Gouvernement (limitation de l’ASS) et de l’UNEDIC (réduction forte des durées d’indemnisation) vont précipiter dans la précarité un nombre important de salariés qui n’auront plus comme seule issue que le RMI.
Le nombre de bénéficiaires du RMI devrait ainsi augmenter fortement : de 10 % à 30 % soit 100 000 à 300 000 personnes selon l’estimation de Bernard Brunhes Consultants.
Dans ce contexte la création du RMA apparaît particulièrement dangereuse dans sa forme actuelle.
Sur le plan économique
En l’absence de croissance suffisante il n’y a pas de créations nettes d’emplois dans le secteur marchand.
Il y aura donc une substitution inévitable de « RMAstes » à des salariés non qualifiés en situation précaire.
La loi prévoit certes que l’entreprise concluant un contrat RMA ne devra pas avoir licencié dans les six mois précédents mais cette condition sera largement inopérante, si on se rappelle qu’une part importante de la gestion des effectifs se fait par le biais de CDD ou d’interim : point n’est besoin de licencier pour se « débarrasser » d’un CDD ou d’un intérimaire.
Tel n’était pas le cas des CES et des emplois-jeunes réservés au secteur public, associatif ou d’économie sociale dans le cadre de créations de services nouveaux ou insuffisamment développés (même si on a pu regretter, à juste titre, qu’ils aient parfois conduit certaines administrations à retarder la création de postes statutaires).
L’avantage financier est tel pour les entreprises que beaucoup d’entres elles n’hésiteront pas, à effectifs constants à pratiquer cette substitution : deux RMAstes à mi-temps coûteront à l’entreprise 613 € par mois soit 42 % du coût d’un salarié au SMIC à temps plein (voir note annexe).
Ainsi pour beaucoup de salariés précaires au SMIC le trajet risque d’être le suivant :
· fin de contrat à temps plein
· période d’indemnisation ASSEDIC écourtée
· entrée dans le RMI pendant 1 an
· contrat RMA
La boucle sera bouclée : à la limite l’entreprise pourra retrouver en moins de deux ans le même salarié mais qui lui coûtera 2,5 fois moins cher !
Quant au salarié ce contrat ne lui donne des droits à la retraite et à l’assurance chômage que sur la somme à la charge de l’employeur.
Sur le plan social
Il est clair que tous les efforts d’accompagnement des RMIstes doivent tendre à les aider à retrouver une activité utile et un revenu décent. Mais notre connaissance de ces personnes nous conduit à constater que nombre d’entre elles véritablement cassées par des évènements économiques, des ruptures familiales, ou des accidents de santé sont très loin de pouvoir entrer en l’état dans le monde compétitif du secteur marchand.
Des étapes, souvent longues et des emplois adaptés resteront nécessaires.
Les inciter fortement, sinon les contraindre à un contrat RMA dans le secteur marchand risque de causer des dégâts sociaux et des souffrances humaines.
LES PROPOSITIONS des Conseillers généraux de Gauche
Puisque la loi est votée (dans la précipitation), il appartiendra au Conseil Général de l’appliquer dans les meilleures conditions économiques et sociales.
Nous proposons :
1 - de privilégier les contrats RMA dans le secteur public, associatif et d’économie sociale
2 - de prévoir une clause stricte de remboursement de l’aide publique pour les employeurs qui ne respecteraient pas des conditions précises de formation de tutorat et d’accompagnement social.
3 - d’instituer un comité de pilotage du dispositif associant le Conseil Général, les organisations patronales et syndicales, des représentants des structures d’insertion et la Direction départementale du Travail.
A cet égard nous dénonçons vivement les objectifs quantitatifs qui veut se fixer le Conseil Général dans un tête à tête exclusif avec les seules organisations patronales.
(voir aussi page 154)
Etoile du Berger - décembre 2009 - mai 2010
Note : dans le Finistère, les élus de Gauche ont demandé au Conseil Général de ne pas mettre en place le RMA.
Ecrit le 28 avril 2004 :
RMA : de Charybde en Scylla : Pas de prime pour l’emploi
La Mée a déjà eu l’occasion de parler du RMA et d’expliquer que les « RMAstes » ne disposent pas d’un emploi mais d’une occupation pour laquelle ils gagnent, comme les RMIstes, environ 417,88 € bruts par mois. MAIS un allocataire du RMA qui travaille 20 h par semaine (un réel travail), ne cotise pour la retraite et l’assurance-maladie, que pour le tiers de ce qu’il reçoit à la fin du mois..
Mais voici du nouveau : le RMAste n’aura pas droit à la « prime pour l’emploi » car celle-ci est versée à ceux qui ont perçu un minimum de ressources d’activité ... Et le RMA n’est pas pris en compte par l’administration fiscale ! Sympa ! Tout bénéfice pour le ministère des finances. De plus, selon Alternatives Économiques, le ministère des finances envisagerait à terme de remplacer par une formule de ce type le soutien apporté aux structures d’insertion par l’activité économique.
Heureusement que tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. En 2003, Alcatel a affiché une perte nette de 1,9 milliards d’euros. Le Conseil d’Administration a cependant accordé au PDG Serge Tchuruk un bonus de 770 000 € soit le salaire de 1843 RMIstes
Toujours en 2003, Igor Landau, PDG d’Aventis a encaissé une rémunération brute de 2 778 327 € (ce qui fait 231 527€ par mois, soit 554 fois le RMI). Si Sanofi-Synthélabo réussissait son OPA sur Aventis, Igor Landau serait licencié, le pauvre, avec une indemnité de 40 mois de salaire, toutes primes incluses.