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Ecrit le 31 octobre 2007
Nous vous lirons des lettres
Lundi 22 octobre, anniversaire de l’exécution de Guy Môquet, un titi parisien qui n’acceptait pas l’occupation de son pays.
Bonjour maîtresse
Ce même jour les associations d’aide aux sans-papiers, Tous Solidaires et Solimée, ont lu des lettres de familles et d’enfants expulsés. Voici la lettre de Saldina (7 ans) :
" Bonjour maîtresses et tous les enfants de l’école Coteau Jouvent. Merci pour la lettre et merci d’avoir pensé à moi. Merci pour tout. Je ne suis pas contente ici parce que je ne vais pas à l’école. Je ne peux pas sortir et je ne dors pas.
A bientôt maîtresses
Un grand bisou à tout le monde « Et voici la lettre de ses parents, expulsés de Montbéliard en septembre 2007 et envoyés au centre de rétention d’Oissel : » Mesdames, messieurs, nous vous remercions de tout cœur pour votre soutien et pour vos lettres. Saldina a été très heureuse de ces courriers et nous avons tous pleuré de tristesse. Ici nous sommes comme en prison et nous ne savons pas pourqoi nous devons souffrir ainsi avec les enfants [Saldina 7 ans et Sumaya 18 mois]. Nous ne savons pas pour combien de temps encore, pour 7 jours oupor 7 mois. Le pire c’est Saldina qui demande quand nous rentrons à la maison à Montbéliard. Elle s’était préparée pour l’école, avait acheté un nouveau cartable. Elle a tout amené ici et demande sans arrêt quand nous serons libres et quand elle pourra retourner à l’école. C’est tellement difficile d’entendre un enfant dire cela.
Nous espérons, grâce à votre soutien et à celui d’autres personnes, être bientôt à la maison. Nous n’avons fait de mal à personne, pourquoi nous fait-on souffir ici ? "

Florimond Guimard - Ni fait ni à faire
Ce même 22 octobre avait lieu à Marseille le procès d’un militant du Réseau Education sans Frontière, Florimond Guimard. En fait, le 11 novembre 2006, au cours d’une manifestation à l’aéroport de Marignane rassemblant près de 200 personnes contre l’expulsion d’un père de famille de deux enfants scolarisés à Marseille, Florimond Guimard n’a fait que suivre à distance avec sa voiture le véhicule de police qui emmenait un père de famille à expulser. Aucun blessé n’a été déploré ce jour, si ce n’est un jour d’ITT concernant un policier dont le pouce aurait heurté une barrière et quelques éraflures côté manifestants. Le parent d’élève a été libéré le soir même. Florimond Guimard a cependant été accusé de violences en réunion avec arme par destination.
Lors de l’audience du 22 octobre 2007, l’examen des vidéos de la manifestation a clairement montré que les accusations retenues à l’encontre de Florimond ne reposaient sur aucune réalité. Si bien que, au moment de requérir, le procureur de la République a dressé ce constat : « Il s’agit d’une procédure peut-être ni faite ni à faire » en concluant : « Le doute doit donc profiter au prévenu ».
Fort bien. Mais quand un homme est dans les griffes de la justice, il faut trouver quelque chose. Le Procureur a estimé qu’en franchissant le barrage établi autour de l’aéroport, Florimond Guimard avait « opposé une résistance à l’égard des forces de l’ordre, sans que, dans ce genre de cas, il soit nécessaire que des coups soient portés ». En somme il suffit d’avoir l’intention de manifester pour qu’un délit soit constitué ! Le Procureur a demandé deux mois de prison avec sursis. Les avocats de Florimond Guimard, tout en réclamant la relaxe, ont alors conseillé au Parquet de poursuivre également tous les militants. Jugement rendu le 21 décembre.
Les femmes ... à poil
L’ADN ça ne suffit pas ! Selon le journal Rue89 du 24 octobre 2007, la police a arrêté deux jeunes Congolaises sans-papiers. Ayant des doutes sur l’âge indiqué sur leur passeport congolais, la police a demandé une expertise au CHU de Limoges : radio du poignet et examen de la pilosité des aisselles et du pubis, et de l’aréole des seins. Le médecin a conclu que les deux jeunes femmes étaient majeures. Les deux jeunes filles ont donc été déferrées au tribunal correctionnel pour faux et usage de faux, le parquet arguant de l’irrégularité des papiers congolais, en plus de l’entrée et du séjour illégaux sur le territoire.
La défense a plaidé que cet examen appronfondi, ne permet pas de déterminer valablement si la jeune femme est majeure. En effet un rapport de l’Académie nationale de médecine, datant de janvier 2007, estime qu’on a peut-être l’âge de ses os... mais pas avec précision passé 15 ans et que, « sans échographie, le seul examen du volume des seins ou de la pilosité ne permet pas d’être affirmatif ».
Pour RESF et plusieurs avocats, en obligeant les jeunes fille à dévoiler leur intimité, ces examens portent atteinte à leur dignité. L’une des jeunes filles a même été accusée de s’être rasé le pubis « pour cacher quelque chose » alors même qu’elle ne savait pas qu’elle allait être interpellée !
Le Tribunal a contesté la fiabilité d’un tel examen médical et a décidé de placer la jeune Congolaise sous protection judiciaire. La seconde jeune fille n’a pour sa part toujours pas été jugée.
Un bébé en prison
Deux Moldaves et leur bébé, né le 26 septembre 2007 ont été placés en garde à vue pendant huit heures et 50 minutes, dans le Loiret, puis transférés au centre de rétention de Saint-Jacques-de-la Lande, près de Rennes. La cour d’appel de Rennes souligne « la grande souffrance morale et psychique infligée à la mère et au père par cet enfermement avec le nourrisson », souffrance « manifestement disproportionnée au but poursuivi, la reconduite à la frontière des époux ».... Encore un magistrat courageux qu’il va falloir mettre au pas !
La politique d’immigration du gouvernement sent vraiment très mauvais.
Marché aux esclaves
Port-Saïd. Un père de famille a aligné ses quatre filles sur la place publique pour les vendre aux plus offrants. « Des visages candides à vendre, des enfants à la fleur de l’âge : Arzaq (10 ans), Karima (8 ans), Badr (6 ans) et Badawiya (4 ans). Brunes et blanches de peau, vous avez l’embarras du choix. Payez sans marchander » répète à haute voix Mohamad Ismaïl tout en larmes. N’ayant pas trouvé de quoi subvenir aux besoins de sa famille, il n’a pas trouvé d’autres solution que de vendre sa propre chair.
« Que puis-je faire d’autre ? je n’arrive plus à nourrir mes propres enfants. Pas même avec du pain sec. Je ne peux pas les livrer à la mendicité ou les abandonner dans la rue. Peut-être auront-elles la chance de tomber sur quelqu’un de bien qui pourra assurer leur avenir », poursuit-il.
Lui et ses quatre filles tiennent dans leurs mains des pancartes sur lesquelles on peut lire : « Enfants à vendre ! où sont les droits de l’homme ? ».
(Source : Journal El Ahram, 24 octobre 2007)