Ecrit le 14 mai 2008
Une matinée à l’école Claude Monet
« Récré, sieste et habillage ». Il faut fermer les écoles maternelles dit le livre de Julien Dazay (récemment sorti). Et pourquoi ? « On n’y apprend pas grand-chose » dit-il, et trop de temps est passé entre récré, sieste et habillage. La Mée a donc voulu en savoir davantage en allant passer une matinée dans la classe maternelle des moyens et des grands, à l’école Claude Monet de la Ville aux Roses à Châteaubriant.
9 h, les mamans amènent les enfants, on voit aussi des papas et des grands-parents. Cela fait 6 mois que l’école est commencée : la séparation n’engendre plus de larmes.
Dès leur arrivée les enfants entrent dans la salle et s’installent pour jouer et dessiner. Ils adoptent tout de suite le nouveau venu et savent très bien à qui ils s’adressent : « Regarde mon dessin » disent-ils à leur petit voisin. « Regardez » disent-ils au visiteur. A l’école on apprend la politesse et le respect de l’autre.
Repérage
« Qui prend la grenouille ce matin ? » - « Moi, moi ! » - La grenouille est une sorte d’instrument de musique qui rappelle aux petits qu’il faut ranger les jouets et faire cercle autour de Mireille. « Nous sommes quel jour ? » - Lundi - « Quelle date ? » Le 5. « De quel mois ? De quelle année ? De quelle saison ? ». Les réponses fusent et des enfants vont marquer, avec une pince à linge, le jour et la date, sur une frise fixée au mur.
« Lundi, mardi, mercredi . dimanche ! ». Sous forme de comptine les enfants ont appris les jours de la semaine. « Je montre mes yeux, je cache mes yeux, je mets les mains en l’air, je mets les mains derrière mon dos ». A l’école on apprend à se repérer.
L’éléphant se mouche mouche moucheIl lui faut un grand mouchoirL’éléphant se couche couche coucheA huit heures tous les soirs1 - 2 -3 -4 -5 -6 -7 -8 -Dodo !
La comptine, mimée, est mémorisée.
Mais des petits bâillent dès le matin. Ils feraient bien, eux aussi, de se coucher à huit heures du soir .
Il reste à répéter la poésie de la fête des mères : « Des milliers de fleurs dans les champs, des milliers d’abeilles sur les fleurs, des milliers d’oiseaux dans le ciel, mais seulement, seulement UNE seule maman ». Mais justement, une petite fille est séparée de sa maman, partie pour un voyage d’une dizaine de jours. La petite en parle cing fois par jour et a bien du mal à se concentrer sur autre chose que le retour attendu.
La salle de classe fait environ 60 m2. Un angle est réservé aux « moyens » (4-5 ans) et un autre aux grands (5-6 ans). A ceux-ci Mireille demande de compléter un dessin : des chevrons, des petits ronds pour « le pagne de la forêt ». Pas si facile à reproduire pour des petits bout’d’chous. On sent déjà chez les uns un sens de l’organisation et chez d’autres un éveil artistique. Mais certains peinent à reproduire le dessin et même à le voir.
Dans le coin des « moyens » chaque enfant dessine un bonhomme. Il est intéressant de voir l’évolution de mois en mois. Peu à peu les enfants ont découvert l’existence du cou. Et des mains au bout des bras. L’observation des enfants est encore incertaine : les mains sont démesurées, les jambes sont maigrelettes . Combien de doigts ? « 1-2-3-4-5 et en tout cela fait 10 » chantonnent les gamins.
Pendant tout ce temps l’aide-maternelle, Christelle, vient chercher 2 ou 3 enfants pour finir le dessin de la fête des mères. Les petits enfilent de grands blouses bleues pour ne pas se tacher avec la gouache liquide.
Gre nouille
Quand leur travail est fini, les enfants se lèvent pour prendre les jeux. Que des jeux éducatifs ! Cubes, puzzles, boites à trous pour apprendre à voir les couleurs et les formes et à les agencer. Dans une boite aimantée des enfants assemblent des lettres pour écrire leur prénom. Avec du mal parfois à distinguer le b du d. Bosse à droite ? Bosse à gauche ? Et le b du p . Jambe en haut ? Jambe en bas ? Un enfant bâille encore. « Que fait-on quand on bâille ? » dit Mireille. Un autre gamin répond : « On met la main devant sa bouche ». Education !
Les enfants ont trois cahiers d’exercice. L’un, quadrillé 10x10, pour reproduire des dessins (exercice d’observation et de repérage). Un autre « double ligne » pour le début de l’écriture. Un troisième « seyès » comme celui qui sera utilisé à l’école primaire. Autour d’une histoire étudiée en classe, les enfants écrivent des mots. c’est pas évident !
Faites donc écrire le mot « grenouille » . à des petits !!
La maîtresse a la façon de leur expliquer comment former les lettres et comment les enchaîner. Les mains malhabiles peinent à faire la jambe du g (en descendant tout droit et l’arrondi vers la gauche). Et comment lier avec le r ?
Mais il est 10 heures, le temps a passé vite. Dix heures, l’heure du goûter. céréales le lundi, cracottes au fromage le mardi, biscuits secs au chocolat le jeudi, compote et confiture le vendredi. Et le samedi on finit les restes. Education du goût, diversité des aliments. Cette pratique du goûter est controversée. Utile pour les petits qui, le matin, ne mangent pas chez eux ? Nuisible pour ceux qui, déjà , sont menacés d’obésité ?
Un temps de récréation, dehors, quand il fait beau, pour courir et goûter la vitesse d’un tourniquet escalader une échelle, descendre un toboggan.. Et l’école reprend. Les « moyens » jouent au jeu de la maison : jeter les dés, reconnaître le chiffre, compter les cases, nommer les objets que l’on trouve : chaussons, tomates, brosse à dent, dentifrice, porte-manteau, baignoire, oreiller, bol Dans beaucoup d’écoles les instituteurs sont frappés de voir que les enfants, à la maison, ne connaissent pas les noms des objets courants.
Des exercices de coloriage complètent la reconnaissance des nombres : le nombre 5, cinq fleurs à colorier dans une liste et sans déborder . Contrôle de la main !
Les « grands » pendant ce temps, se livrent à un exercice d’écriture. Un éléphant, comment ça s’écrit ?
Un é d’abord, comme épée, avec accent aigu
Et puis un l minuscule et encore un é.
Et puis le son « phan » - Non, pas avec un F comme dans enFant mais avec un p et un h .
c’est dur de faire un h et de l’attacher avec le p !
Et puis, savez-vous ? A la fin du mot il y a une lettre qu’on n’entend pas, quelle est-elle ? Devinette ! Comment s’appelle le petit de l’éléphant ? Un éléphanTEAU ! Quelle est donc la dernière lettre qu’on cherche ?
Mais oui, un t ! « Ouais, c’’est bien » dit une petite fille ! Avec tout ça, écrire un mot prend 20 minutes. Exercice d’habileté et d’observation.
c’est bientôt la fin de la matinée, l’heure des mamans. On range tous les objets et on encercle la maïtresse qui vient de recevoir le dernier numéro de la revue « Histoires pour les petits ». Les enfants aiment bien les histoires mais pas « pour les petits » car, figurez-vous, ils ne sont pas des petits !
Allez, au revoir les enfants, ce fut une belle matinée.
Fermons, fermons
Alors, faut-il fermer les écoles maternelles ? Oh non, elles sont trop importantes pour les apprentissages de base et aussi pour l’apprentissage des règles de la vie en société.
Mais que propose-t-il donc M. Dazay ? d’ouvrir l’école primaire dès 6 ans et d’accueillir les enfants, plus petits, dans des jardins d’enfants, comme en Allemagne, qui seraient organisés (et payés !) par les communes et les familles. Finie l’école maternelle ! Cela ferait des économies pour l’Etat. Mais pas au bénéfice des enfants !
Beaucoup d’enfants ne reçoivent pas, de leur famille, le minimum d’éducation nécessaire. L’école maternelle permet de pallier un peu ces déficiences. De grâce, ne saccageons pas tout. !
Les écoles catholiques tentent, certes, de récupérer les manquements des parents qui sont plus prêts à payer qu’Ã s’investir. C’est un vaste débat à relier aux multiples cours privés qui fleurissent. Peut-on obtenir la réussite de ses enfants en la monnayant ?
Jardins d’enfants et catho-école ?
Bonne opération, ce désengagement de l’Etat. c’est ce que nous apprend le n°321, février 2008, de la revue « Enseignement catholique actualités » dont le secrétaire général, Eric de Labarre, écrit : " Des enfants ont besoin de nous pour grandir, des familles attendent de nous une aide pour les accompagner dans leur mission de premiers éducateurs.
Au moment où l’Éducation nationale se désengage à l’égard des moins de trois ans, le temps est sans doute venu pour les établissements catholiques de redécouvrir leurs savoir-faire spécifiques pour l’accueil des tout-petits dès dix-huit mois (ou même en-deçà ) et de les mettre à la disposition de tous ". Ainsi l’Etat se désengagera pour offrir les écoles au privé !
Voir ici : http://www.lisez-moi.info/doc/Catho-ecole-a-18-mois.pdf
Note du 17 septembre 2008 :
Les profs de maternelle ne changent que les couches : http://www.rue89.com/2008/09/15/darcos-les-profs-de-maternelle-ne-changent-que-les-couches. Suivante