Ecrit le 21 mai 2008
Sources :les documents du Musée Dobrée et du Conseil général de Loire-Atlantique
Pannecé, petit bourg situé à 34 km de Châteaubriant. On dit que s’y croisent deux voies romaines, celle de Nort à Candé et celle d’Ancenis à Béré.
En 1841 un « trésor » de 80 kg de monnaies y fut découvert. Dispersé dès l’origine, le musée départemental Dobrée à Nantes en conserve encore 27 pièces de l’empereur Trajan (98-117) à l’empereur Maximilien Hercule (285-307). En 1852, y fut aussi trouvée une statue de bouc (IIIe siècle) en bronze, (aujourd’hui visible au musée Dobrée à Nantes).
A partir des Journées Européenne du Patrimoine des 20 et 21 septembre, le musée départemental Dobrée exposera le « Trésor de Pannecé II », un nouveau dépôt monétaire de 108 kg découvert en 2002 à proximité de celui mis au jour en 1841.
Le 2 novembre 2002 , en se promenant en bordure d’un champ de vignes à Pannecé, une famille anglaise mit au jour un autre trésor que la terre-mère avait gardé jusqu’alors : 37 000 pièces de monnaie, le plus important dépôt jamais retrouvé dans le département.
On y voit notamment des Antoniniens (monnaies d’argent du IIIe siècle) et des Deniers de Tétricus (sénateur romain, empereur des Gaules de 271 à 273).
Parvenu jusqu’à nous dans son intégralité, et avec même une partie des contenants, le trésor a donné lieu à un traitement scientifique d’une rare qualité, avec nettoyage et inventaire pièce à pièce et microfouille d’une céramique (une première en France), dont les conclusions seront présentées dans un ouvrage soutenu par la Bibliothèque nationale de France.
Dans un premier temps ce trésor a été rendu, après étude, à ses inventeurs. Et puis, finalement, le Conseil Général a décidé de l’acheter, ce qui constitue une remarquable opportunité pour doter le musée Dobrée d’un atout majeur de son futur parcours permanent, tant par la signification historique et économique que par le choc visuel procuré aux visiteurs, et pour placer définitivement cette institution à la tête des musées numismatiques de France.
Ecrit le 10 septembre 2008
Une grande richesse
Un très important dépôt monétaire gallo-romain de plus de 41 000 pièces de cuivre, soit plus d’une centaine de kilos de métal, a été découvert à Pannecé (Loire-Atlantique) en novembre 2002.
Ce monument majeur de l’archéologie départementale et régionale a été préservé de la dispersion grâce à son acquisition par le Conseil général de Loire-Atlantique pour le musée départemental Dobrée.
Photo : Pièce frappée à proximité de Pannecé vers 271-274
Ce dépôt monétaire dit « trésor de Pannecé II », (parce qu’un autre « trésor » de 80 kg de monnaies de la même époque, soit plus de 30 000 pièces, a déjà été trouvé sur le même site de Pannecé en 1841) sont toutes du IIIe siècle, frappées au profil de différents empereurs romains [ Valérien, Gallien, Quintille, Aurélien, Claude II le Gothique] et « gallo-romains » [Postume, Victorin, Tétricus].
Les pièces proviennent de différents ateliers monétaires : Rome, Milan, Trêves et Cologne, Antioche et l’Ouest de la Gaule…
Sur le terrain, une fouille de contrôle financée par l’État et menée par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), détermina que le trésor avait été enfoui dans une fosse, au pied du mur d’un bâtiment dont les pierres avaient été récupérées au fil du temps pour de nouvelles constructions.
Les monnaies retrouvées sont des antoniniens, espèce en billon (alliage d’argent et de cuivre), puis cuivre argenté, puis en cuivre seulement, créée par l’empereur romain Caracalla en 215. L’antoninien, correspondant à une dévaluation du denier d’argent, procura temporairement d’importantes liquidités à l’État impérial.
La découverte la plus importante est un « denier » de Tétricus père, le premier mis au jour dans le Grand Ouest. Ces monnaies, dont on ne connait qu’une douzaine de spécimens au plus pour ce règne, étaient spécialement frappées en vue d’être données en cadeau aux soldats ou aux officiers. Ces contributions d’argent à l’armée, dénommées donativa, étaient généralement liées à l’avènement d’un nouvel empereur. Cet exemplaire présente le double intérêt d’être d’un type unique, inconnu jusqu’à présent. Après la mort de l’« empereur gallo-romain » Victorin, Tétricus père, préfet d’Aquitaine, est acclamé empereur en décembre 271, à Trêves ou à Cologne, par les légions de l’armée romaine qui défendait l’Empire sur le Rhin. En « élisant » empereur ce général originaire d’Aquitaine, l’armée du Rhin se donne un chef pour remédier à l’anarchie militaire et à la grave crise politique qui désorganise, à Rome, le pouvoir impérial. Elle entend défendre l’Empire et maintenir l’ordre du monde romain.
L’intérêt scientifique et historique du trésor
Ce trésor est d’un grand intérêt, expliquent Jacques Santrot et Gildas Salaun. Il se répartit en trois ensembles
« Les émissions inflationnistes de Gallien, Claude II, Quintille, Victorin et Tétricus (76%).
Les imitations locales de ces monnaies, très caractéristiques, sur flans de petit diamètre mais épais (22%).
Un ensemble de meilleur aloi (pourcentage d’argent) formé par quelques monnaies antérieures à 253, les monnaies d’Aurélien et, à un degré moindre, celles de Postume (2%) ».
L’ensemble monétaire de Pannecé II est l’un des plus considérables du Grand Ouest, le troisième ou quatrième plus imposant trésor français et l’un des rares de cette importance entièrement conservé et disponible à l’étude puisqu’il n’a subi aucune dispersion.
Cet ensemble a pu être conservé et protégé pratiquement dès sa découverte, et étudié pendant 5 ans avec, notamment, une micro-fouille de la grande céramique : la grande jarre à deux anses a été progressivement découpée puis restaurée en maintenant délibérément le souvenir du sciage de sa paroi, nécessaire pour mettre en œuvre la méthode adoptée. C’est une première en Europe et probablement au niveau mondial.
Cette nouvelle méthode d’investigation apportera désormais des informations sur le mode de constitution (accumulation progressive, insertion de sacs dans le contenant, vrac, etc) lors de la découverte future de dépôts monétaires (sur l’exemple de Pannecé II, une nouvelle micro-fouille est envisagée pour un trésor médiéval angevin).
D’un point de vue historique, le trésor de Pannecé se rattache au contexte de la crise politique, militaire et économique de la fin de IIIe siècle. II fait partie de ces enfouissements hâtifs réalisés dans un contexte d’insécurité, soit en raison de révoltes locales, soit sous la peur des premières incursions barbares en Gaule, ou de « pirates » saxons ou germaniques le long des côtes et des voies navigables armoricaines en particulier, soit pour de toutes autres raisons militaire, économique ou fiscale.
La présence de nombreuses imitations locales laisse supposer l’existence, sur le territoire de la Loire-Atlantique notamment, d’ateliers monétaires oeuvrant en marge des ateliers officiels pour répondre au manque d’espèces dans ce contexte de crise du pouvoir impérial romain.
Ateliers monétaires locaux
Avec ceux repérés aux environs de (Béré (Châteaubriant)->476] et de Besné, il s’agit du troisième centre de production monétaire décelé dans notre département. C’est également le plus précoce.
Ces frappes monétaires locales étaient le fait de domaines aristocratiques ou de centres urbains secondaires désireux de maintenir une activité économique et commerciale malgré l’affaiblissement des principales cités et la désorganisation de la vie économique à la faveur de la crise qui conduisit des « empereurs gallo-romain » à usurper le pouvoir pour se substituer à Rome défaillante et maintenir l’Empire dans la Paix romaine (Pax Romana), en particulier contre les Barbares germains.
Un atout pour le futur
musée départemental Dobrée
Le trésor est un atout pour le futur musée départemental Dobrée : il va parfaitement s’intégrer aux collections du musée dont la mission est de retracer l’histoire de la région nantaise des origines jusqu’au XVIe siècle.
Le trésor de Pannecé II sera présenté au public à Nantes à partir du samedi 20 septembre (de 14h30 à 17h30) et du dimanche 21 septembre (de 10h30 à 17h30) au Musée Dobrée. Entrée gratuite. Espérons une exposition plus tard à Ancenis et Châteaubriant ….
Ecrit le 8 juillet 2009
A voir tout l’été à la Maison du Département , place St Nicolas à Châteaubriant : le trésor de Pannecé est numériquement le plus important découvert en Loire-Atlantique et dans tout l’ouest, toutes époques confondues, et se pose comme le 3e ou 4e plus imposant trésor français.
Le musée départemental Dobrée et la Maison du Département de Châteaubriant vous invitent à venir découvrir ce témoignage de l’histoire locale et de l’Empire gallo-romain à la fin du IIIe siècle.
Rens. 02 28 04 09 00