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Ecrit le 20 mars 2013
Le pape François
A dire vrai, nous, à La Mée, nous n’attendons rien d’un pape : il relève du domaine privé et nous nous situons plutôt dans la sphère publique. Mais, tout de même, il représente une autorité morale reconnue par des milliards de fidèles dont il peut orienter la réflexion. Alors
Alors le choix des cardinaux à calotte rouge est assez étonnant, détonnant.
Un homme âgé : 76 ans. Ce qui montre que le critère n’a pas été l’âge, mais les qualités personnelles de l’homme.
Un archevêque d’Amérique Latine. Pour la première fois le pontificat quitte l’Europe et l’élu n’est pas un homme de la curie romaine. C’est un homme de terrain. D’ici quelques décennies nous aurons peut-être un pape noir !
Un ascète. On dit qu’il n’aimait pas la robe rouge cardinalice et qu’il préférait garder la noire. Signe d’un attachement aux valeurs profondes de préférence au « m’as-tu vu » ?
On le présente comme l’évêque des pauvres. Ca c’est un bienheureux présage. On dit qu’il a vu les dégâts du libéralisme économique et de la mondialisation. Sans doute ne peut-il pas grand chose à ce sujet sur les puissants de la Terre. Mais il pourrait contribuer à changer le regard des fidèles, pour les inciter à ne plus se soumettre à cette idéologique destructrice des hommes.
Il est sûrement conservateur (par rapport au mariage gay, par exemple) mais, en homme de terrain, il saura peut-être réfléchir à la place des femmes dans la société-église. Aurons-nous un jour des femmes-prêtres ? On peut l’espérer. Des prêtres mariés ? On peut l’envisager. Devenir pape, cela peut changer un homme !
Lui, le Jésuite, allie les études et le terrain. Il a sûrement compris que, dans les peuples, la misère économique conduit à la misère morale (et non l’inverse), que la non-activité forcée est plus ravageuse que les relations sexuelles, que la faim des corps est la source de la misère des esprits. Il a sûrement compris que la façon de mener le monde, actuellement, est au service de la fortune de quelques uns, au prix de l’asservissement du plus grand nombre. Saura-t-il le dire ?
Il a choisi de s’appeler le Pape François, comme François d’Assise, un jeune homme riche qui renonça à la richesse pour faire la promotion de la solidarité avec les pauvres, les démunis, les marginalisés, pour dénoncer les injustices et s’opposer à toute appropriation. Le nouveau pape déteste, aussi, la richesse, et vit personnellement dans la pauvreté et la modestie. Sera-t-il pour autant le pape des pauvres ? Lui qui était hostile à la « Théologie de la libération » (mouvement socio-politique apparu dans les années soixante en réponse à la pauvreté) se contentera-t-il, en faisant semblant d’apostropher les puissants, de prêcher la docilité aux pauvres, se contentera-t-il de « faire du social », d’espérer des mesures d’aide sociale, sans appeler les pauvres à être acteurs de leur propre libération ?
Son rôle sous la dictature argentine pose question. Il n’a jamais émis la moindre critique contre la dictature de Videla. A-t-il joué un rôle dans l’affaire des enfants volés ? Et dans l’arrestation de deux de ses prêtres (ils furent ensuite longuement torturés) ? On notera seulement qu’un de ceux-là l’a mis en cause et que l’autre, Francisco Jalics, se dit en paix avec le souverain pontife.
L’avenir dira si le pape François, malgré ses positions conservatrices passées, saura vraiment être progressiste ...
Ecrit le 18 septembre 2013
Le pape et les couvents vides
Pendant que se multiplient, sur internet, les messages de racisme et d’exclusion, le Pape François fait entendre une autre voix, morale, qu’on n’avait pas l’habitude d’entendre.
Le 8 juillet 2013, il a visité l’île de Lampedusa, où débarquent fréquemment des migrants provenant de zones déshéritées ou de conflits : Somalie, Ethiopie, Irak, Syrie, Afghanistan, Mali, cherchant un monde meilleur pour eux et pour leur famille. Il a parlé de la « mondialisation de l’indifférence ». « Aujourd’hui, dit-il, personne dans le monde ne se sent responsable de cela ; nous avons perdu le sens de la responsabilité fraternelle ; nous sommes tombés dans l’attitude hypocrite du prêtre et du serviteur de l’autel, dont parlait Jésus dans la parabole du Bon Samaritain : nous regardons le frère à demi mort sur le bord de la route, peut-être pensons-nous »le pauvre« , et nous continuons notre route, ce n’est pas notre affaire ; et nous nous mettons l’âme en paix, nous nous sentons en règle », a-t-il ainsi lancé à la foule présente dans le stade de l’île.
« La culture du bien-être, qui nous amène à penser à nous-même, nous rend insensibles aux cris des autres, nous fait vivre dans des bulles de savon, qui sont belles, mais ne sont rien ; elles sont l’illusion du futile, du provisoire, illusion qui porte à l’indifférence envers les autres. Dans ce monde de la mondialisation, nous sommes tombés dans la mondialisation de l’indifférence. Nous sommes habitués à la souffrance de l’autre, cela ne nous regarde pas, ne nous intéresse pas, ce n’est pas notre affaire ! » a-t-il dit
[Ndlr : En juin 2013, sept immigrants se sont noyés au large de la Sicile alors qu’ils s’agrippaient désespérément à une cage tirée par un thonier. Selon les survivants, l’équipage du chalutier aurait alors sectionné le câble qui reliait la cage au bateau... Cinq-cents immigrants sont morts en 2012 en cherchant à débarquer à Lampedusa].
Couvents vides
Le 10 septembre à Rome, au centre Astalli, le Pape a lancé un appel aux ordres religieux et à l’Eglise tout entière : « Les couvents vides ne servent pas à l’Eglise pour qu’elle les transforme en hôtels pour gagner de l’argent ».
« il ne suffit pas de donner du pain s’il n’est pas accompagné de la possibilité d’apprendre à marcher avec ses propres jambes. La charité qui laisse le pauvre comme il est, n’est pas suffisante. La vraie miséricorde exige que le pauvre trouve la voie pour ne plus l’être ».
Le pape a plaidé pour « le droit à vivre et à travailler, à être pleinement personne » et « le droit à l’intégration », à « être une part active de la société » d’accueil.
[Ndlr : fondé en 1981, le Centre Astalli procure des repas, des douches, des soins et une assistance sociale. Plus de 450 personnes y viennent chaque jour, notamment des chrétiens coptes, et plus majoritairement des musulmans].
Célibat
Evolution ? Révolution ? Rappelant à un journal vénézuélien que le célibat des prêtres « n’est pas un dogme de l’Église », Mgr Pietro Parolin, qui deviendra le 15 octobre 2013 le premier collaborateur du pape François, replace le célibat sacerdotal dans la « tradition ecclésiastique ». On peut penser, dit-il, « à quelque modification, mais toujours au service de l’unité et tout selon la volonté de Dieu ».
Mettez le feu dans les diocèses
Ecrit le 28 janvier 2015
Le pape et les lapins
« J’ai fait des reproches à une femme enceinte du huitième après sept césariennes. Je lui ai dit : ’’Vous voulez laisser orphelins sept enfants ? C’est de l’irresponsabilité’’ ! ».
« Elle m’a dit : ’’J’ai confiance en Dieu’’.... Mais Dieu te donne les moyens d’être responsable ! ». C’est le pape François qui raconte cette anecdote en ajoutant :
« Certains pensent (excusez-moi du terme) que pour être de bons catholiques, il faut se comporter comme des lapins : mais ce n’est pas le cas ! » et en appelant à une maternité et à une paternité responsables.
Ce pape a un langage que les ’’bons’’ catholiques jugent très peu catholique : lors des JMJ au Brésil, en juillet 2013, il avait clamé : « Mettez le bordel ! Mettez le feu dans les diocèses ! Ne restez pas enfermés dans vos communautés. L’Église doit sortir dans la rue ».
(dessin de Baudry)