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Ecrit le 23 octobre 2019
Le comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital a été installé en décembre 2018, c’est-Ã -dire un an après le lancement de la profonde rénovation de la fiscalité du capital portée par le gouvernement et votée par le législateur. La réforme a instauré un prélèvement forfaitaire unique (PFU) sur les revenus de l’épargne et remplacé l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) par un impôt recentré sur la fortune immobilière (IFI). En outre, la baisse de l’impôt sur les sociétés (IS), conçue comme complémentaire de ces transformations, a été programmée sur l’ensemble du quinquennat. Quels sont les premiers effets de ces réformes ?
Le comité France-Stratégie ne sait pas encore si la suppression de l’ISF a permis une réorientation de l’épargne des contribuables concernés vers le financement des entreprises. En revanche il note la forte progression des dividendes reçus par les actionnaires en 2018.
Le passage de l’ISF en IFI a réduit le nombre d’assujettis à cet impôt de 360 000 à 130 000. Quel que soit le niveau de patrimoine déclaré en 2017, les contribuables à l’ISF ont bénéficié de baisses d’impôt importantes, y compris ceux qui sont aujourd’hui imposables à l’IFI : en moyenne, l’impôt acquitté a été divisé par trois et demi.
Les recettes de l’IFI en 2018 sont inférieures de 2,9 milliards à celles de l’ISF en 2017 (4,2 milliards). En tenant compte notamment du fait que les recettes de l’ISF auraient continué à croître en l’absence de réforme, le coût budgétaire du passage à l’IFI serait de l’ordre de 3,1 milliards d’euros.
L’impact redistributif instantané des réformes sur l’échelle des revenus est désormais bien documenté.
: s’agissant de la mise en place du PFU, les gains fiscaux seraient concentrés sur les 15 % des ménages les plus aisés et, au sein de ces 15 %, ils seraient plus importants encore pour le tiers supérieur, avec pour ces derniers des gains moyens en termes de niveau de vie de près de 1 000 euros par an.
: s’agissant de la transformation de l’ISF en IFI, on peut estimer que les 5 % des ménages les plus aisés perçoivent 57 % des gains, et que quatre ménages gagnants sur cinq se situent parmi les 15 % les plus aisés. Le gain annuel moyen d’un ménage gagnant est de l’ordre de 6 500 euros de niveau de vie.

: Au total, les deux réformes favorisent dans un premier temps les ménages les plus aisés . [ndlr : mais que voulez-vous qu’on y fasse : c’est toujours pareil !]
On observerait en 2018 une baisse de ressources d’au plus 150 millions d’euros
pour les associations au titre des dons ayant bénéficié de réductions ou crédits d’impôt.
s’agissant de l’exil fiscal, la réforme ne se serait pas traduite en 2018 par des retours nombreux de clientèle fortunée, mais elle aurait permis de prévenir certains départs.
Et pour 2020 ?
L’IPP, institut des politiques publiques, a présenté son évaluation des impacts du Budget 2020 sur les ménages et les entreprises, qui montre un rééquilibrage des mesures en faveur des classes moyennes, à la suite de la brutable crise des Gilets Jaunes.
: La baisse de l’impôt sur le revenu bénéficiera aux 50 % des ménages les plus aisés, avec des gains moyens pouvant aller jusqu’Ã 1 % de revenu disponible. (Par exemple 437 euros annuels pour un revenu disponible de 3678 euros mensuels).
: La poursuite de la baisse de taxe d’habitation bénéficiera à une large classe moyenne.
: Au total, le budget 2020 conduit à une hausse de revenu disponible de 252 euros par ménage en moyenne. Mais ce n’est qu’une moyenne !
: Les 20 % les plus pauvres bénéficient de gains plus faibles, inférieurs à 1 %.
: Les 20 % les plus aisés bénéficient également de gains ne dépassant pas 1 %, excepté le dernier centile qui voit son revenu disponible augmenter de 2 %.
Mais à part dans la hotte du Pène Noë l, les cadeaux gratuits ça se paie ! Au chapitre du programme de réforme fiscale du gouvernement, les microentrepreneurs vont voir certains de leurs avantages fiscaux être supprimés. Par exemple l’avantage octroyé aux microentrepreneurs venant juste de démarrer leur activité. Depuis l’an passé, les travailleurs indépendants ayant choisi de travailler sous ce régime bénéficient d’une réduction de charges intéressante et dégressive sur trois années. Ils peuvent alors profiter d’un abattement de charges sociales de 75% la première année d’exercice, puis de 50% la deuxième année et de 25% la troisième année.
Mais le gouvernement fait la chasse à plusieurs niches fiscales afin de boucler son budget 2020. résultat, l’avantage fiscal pourrait bien être considérablement réduit : 50% de charges en moins la première année, 25% la deuxième et retour à la normale dès la troisième année. Le problème est double : cette mesurette ne rapporte que 300 millions d’euros dans les caisses de l’Etat et risque de refréner les ardeurs d’entrepreneurs en herbe. Pour rappel, la microentreprise est un beau succès car rien que l’an passé sur les plus de 700 000 entreprises créées en France, plus de 300 000 étaient des microentreprises.
Encore oubliés
Pour certaines catégories de la population, les effets des mesures gouvernementales sont de relativement faible ampleur. c’est le cas notamment des ménages les plus modestes, qui ne bénéficient pas des grandes mesures de soutien au pouvoir d’achat portant sur la prime d’activité ou les heures supplémentaires, puisque la plupart d’entre eux ne sont pas en activité.
Les deux réformes principales qui les concernent sont la hausse du chèque énergie de cinquante euros et son extension, ainsi que la sous-revalorisation des prestations sociales (aides au logement, prestations familiales). Les effets de ces deux mesures se compensent en moyenne, d’où les faibles effets redistributifs observés pour les 10% des ménages les plus modestes.
Bonne santé locale
Dans un « contexte financier favorable », la situation financière des collectivités « devrait continuer à s’améliorer jusqu’à l’horizon 2022 » disait la Cour des Comptes en septembre dernier. Cette bonne santé provient, d’abord, de la légère hausse des concours financiers de l’État, qui doivent passer de 48,1 milliards d’euros, en 2018, à 48,27 milliards d’euros cette année, après quatre années de baisse entre 2014 et 2017.
Deuxième facteur qui bénéficie aux collectivités, le dynamisme de la fiscalité locale dont les recettes devraient progresser de 2,7 milliards d’euros en 2019, avec la revalorisation forfaitaire des bases locatives cadastrales (+2,2 %, soit un gain de 1,3 milliard d’euros) et la haure de près de 6,8 % du produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).
Mais les communes s ’inquiètent de la future suppression totale de la taxe d’habitation que le gouvernement promet cependant de compenser « Ã l’euro près ». Dans les faits cette compensation s’effrite d’année en année, pourquoi en serait-il différemment cette fois ?
Par ailleurs, les collectivités territoriales pourront instaurer, à compter du 1er janvier 2020, une exonération de cotisation foncière des entreprises, de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au profit des petites activités commerciales dans les territoires ruraux (petites communes ayant encore moins de dix commerces et non intégrées à une aire urbaine) et dans les zones d’intervention des communes ayant signé une convention d’opération de revitalisation de territoire.