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Ecrit le 27 avril 2021
Une pétition circule en ce moment au sujet du forçage génétique. c’est quoi ça ?
c’est une technique de modification des gènes des êtres vivants.
Les gènes jouent un rôle important car ils déterminent les caractéristiques d’une personne. Par exemple, notre apparence physique (avoir des cheveux bouclés ou raides, ou des yeux de telle ou telle couleur) est due à nos gènes.
Les gènes sont faits d’ADN. l’aDN ressemble à deux longs fils (qu’on appelle des « brins d’ADN ») qui s’enroulent entre eux en formant une double hélice. Un chromosome est un élément microscopique constitué d’une molécule d’ADN et de protéines. Il porte les gènes. Chaque gène contient de l’information génétique précise.
Une cellule humaine contient 23 paires de chromosomes (soit 46 chromosomes), 22 paires sont communes aux deux sexes : les deux chromosomes restants sont les chromosomes sexuels. Chez la femme, ce sont deux chromosomes X. Chez l’homme, ils sont différents, l’un est un chromosome X et l’autre, beaucoup plus court est appelé chromosome Y.
Actuellement, les lois naturelles de l’hérédité sont celles-ci : il y a une chance sur deux que le chromosome de notre mère ou de notre père soit transmis à notre descendance.
Il existe des mécanismes qu’on a appelé des « ciseaux », qui permettent de couper des fragments d’ADN et d’implanter des gènes exogènes (c’est-Ã -dire venus d’ailleurs). L’idée en elle-même n’est pas mauvaise : il s’agit par exemple d’éradiquer les moustiques vecteurs du paludisme et des insectes ravageurs de cultures comme les mouches Drosophila suzukii.
On peut comme cela modifier des animaux. Il y a même un chercheur chinois qui a modifié des embryons humains.
Tout cela relève un peu du bricolage et de jeux de l’apprenti-sorcier. Sauf que c’est dangereux !
Alors que la probabilité d’hériter d’un trait génétique est normalement de 50 %, les forçages génétiques peuvent augmenter la transmission des gènes à la progéniture jusqu’Ã 100 %. De plus, ces organismes génétiquement forcés sont dotés d’un mécanisme qui force la modification génétique à se recopier indépendamment lors de chaque reproduction. Celle-ci est donc transmise de génération en génération pour finir par se retrouver dans l’ensemble de la ou des populations d’espèces sauvages. L’objectif peut être le remplacement ou même l’extinction d’une population sauvage ou d’une espèce entière.
Les nouvelles techniques d’édition du génome donnent ainsi la possibilité aux firmes qui les maîtrisent de modifier et breveter les abeilles, les bourdons, les papillons et un grand nombre d’organismes sauvages, directement dans leur milieu naturel. Il existe encore des garde-fous. Mais jusqu’Ã quand ? Les producteurs de ces nouveaux OGM tentent d’assouplir les législations européenne et internationale afin de disséminer ces modifications génétiques directement dans la nature. De nombreuses organisations non-gouvernementales, dont POLLINIS, s’inquiètent des risques environnementaux, alimentaires, économiques, éthiques et sociaux, et tentent d’alerter l’opinion publique sur ce sujet fondamental pour l’avenir du vivant.
Les organismes génétiquement forcés ne sont pas récupérables, leur surveillance et leur contrôle dans la nature sont impossibles. Des études au niveau technique montrent que les modifications ciblées opérées sur un gène ont engendré des modifications non désirées, ce qu’on appelle des modifications hors cible ou des effets mosaïques. Et aussi que les gènes modifiés peuvent se transmettre d’une espère à une autre et muter et arriver à des catastrophes comme on le voit avec le coronavirus qui ne cesse de muter et de produire de nouveaux variants.
Chaque individu d’une espèce entretient des relations dynamiques avec son environnement, avec les autres espèces animales ou végétales. On sait que les pesticides tuent les abeilles. Alors les firmes industrielles ont commencé à modifier le patrimoine génétique des abeilles pour qu’elles s’adaptent aux pesticides ! Elles veulent donc gagner sur les deux tableaux : en vendant des pesticides et en modifiant les abeilles. Et qui sait quelles abeilles ils nous préparent ainsi ? Qui sait si elles sauront encore jouer leur rôle de pollinisatrice ? Qui sait si le miel qu’elles fourniront (peut-être) comportera des gènes modifiés que nous consommerons ?
Il est illusoire de penser qu’on peut intervenir sur le génome d’un individu sans interagir avec l’ensemble de son espèce, des autres espèces et plus largement avec l’ensemble du vivant. Modifier un individu, c’est modifier l’ensemble du vivant. Et en fin de chaîne, modifier l’homme !
Utiliser le forçage génétique dans la nature, c’est mettre à disposition de la nature des nouveaux propulseurs de mutations génétiques, pour le meilleur et pour le pire. Le forçage génétique n’est pas une simple entité physique, à la manière des pesticides ou des médicaments : il porte une information qui a des conséquences sur la nature, et cette information est capable, en dehors de notre contrôle, de se modifier, mélanger et se répandre. Un peu comme une phrase qu’on n’aurait pas voulu dire : une fois lâchée, on ne peut la récupérer.
Une fois les séquences de forçage génétique relâchées dans la nature, nous n’avons plus les moyens de les éradiquer.
Le risque que la séquence de forçage génétique nous échappe est réel : il ne doit pas être négligé.
Dans une lettre adressée au vice-président de la Commission européenne, 162 organisations européennes : dont POLLINIS : demandent à l’Europe de maintenir l’encadrement strict des nouvelles générations d’organismes génétiquement modifiés tandis que les lobbys des biotechnologies cherchent au contraire à l’affaiblir. La commission européenne se prononcera fin avril.
Ne laissons pas les abeilles, les papillons et tous les insectes sauvages devenir la propriété des multinationales !
Signez la pétition : urlr.me/w2fRn
Autobiographie d’un poulpe
Connaissez-vous la poésie vibratoire des araignées ? l’architecture sacrée des wombats ? les aphorismes éphémères des poulpes ? Bienvenue dans la « thérolinguistique » , une discipline scientifique majeure du IIIe millénaire qui étudie les histoires que les animaux ne cessent d’écrire et de raconter.
En laissant libre cours à une imagination débordante, Vinciane Despret nous plonge au cœur de débats scientifiques passionnants qu’elle situe dans un futur indéterminé. En brouillant les pistes entre science et fiction, elle crée un trouble fascinant : et si, effectivement, les araignées nous interpellaient pour faire cesser le brouhaha de nos machines ? Et si les constructions des wombats témoignaient d’une cosmologie accueillante, offrant ainsi une formidable leçon de convivialité ? Et si les poulpes, adeptes de la métempsychose, se désespéraient de ne plus pouvoir se réincarner du fait de la surpêche et de la pollution des océans ?
Par cette étonnante expérience de pensée, Vinciane Despret pratique un décentrement salutaire ouvrant la voie à d’autres manières d’être humain sur terre