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Fiscalité : l’OCDE relativise
La Droite le chante en France sur tous les tons : les prélèvements obligatoires sont trop élevés dans notre pays, 45,6 % du PIB en 1999 contre 44,8 % en 1998. Mais voilà du nouveau, qui n’a pas fait l’objet d’une forte popularisation par voie de presse : l’OCDE (organisation de coopération et de développement économique, une organisation qui propose aux gouvernements de ses pays membres un cadre pour examiner, élaborer et perfectionner les politiques économiques et sociales) estime qu’il faut comparer les prélèvements fiscaux, et les reversements sociaux
Prenons un ménage avec deux enfants. Calculons ce qu’il paie en impôt sur le revenu et en cotisations sociales. déduisons de cette somme les prestations sociales diverses (allocations familiales, allocations chômage, etc) : il apparaît alors que le système de « redistribution » à la française, est moins pénalisant que dans d’autres pays (voir carte)
Par exemple, un ménage français (couple marié avec un seul salaire et deux enfants) subit une pression fiscale de
– 8,5 % au Japon
– 15,0 % en France
– 16,7 % en Angleterre
– 17,8 % au Canada
– 20,9 % en Allemagne
Le mirage anglais
Le régime britannique s’avère intéressant pour les entreprises parce que le taux maximal d’imposition sur les bénéfices est le plus bas d’Europe, et parce que la part patronale des charges sociales n’est que de 12 % du salaire brut contre 40 % en France. (mais attention, si les entreprises paient moins de charges sociales, c’est parce que, en contrepartie, les ménages britanniques reçoivent moins de prestations sociales).
En ce qui concerne les particuliers, le système anglais est avantageux pour les hauts revenus, puisque le taux maximum d’imposition est de 40 % au lieu de 54 % en France et puisqu’il n’existe pas d’impôt de solidarité sur la fortune. Mais ce n’est qu’Ã condition de disposer d’un revenu de 1 200 000,00 F au minimum, qu’un célibataire est avantagé en Angleterre. Pour les couples mariés, c’est au-dessus de 1,6 million de francs par an que le système anglais devient avantageux.
Un revenu à cette hauteur correspond à un salaire de 130 000,00 F par mois. Vous en connaissez beaucoup qui gagnent ça en France ?
Pas de quotient familial
Il faut ajouter de plus, que les Anglais n’ont pas les abattements de 10 % et 20 % dont bénéficient les Français, ni de système de quotient familial. Ce qui fait que les petits revenus, en Angleterre, sont plus imposés qu’en France. Les charmes fiscaux de l’Angleterre ont fait, paraît-il, pas mal de déçus et le nombre de Français rapatriés les poches vides a doublé en 1999.
+ 35 %
Ce qu’on « oublie » de dire, aussi, c’est que le coût de la vie est 35 % plus élevé en Angleterre qu’en France. Les loyers sont trois fois plus chers qu’Ã Paris. Les écoles publiques et les hôpitaux publics sont gratuits, mais de qualité souvent médiocre, ce qui oblige à recourir au privé. Une école privée anglaise c’est 50 000 F par an. De plus, il n’y a pas d’école maternelle publique : les parents doivent payer pour mettre les petits dans des écoles privées. Les médecins privés en Angleterre ont des consultations à 500 F.
Finalement, le scandale monté par quelques journaux sur la prétendue évasion fiscale de Laetitia Casta, n’a été qu’un moyen de plus de modeler l’opinion publique pour pousser le gouvernement à baisser les impôts.
Encore une fois, c’est ceux qui n’ont pas grand chose à y gagner qui font pression pour que les plus gros revenus paient moins d’impôts.
C’est bien sympa ! mais injuste.
Ecrit en 2000 :
Hong-Kong and Shangaï Banking Corporation (ou HSBC si vous voulez) : le Crédit Commercial de France (CCF), septième banque de France, vient d’être racheté, au prix fort, par ce géant britannique. Cela a fait moins d’histoires que la résidence provisoire du top-modèle Laetitia Costa à Londres.
Le CCF est une petite banque, une banque d’affaires, choisie par des clients haut de gamme, une banque régulièrement rentable, dont le bénéfice en 1999 était en progression de 41 % par rapport à celui de 1998. Et la voilà qui passe sous contrôle britannique. Oh certes, pas pour rien : 72 milliards de francs, un prix qui représente plus de 3 fois la valeur de l’actif du CCF. L’acquéreur, la HSBC, est la première banque européenne et la deuxième banque mondiale. Elle pèse 10 fois plus lourd que le CCF.
Ce premier rachat d’une banque française par une banque étrangère pourrait être suivi d’autres. Et ce, dans l’indifférence, ou dans l’impuissance des politiques qui paraissent de plus en plus dépassés par les grands mouvements de concentration et de fusion qui secouent l’économie mondiale.
Pendant longtemps le secteur bancaire a été considéré comme aussi stratégique que la défense. Mais il se trouve que les banques françaises sont trop petites, paraît-il, face aux mastodontes internationaux. Des alliances franco-françaises ont échoué comme par exemple le projet de rapprochement Société Générale/BNP/Paribas (1). La même chose s’est produit dans d’autres pays. Par exemple, malgré les protestations du gouvernement portugais, la banque portugaise Champalimaud a été rachetée par l’Espagnol BSCH. Et puis le récent échec de la fusion de deux banques allemandes, la Dresdner Bank et la Deutsche Bank, pourrait déboucher sur l’achat de la Dresdner par des géants américains ou suisse.
Une à une les résistances nationales sont vaincues, la globalisation (mondialisation comme disent les Français) est en marche, à lourds pas de géants, et les politiques de tous les pays sont réduits à jouer les petits Poucet qui sèment des cailloux blancs dans une jungle de plus en plus épaisse. désormais la politique ne se fera plus à la tribune (de l’Assemblée Nationale) mais à la corbeille (de la Bourse) et ce ne sera même pas la Bourse de Paris puisque les Bourses de Paris, Bruxelles et Amsterdam vont fusionner d’ici la fin de l’année
Tout ceci est la conséquence de l’abandon de la Banque de France, de la privatisation des banques françaises. D’aucuns se réjouissent de la fin de ce qu’ils appellent « un nationalisme bancaire frileux » et de « l’esprit d’ouverture et de modernité » que manifeste ce rapprochement bancaire. D’autres pourront craindre de voir, définitivement, tirer un trait sur leurs désirs de construire une économie au service de l’homme. Ces désirs deviennent de plus en plus des rêves. La réalité est autrement plus forte. Elle sera sans doute autrement plus féroce. Les citoyens qui se trouvent déjà éloignés des décisions qui les concernent, vont être de plus en plus des pions sur un échiquier international « friqué » et déshumanisé.
Pour qui sont ces millions qui sifflent sur nos têtes .
De cette situation, on ne sortira pas en laissant aux seules « élites » le soin de mener la barque. La sujétion du politique à l’économique (au financier) est devenue telle que seule peut l’enrayer l’irruption dans le jeu des peuples qui en sont les victimes. Comme à Seattle.
Profits records dans les banques
L’année 1999 a été bonne pour les banques françaises, un record même. Voici en effet, d’après La Tribune, les bénéfices engrangés
– Société Générale : + 85 %
– BNP-Parisbas + 52 %
– Crédit Commercial de France + 41 %
– Crédit Agricole + 26 %
– Crédit Mutuel + 20 %
Quant au Crédit Lyonnais, il a multiplié par 3,4 son bénéfice net de l’an dernier
La rentabilité sur fonds propres varie de 9,8 % à 19,1 % :
– Société Générale : 19,1 %
– BNP-Parisbas 14,2 %
– Crédit Commercial de France 15,0 %
– Crédit Agricole 11,6 %
– Crédit Mutuel 9,8 %
– Crédit Lyonnais 10,3 %
L’année 2000 promet d’être du même acabit.
Malgré sa capitalisation boursière de 242 milliards de francs, le « géant » français BNP-Paribas n’est qu’au dixième rang européen, notamment devancé par les deux banques espagnoles BBVA et BSCH.