Les fichiers du Ministre .... ou les vases communicants ?
Oh Sarko ! Si ! Si ! La République est riche ! Le Ministère de l’intérieur ne lésine pas sur les dépenses. Voici une petite histoire, vraie évidemment.
Une famille, le père la mère et trois enfants en bas âge, a quitté Châteaubriant pour aller vivre à Erbray. Elle a fait un changement d’adresse à la Poste. Quelle ne fut pas sa surprise de recevoir, en date du 21 octobre 2003, une lettre, deux lettres, ...cinq lettres, chacune timbrée à 0,42 € (coût 2,10 €). Cinq lettres identiques à la même personne.
A la trace ?
A l’intérieur, une lettre fort aimable disant : « Vous avez récemment déménagé et vous avez signalé votre changement d’adresse à la Poste. Mais avez-vous pensé à vous inscrire sur les listes électorales » . Tiens donc, le fichier des changements d’adresse est passé de La Poste au Ministère de l’Intérieur ? On est donc suivi à la trace ?
La lettre continue : « pour faciliter votre inscription sur la liste électorale, vous pouvez en faire la demande par courrier ». Sont joints alors un formulaire d’inscription, et une enveloppe pré-payée. Cinq lettres, cinq enveloppes. coût minimum : encore 2,10 €.
Mais pourquoi cinq lettres ? « Ce courrier vous est adressé en autant d’exemplaires que de personnes composant votre foyer ». En l’occurrence : deux parents, trois enfants : cinq lettres ! Ainsi l’état-civil de la personne qui a changé d’adresse est monté jusqu’au Ministère de l’Intérieur ? décidément, on est suivi à la trace. La lettre émane pourtant du « Ministère de l’intérieur, de la sécurité intérieur et des libertés locales »... y compris des libertés individuelles ?
Continuons la découverte : le fameux formulaire est à renvoyer à Rodez, à la société Inforsud Editique avec laquelle le ministère de l’intérieur a sûrement passé un marché. Ca ne doit pas être gratuit.
Ensuite, la société de Rodez doit renvoyer le formulaire à la mairie d’Erbray, du moins si la personne a bien mis son formulaire « de manière à ce que les informations ci-contre apparaissent dans le fenêtre ». coût : encore 2,10 € ? Au moins 6 € pour obtenir une inscription sur liste électorale. Multiplié par le nombre de personnes (5 millions, dit-on !) qui ont déménagé dans l’année. On ne se refuse rien !
Cette histoire n’est pas isolée. Un couple qui a déménagé de Châteaubriant à Châteaubriant a reçu le même type de lettre.
Le fichage des empreintes de tous les Français est envisagé
Le ministère de l’Intérieur, sous prétexte de simplification des démarches administratives, souhaite adopter une technique simple permettant d’identifier les citoyens : empreinte digitale, iris de l’Å“il ou autre. Officiellement, cette administration numérique et « dématérialisée » doit être opérationnelle dès 2006.
L’usage de ces technologies pose de redoutables questions d’éthique, d’atteinte aux libertés des individus. C’est du fichage pur et simple, une « traçabilité » des personnes. A partir d’une simple empreinte digitale laissée sur un verre, on pourrait reconstituer l’histoire et l’itinéraire de chacun ! Il existe des puces à radiofréquence qui peuvent être lues à distance (entre quelques centimètres et un mètre) : ouvrant ainsi la voie au contrôle d’identité à distance et à l’insu des personnes contrôlées. Il serait ainsi possible de savoir qui a participé à telle manif ou à telle réunion.
Le développement d’une administration électronique est une nouvelle menace pour l’avenir
Fichage et licenciement
A plusieurs reprises La Mée a attiré l’attention de ses lecteurs sur les libertés en danger, du fait des lois sécuritaires Perben-Sarko-and-Co. On en voit déjà les premiers effets.
Jusqu’Ã maintenant, dans certaines professions (gardiennage par exemple), l’entreprise devait demander l’agrément de la préfecture pour chacun de ses salariés. L’administration consultait alors le casier judiciaire. Mais depuis la loi Sarkozy du 18 mars 2003, l’administration se réfère aux fichiers de la police, notamment le STIC (système de traitement des infractions constatées, mis en place par Charles Pasqua en 1995 et légalisé par Lionel Jospin en juillet 2001). Or celui-ci enregistre pêle-mêle les auteurs d’infractions, les témoins et même les victimes, quelle que soit la gravité de l’affaire, jusqu’Ã 40 ans, y compris pour les affaires ayant abouti à un non-lieu ou à une relaxe.
Quatre salariés de la centrale nucléaire de Flamanville, malgré un CASIER JUDICIAIRE VIERGE ont ainsi été refusés par la préfecture de la Manche, et licenciés par leur employeur, sans indemnité ni préavis, malgré des années d’activité dans l’entreprise (5 ans pour l’un d’entre eux) . « Il suffit d’une plainte déposée contre vous, même sans aucune preuve » dit le délégué CGT de l’entreprise. Même un retrait de permis est indiqué sur le STIC.
Après protestation, la préfecture est revenue sur sa décision, démontrant ainsi le peu de fiabilité de la procédure. « Il s’agit d’une erreur d’appréciation au regard de mentions peu claires inscrites dans ce fichier » dit le cabinet du préfet de Saint Lô « Nous devons garder à l’esprit que les informations du Stic sont incomplètes. » ajoute-t-il mais l’entreprise n’a pas réintégré les salariés pour autant !
(affaire révélée par l’Humanité du 10 août 2004 et reprise par Ouest-France)
Victime et fiché
Dans sa conférence de presse du 22 juin 2004 la CNIL (Commission nationale Informatique et libertés) fait le point sur les fichiers de police.
Au cours de l’année 2003, la CNIL a réalisé des vérifications dans les fichiers de police STIC : parmi les 231 personnes signalées en tant que mises en cause, 53 signalements ont été supprimés (soit 23% des vérifications effectuées)
Quelques exemples :
Un jeune était référencé dans les fichiers de la police depuis l’âge de 16 ans au seul motif qu’il était en possession d’un canif lors d’un contrôle d’identité.
Une personne âgée était fichée dans une affaire de vol à main armée avec séquestration alors qu’elle était ... la victime.
Une personne était signalée dans une affaire d’escroquerie datant de 20 ans dans laquelle elle n’était que témoin.
Un requérant était signalé dans le STIC comme mis en cause dans une affaire d’usage de stupéfiant. En réalité, il avait été entendu dans le cadre de la mise en examen d’un ami
Une personne était signalée pour une condamnation à 10 mois de suspension de permis de conduire alors qu’il a été établi par la suite qu’il y avait eu usurpation d’identité.
La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), dans un communiqué du 13 août 2004, a réaffirmé ses craintes face à la consultation du Stic. Son président, le sénateur Alex Türk, insiste sur « la nécessité, pour les autorités responsables des fichiers de police concernés, de faire preuve de la plus grande vigilance dans l’enregistrement des données et de la plus grande célérité dans leur mise à jour ». Voeu pieu dans une société qui cherche à régler tous les problèmes sociaux par la punition des plus défavorisés.
Voir à ce sujet le livre : « la machine à punir » (Ed. l’esprit frappeur)
Dingo chez les flics
Jeudi 18 mai 2006, le parquet de Meaux, en Seine-et-Marne, a placé sous mandat de dépôt deux gendarmes retraités, devenus détectives privés, qui recueillaient illégalement des informations tirées des fichiers STIC de la police et les revendaient à la société Eurodisney qui s’en servait pour faire le tri parmi les candidats à l’embauche...
Les ex-gendarmes, pour avoir accès aux fichiers, passaient par un gendarme, en activité lui, du centre technique de la gendarmerie nationale de Rosny-sous-Bois. Les enquêteurs ont pu établir au moins 2 500 « incursions » dans ces fichiers. Eurodisney payait pour chaque renseignement. La pratique aurait duré de 1998 à 2004. La CFDT de l’entreprise compte se porter partie civile.
Le STIC est un gigantesque fichier qui recense toutes les informations concernant les personnes mises en cause dans des procédures judiciaires, coupables ou ... innocentes, .... ainsi que celles des victimes. Ce fait a été dénoncé par la commission « Informatique et libertés ».
Un exemple de fichage .... périmé. Et pourtant ....

Note du 28 novembre 2008
Fichage prénatal
Le nouvel entretien psychosocial du 4e mois de grossesse part d’une bonne intention : donner aux femmes enceintes un espace de dialogue pour exprimer d’éventuelles difficultés. Mais « on peut se demander ce que fait la période prénatale dans une loi sur la protection de l’enfance » fait remarquer Christine Davoudian, médecin « Si une femme déclare qu’il s’agit d’une grossesse non désirée, va-t-on la considérer comme dangereuse ? La parentalité est bien plus complexe et la relation de la mère avec son futur bébé se tisse progressivement. Rien n’est figé. Surtout pas au quatrième mois ! Pourquoi alors tout miser sur un entretien dit » précoce « alors que les sages-femmes font un travail plus efficace sur la durée ? ».
Des syndicats de professionnels craignent que la fiche écrite soit lue par une personne autre que le professionnel auquel elle était destinée. (source : Convergence, revue du Secours Populaire , novembre 2008 page 15)
Ecrit le 24 juin 2009
Le fichage des enfants en France ?
Dans son arrêt du 11 juin 2009, le comité des Droits de l’enfant de l’ONU, critique la multiplication des bases de données, dans laquelle les données personnelles des enfants sont recueillies, stockées et utilisées pour une longue période, ce qui s’accorde mal avec le droit des enfants et de leurs familles à la vie privée. En ce qui concerne la « Base élèves » utilisée à l’école primaire, le comité craint que cette base de données soit utilisée à d’autres fins : détection de la délinquance, repérage des enfants migrants en situation irrégulière. Il est en outre préoccupé par le fait que les parents ne peuvent pas s’opposer à ce fichage, ne sont souvent pas informés de l’enregistrement de leurs enfants et peuvent être réticents à les inscrire dans les écoles.
Source : http://www2.ohchr.org/english/bodies/crc/docs/co/CRC-C-FRA-CO-4.pdf
Base élèves
Communiqué commun FCPE /LDH
Paris, le 22 juin 2009
Base élèves : le gouvernement fortement interpellé par l’ONU
La FCPE et la Ligue des droits de l’Homme se réjouissent des nombreuses réserves exprimées par le Comité des droits de l’enfant de l’ONu à propos du fichier « base élèves ». Le comité, dans son avis prononcé le 11 juin, s’est notamment dit préoccupé par « l’insuffisance de dispositions légales propres à prévenir son interconnexion avec les bases de données d’autres administrations ».
Le comité de l’ONU présente deux exigences : que les parents aient un droit de rectification et d’effacement du fichier et que les accès à celui-ci soient véritablement sécurisés. Ce sont précisément les demandes portées depuis des mois par les parents d’élèves et les défenseurs des droits de l’Homme.
C’était le sens du courrier adressé au ministre de l’Education nationale le 23 mars dernier et signé par plusieurs associations et syndicats d’enseignants (dont la FCPE et la LDH), courrier auquel les services du ministère ont répondu de manière très insatisfaisante et sans aucun engagement.
La FCPE et la LDH se sont toutes deux inquiétées lors de leurs derniers congrès des orientations gouvernementales à l’égard de la jeunesse (stigmatisation, fichage, diminution de moyens pour l’Education nationale).
Elles demandent instamment au gouvernement d’entendre les exigences formulées par le Comité des droits de l’enfant de l’ONU et de prendre des mesures en conséquence. Au moment où l’on s’apprête à fêter le 20e anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, la surdité du gouvernement à ce sujet serait un très mauvais signe.
Pour le Retrait de la base élèves
Contacts presse :
FCPE , Laurence Guillermou, 01 43 57 16 16, fcpecom@fcpe .asso.fr
LDH, Pavlina Novotny, 01 56 55 51 07, communication@ldh-france.org
Le rapport de la CNIL :
– http://www.cnil.fr/fileadmin/documents/approfondir/dossier/Controles_Sanctions/CNIL-Conclusions%20des%20controles%20STIC.pdf