Ecrit le 11 janvier 2014
défendre les libertés
Les journalistes de Charlie Hebdo, mercredi 7 janvier 2015, ont été l’objet d’une exécution systématique : 12 morts, Cabu, Charb, Wolinski, Tignous, Honoré, Bernard Maris. deux policiers, un agent d’entretien, un visiteur, une psychanalyste, un correcteur. En comptant ceux qui sont morts lors des prises d’otages à caractère antisémite qui ont suivi, on arrive à 20 morts en trois jours, 17 victimes, 3 agresseurs). Intolérable
« Des journalistes assassinés et c’est la liberté de toute la presse qui est visée et, à travers elle, toutes les libertés » dit Acrimed.. Dans un communiqué commun, diverses revues affirment : « Eh bien, nous le disons : nous ne céderons pas. Dans les temps difficiles d’aujourd’hui, et les jours sombres qui se profilent, il est vital que la liberté continue, s’exprime, s’affirme. Nous continuerons notre travail d’information et de témoignage, avec encore plus de détermination et d’énergie que jamais » (Signé par Politis, Terra Eco, Rue 89, Reporterre et d’autres, auxquelles La Mée s’associe)
’’Tu résistes à la terreur religieuse, tu meurs.
Tu lèches le cul aux intégristes, tu meurs.
Prends un obscurantiste pour un abruti, tu meurs.
Essaie de débattre avec un obscurantiste, tu meurs.
Il n’y a rien à négocier avec les fascistes.
La liberté de nous marrer sans aucune retenue,
la loi nous la donnait déjà ,
la violence systématique des extrémistes nous la donne aussi.
Merci, bande de cons."
Charb - octobre 2012
Charb ne rira plus mais il nous laisse ce message et, de là -haut, s’il y a un au-delà , Cabu, Charb et les autres, doivent apprécier la situation : les cloches de Notre-Dame sonnant pour leur mort, alors même qu’il y a 30 ans, ils étaient en butte aux intégristes cathos ! Et, qui sait, ils nous envoient peut-être un dernier message d’humour, par le dessin de Gee, tant il est vrai que l’humour est un défi à l’obscurantisme.
Face à la barbarie, c’est l’encre qui doit couler, pas le sang (slogan de la journée de la liberté de la presse 2011). Les communiqués de soutien se sont multipliés. Ainsi nous sont parvenus : Conseil Général, Conseil Régional, Union démocratique Bretonne, Europe-Ecologie, Front de Gauche, Ensemble, Amnesty International, Michèle Meunier, Yves Daniel, Châteaubriant au cœur, Bretagne réunie, Grande Loge de France, Attac et même un communiqué des Palestiniens de Beit Ommar. Trop long à tout citer. Ces communiqués figurent sur notre site internet
Rassemblements
Dès mercredi soir 7 janvier, et de façon militante, un rassemblement a eu lieu à Châteaubriant : à partir de 18h, 300 personnes sont venues pour être ensemble, et pour une minute de silence.
La municipalité de Châteaubriant a appelé de son côté pour le 8 février à 12 h et a rejoint à 18 h le rassemblement initié par Amnesty, au théâtre de Verre, qui a attiré un monde considérable, de tous âges.
Une manifestation immense a eu lieu à Nantes le 10 janvier.
D’autres manifestations ont eu lieu à Jans et Nozay le 11 janvier et même, à Châteaubriant, un important groupe de jeunes a rassemblé des jeunes issus de la communauté turque.
Des manifestations artistiques ont été suspendues. Un lecteur nous écrit : « Les événements nous ont frappé durement tous. Il est 4 h passées et je n’arrive pas à dormir. Je suis submergé de sentiments contradictoires de profonde tristesse et d’incompré-hension. Je voudrais vous dire que je n’ai pas les conditions subjectives pour animer la soirée-photo prévue, d’autant plus qu’il faut laisser la place au recueillement et à la mobilisation ». Le cinéma a diffusé le film « Caricaturistes, fantassins de la liberté ».
Un internaute, Joachim Roncin, 39 ans, a créé le slogan « Je suis Charlie » qui, depuis, a été repris 5 millions de fois à travers le monde, signe de ralliement et de soutien aux caricaturistes assassinés.
Un jeune chanteur, JM Bullet, a créé une chanson, reprise 6 millions de fois. " Même si j’ai envie de crier aux armes, je mets pas tout le monde dans le même panier. C’est en partant d’un amalgame, qu’on fabrique des croix gammées. Mais j’ai pas peur, je suis Français ! Et c’est debout que tu vas me trouver. Contre toi je lève mon stylo, je suis aussi Charlie Hebdo ".
Partout en France l’émotion est palpable (l’inquiétude aussi) et de nombreux pays ont apporté leur soutien à notre pays.
S’interroger
L’émotion est le moyen de se mettre en mouvement, mais elle ne doit pas prendre le pas sur la réflexion. Prenons garde aux unions de façade et aux amalgames faciles.
Une lectrice de St Nazaire dit : " il est possible d’exprimer notre horreur vis à vis de l’attentat, notre solidarité avec les victimes et leurs familles, notre attachement à la liberté de la presse sans y ajouter ’’nous sommes tous Charlie’’.
Longtemps lectrice et/ou abonnée, selon l’état de mes finances..., j’ai cessé d’acheter Charlie parce que je ne supportais plus Val, pas plus que l’islamophobie même pas rampante, mais parfaitement assumée... de Caroline Fourest ni son soi-disant féminisme... () Je pense que l’exigence de liberté de la presse, le droit à la caricature, à l’humour... ne peuvent exonérer des journalistes de la réflexion sur les conséquences potentielles de leurs initiatives tant sur le vivre ensemble dans nos différences, que sur les capacités à dialoguer, se respecter... Le crayon, le stylo sont des armes, pacifiques oui, mais ils peuvent aussi attiser la haine.
Enfin je me méfie tout particulièrement de ceux qui, tous en chœur depuis mercredi, alors que leurs pratiques sont très souvent aux antipodes du respect de la liberté (et pas seulement religieuse ou de la presse), concoctent en ce moment une jolie petite opération d’unité nationale dans l’espoir, au moins pour certains, d’en tirer des bénéfices électoraux. « Les risques d’amalgames sont importants. L’attentat a été le fait de jeunes Français musulmans, endoctrinés, embrigadés dans le Djihadisme. Alors on entend des responsables politiques demander aux musulmans de France de se désolidariser de cet acte terroriste. n’est-ce pas là sous-entendre qu’ils seraient par défaut favorables à ces actes de terreur ? » Cela va encore retomber sur nous " a dit une jeune femme turque de Châteaubriant. Un élève de l’école primaire en a dit autant. Combien de temps allons-nous stigmatiser une population au nom de sa religion au risque de faire le jeu des intégristes et obscurantistes qui cherchent à créer la guerre au sein de nos démocraties ?
Alors que le glas de Notre-Dame de Paris et de plusieurs autres cathédrales et églises sonnait dans un recueillement poignant, la quinzaine de responsables religieux, musulmans, chrétiens, juifs et bouddhistes rassemblés à la Grande Mosquée de Paris ont observé une minute de silence. Et appelé à la manifestation du dimanche 11 janvier à Paris.
Note du 11 janvier 2015
je manifesterai, le cœur et la colère gros, mais...
Les monstres qui ont commis ce crime inqualifiable au siège de Charlie Hebdo, l’hebdo insoumis, provocateur, antiraciste, humaniste (mais qui fut injuste envers ce site où j’écris), sont des hommes formatés par des courants religieux fascisants, par des Etats théocratiques « fondamentalistes », « amis de la France », pour faire taire l’esprit critique, l’humour, l’anticonformisme, la pensée libre, la laïcité, la création sans rivages... Ils n’ont aucune excuse.!
J’ai du mal à concevoir que des hommes aient pu à ce point s’aliéner, s’avilir, se fanatiser, se
laisser manipuler, s’animaliser, pour produire une telle barbarie.! Je suis en deuil. Le crime de ces assassins vise notre République, celle des Lumières, du contrat social, des droits de l’homme, de l’égalité entre eux, de la liberté pleine et entière... Cette « gueuse » que sociaux-démocrates et néolibéraux n’ont de cesse, depuis plus de trente ans, de dépecer, de
démonter, d’affaiblir par l’explosion des inégalités, le communautarisme, l’instrumentalisation du racisme, la concurrence à tout crin, par le rabougrissement de l’Etat, la multiplication des brisures sociales, la ruée contre les services publics et les biens communs, la casse de l’ascenseur social scolaire, jadis intégrateur, la pratique de l’amalgame délétère « Islam = terrorisme » , le « no future » pour des millions de jeunes Français, quelle que soit leur origine.!
Et on voudrait aujourd’hui que je défende, au nom de la douleur, ma République sociale et
démocratique bras-dessus bras-dessous avec ses fossoyeurs, avec ceux qui, à force de déifier le marché, de le débrider toujours plus, de tout marchandiser, de dépolitiser, ont laissé le champ libre aux intégrismes de toutes sortes .
Oui, je crois à la nécessaire, à l’urgente unité populaire et républicaine, mais avec tous les Républicains sincères, tous ceux qui partagent ces valeurs de base, la tolérance, l’ouverture à l’autre, la justice sociale, le débat sans corsets, la liberté sans demi-mesure, et notamment celle des médias ; oui, je crois à l’unité avec tous ceux qui défendent le pluralisme de l’information..... pas avec les hypocrites qui pleurent aujourd’hui sur la République menacée et qui n’ont cessé d’attiser les haines raciales, les vieilles peurs, de stigmatiser l’autre, de détruire toute espérance progressiste...!
qu’ont-ils fait pour éradiquer la Bête ?!
Que viennent-ils pleurnicher aujourd’hui sur la liberté de la presse alors que Charlie Hebdo était sur le point de déposer le bilan, que le pouvoir rend chaque jour la vie plus difficile, par des dispositions mortifères à « l’Humanité », au « Monde Diplomatique » ? De quelle liberté
d’information parle-t-on ? De celle sous la coupe des marchands d’armes, des bétonneurs, des chiens de garde de l’oligarchie, du latifundium médiatique désinformateur, de la pensée unique et cynique.!
Oui, je crois à l’unité populaire et républicaine face à la barbarie, mais avec tous ceux qui
consacrent beaucoup d’énergie à solidariser, à « faire pays » quand les autres l’atomisent, le livrent à la guerre de tous contre tous, le blessent, le défigurent, en font une jungle. Je me souviens que lorsque Charlie Hebdo nous gratifiait de quelques « unes » décapantes, les moralisateurs venaient faire la leçon à ces « dangereux agitateurs ».!
Alors, oui, je suis en deuil, je l’assume, je le revendique. Il y a danger, il faut se rassembler.
Oui, j’ai mal, mais je ne veux pas partager ce deuil et cette douleur avec ceux qui ont contribué à créer le climat nauséabond et létal qui ronge notre pays depuis des années. Oui, l’islamisme, comme tous les intégrismes, est un danger. Mais qui arme et entraîne ces monstres ? Le Qatar, l’arabie Saoudite, les Emirats, ces Etats voyous, extrémistes, obscurantistes, valets de l’impérialisme français, qui blanchissent les milliards sales dans des paradis fiscaux, garantissent aux multinationales occidentales une chasse gardée pétrolière, piétinent les droits de l’homme et des femmes, combattent les laïques et la gauche... Comment peut-on à la fois s’ériger en gendarme international contre les groupes terroristes, et livrer, par exemple, le Paris-Saint-Germain au Qatar ?!
Alors, oui, je manifesterai, le cœur et la colère gros, mais en prenant soin d’éviter les
infréquentables. Je ne veux pas, je le redis, partager ce deuil et cette douleur avec eux.!
Signé : Jean Ortiz.
Paris, capitale mondiale de la résistance au terrorisme-20150111]
Quatre millions d emanifestants-20150111]