Ecrit le 12 août 2020
Au XIVe et au XVe siècle, la société occidentale traverse une période d’angoisse profonde en raison des nombreuses guerres et épidémies, notamment celle de la peste noire entre 1347 et 1352, durant laquelle l’Europe a perdu presque une personne sur deux. La mort est donc présente en permanence dans les esprits, et la question du salut (c’est-à-dire la vie après la mort) devient fondamentale.
On observe ces craintes dans les œuvres d’art de cette période. Les danses macabres, par exemple, sont la représentation de la proximité entre les morts et les vivants. Elles sont en général peintes sur les murs des églises.
Dans ce contexte, le commerce des indulgences se développe. L’Église catholique affirmait en effet que les pécheurs allaient finir soit en enfer, soit au purgatoire, le purgatoire étant défini comme un état intermédiaire entre le paradis et l’enfer, durant lequel les hommes se pourraient purifier de leurs péchés. Acheter des « indulgences », c’était un moyen d’obtenir la rémission totale ou partielle de ses fautes. Concrètement, il s’agissait donc de payer un curé ou un prêtre pour réduire son temps de séjour au purgatoire.
En plus des crises sanitaires, le catholicisme était secoué, au début du XVe siècle, par l’existence de deux papes. En 1378 en effet, la papauté s’est divisée entre Rome et Avignon : c’est ce que l’on appelle « le Grand schisme d’Occident ».
Quelques années plus tard, en 1409, la papauté de Rome s’est divisée à son tour en deux. Étant donné que le représentant majeur du christianisme traverse lui aussi une crise et que son autorité est affaiblie, il ne peut servir de repère pour des croyants de plus en plus terrorisés par la multiplication de crises, qui sont alors interprétées comme autant de punitions divines.
En 1453, Gutenberg met au point l’imprimerie. Cette invention (qui avait déjà été inventée par les Chinois plusieurs siècles avant), va révolutionner la culture médiévale. Un groupe de réformateurs, c’est-à-dire de personnes s’élevant contre les abus et les dysfonctionnements de l’Église catholique, entreprend alors de traduire la Bible en « langue vulgaire », c’est-à-dire en français, en allemand, en anglais…
Ces premiers réformateurs mettent le doigt sur l’incohérence des hommes d’Église. Dans le texte original, disent-ils, on ne parle ni de saints, ni de culte à la Vierge, ni de purgatoire et encore moins d’indulgences à verser pour le salut des âmes.
C’est en 1483 que Martin Luther naît en Allemagne. Lorsqu’il se fait moine, il est profondément inquiet pour son salut, comme tous les hommes de son époque mais sa réflexion personnelle le conduit en 1517 à s’opposer de manière virulente au pape, qui propose la vente d’indulgences pour financer la construction de la basilique Saint-Pierre de Rome. Il affiche ses 95 thèses sur la porte de la chapelle du château de Wittenberg, en Allemagne. Grâce à l’imprimerie, ses thèses se diffusent rapidement dans toute l’Europe.
- Danse macabre (extrait) Abbaye de la Chaise-Dieu
La réaction du pape face aux thèses de Luther, qui non seulement critiquent ouvertement les abus de l’Église mais dénoncent également des mauvaises interprétations de la Bible, est sans appel. La papauté excommunie Luther en 1520, c’est-à-dire qu’elle l’exclut de l’Église catholique.
Mais plus rien ne peut arrêter le mouvement réformiste. La diffusion massive de ses écrits fait de Luther l’un des auteurs les plus lus du XVIe siècle. Luther trouve refuge chez un prince allemand et continue d’écrire le reste de sa vie. En 1530, il publie la Confession d’Ausgbourg, écrite avec son collaborateur Philippe Mélenchtchon. Celle-ci fixe la doctrine luthérienne.
1- Luther modifie la liturgie, c’est-à-dire les différents rites chrétiens. Il autorise en effet les prières en langue allemande, alors que jusqu’à présent, seul le latin était autorisé, alors qu’il était peu compris par le peuple.
2- Luther condamne certaines pratiques courantes dans le catholicisme. Le culte des saints et des reliques sont ainsi bannis de la réforme protestante, tout comme le commerce des indulgences.
3 - Il s’occupe également de problèmes théologiques complexes, notamment autour de la question de la communion.
Dès 1526, les doctrines de Luther sont adoptées par un certain nombre de princes du Saint-Empire romain germanique, qui deviendra alors le foyer central du protestantisme.
En France, dès les années 1530, une ramification du luthérianisme voit le jour en la personne de Jean Calvin, un humaniste qui se rallie aux idées de Luther, tout en proposant des modifications. Professeur de théologie, puis pasteur, il impose une sévère discipline aux Genevois, rend obligatoire la fréquentation du culte, interdit les danses, et demande aux magistrats de sévir contre les pécheurs. Chassé par la victoire de « libertins » aux élections de 1538, il quitte Genêve pour s’installer à Strasbourg mais revient triomphalement à Genêve en 1541 où, avec le soutien de l’État, il est chargé de veiller au redressement des mœurs et d’organiser une surveillance étroite de la vie privée et publique des citoyens. Il institue à Genève un des premiers systèmes de sécurité sociale, comportant une assurance maladie, vieillesse et invalidité. C’est lui aussi qui se préoccupe de formation professionnelle des jeunes, du « recyclage » des adultes, du contrat de salaire...
C’est autour de l’idée de « prédestination » que le calvinisme se distingue du luthérianisme. La prédestination désigne le fait que Dieu aurait choisi dès l’origine ceux qui iraient en enfer et ceux qui iraient au paradis. Les Calvinistes estiment que l’Homme n’a pas le pouvoir de changer son destin : il est prédestiné. Cette prédestination est cependant « secrète » et aucun homme n’y a accès.
La première réaction de l’Église catholique est la condamnation totale du protestantisme. De nombreux Protestants sont alors arrêtés, jugés par les tribunaux de l’Église puis condamnés. Par l’édit de Châteaubriant, le 17 juin 1551, le roi Henri II, successeur de François 1er, organise la répression : mise à mort avec raffinement de tortures, bûchers. Les « guerres de religion » opposent Catholiques et Protestants entre 1562 et 1598 (date de l’édit de Nantes), puis de 1610 à 1629 (Paix d’Alès). Guerres sanglantes : qu’on se souvienne par exemple du massacre de la Saint-Barthélémy, le 24 août 1572. Ce jour-là le nombre de morts est estimé à 3 000 à Paris, et de 5 000 à 10 000 dans toute la France, voire 30 000.
Toutefois, le pape ne peut pas rester totalement insensible aux critiques des Protestants, surtout lorsqu’il s’agit des débauches notoires du propre personnel de l’Église. Face à la diffusion massive des idées protestantes, le pape décide alors, dans un second temps, de réformer l’Église de l’intérieur. D’abord il crée l’ordre des jésuites. Puis il organise le Concile de Trente (1563) pour récupérer les territoires perdus mais également renouveler la formation des prêtres.
Source : voir le sites choolmouv
Retables
A la suite du Concile de Trente, l’Église incite les paroisses à créer des retables, comme ceux que l’on peut voir, classés, au nord de Châteaubriant. Ces retables matérialisent la volonté de l’Eglise de donner à la liturgie des inspirations nouvelles fondées sur l’émotion et le spectaculaire, la somptuosité de l’iconographie étant destinée à toucher les âmes simples. La prodigalité des ornements, les lumières, les parfums, avaient pour but de convaincre le fidèle, dès son entrée dans l’église, du sublime de la religion (et du bonheur qu’il aurait dans un autre monde). Les représentations de la Vierge, des saints et du purgatoire, remis en cause par le protestantisme, étaient vivement encouragés.
Les retables sont associés à l’idée du triomphe de la religion catholique sur la Réforme Protestante, ils développent trois thèmes : les Pères de l’Eglise, la famille, la Royauté. Un détail : les statues de Saint Michel, terrassant le dragon, avaient le sens très précis de l’église catholique terrassant le dragon … du protestantisme.