Ecrit le 7 juillet 2021
Solidarités alimentaires
Le Conseil de développement Châteaubriant-Derval a engagé depuis le début de l’année, avec des bénévoles, un travail sur « L’Alimentation et la précarité ». La première action du groupe a consisté à aller à la rencontre des acteurs associatifs de l’aide alimentaire pour faire un état des lieux de la situation sur le territoire de la Communauté de Communes Châteaubriant-Derval et découvrir leurs fonctionnements, leurs problématiques
A mi-parcours, il leur a semblé important d’avoir un regard extérieur sur ce sujet. Aussi les recherches-actions menées par des chercheurs-universitaires sur les solidarités alimentaires a attiré leur attention et fait écho aux questionnements du groupe de travail.
" C’est pour cette raison que nous avons invité Julien Noel, docteur en géographie de l’Université de Nantes et actuellement Chercheur en mobilité internationale au sein de l’école d’Agronomie de Gembloux Agro-Bio Tech de l’Université de Liège depuis novembre 2018. Ses recherches sont centrées sur les processus de (re)territorialisation des systèmes alimentaires (notamment alternatifs, de proximité) en lien avec les filières agricoles dans un contexte de mondialisation.
Il nous apportera un éclairage sur les solidarités alimentaires à travers ses connaissances et les initiatives identifiées sur les régions Bretagne et Pays de Loire mais aussi à l’échelle nationale. Cela pourra ainsi nous donner des pistes pour la suite du travail du groupe ".
jeudi 8 juillet : 19h30 - Espace Campagn’Art à Saint Vincent des Landes - s’inscrire au tél 07.83.16.24.81
Ecrit le 16 août 2021
Structures et pratiques de la solidarité alimentaire
Comment les initiatives de solidarité alimentaire permettent-elles un accès à l’alimentation de qualité pour tous/toutes sur les territoires ?
Vaste sujet traité le 8 juillet dernier lors de l’assemblée génerale du Conseil de développement, par M. Julien NOEL, docteur en géographie de l’université de Nantes.
Quand on pense à Solidarité Alimentaire, on pense souvent à Aide alimentaire et plutôt en termes d’assistance que d’ambition d’émancipation, plutôt en termes de quantité que de qualité.
La solidarité alimentaire s’appuie sur différents types de structures autour de deux idées-force :
– Distribuer l’aide alimentaire
- Alimentation saine et sûre
- Intégration sociale.
– démocratiser les circuits courts
- Sur-représentation de populations
aisées
- Accessibilité au-delà de la précarité économique
Bien sûron pense généralement aux circuits courts : vente directe de produits bruts, ou transformés, par le producteur lui-même, ou vente à un intermédiaire, qu’il soit collectif (AMAP, cantines, etc) ou individuel (restaurateurs, commerces détaillants). Ces circuits courts alimentaires connaissent bien les risques d’essoufflement et les multiples compétences qu’il faut mettre en œuvre sans compter les difficultés d’accès aux capitaux et les problèmes de contrôle fiscal. La vente directe se répand pourtant, 15 % des producteurs nationaux pratiquent la vente directe et, pour près de 40% des agriculteurs engagés en circuits courts cette vente représente 75% de leur chiffre d’affaires.
précarité alimentaire : situation d’instabilité (d’insécurité, de vulnérabilité) dans laquelle une personne ne dispose pas d’un accès garanti à une alimentation suffisante et de qualité, durable, dans la dignité et le respect de ses préférences alimentaires et de ses besoins nutritionnels, pouvant entraîner ou découler de l’exclusion et de la disqualification sociale ou d’un environnement appauvri. La précarité économique a des conséquences importantes en matière de lien social : passage obligé par des structures de contrôle, pouvoir d’agir contraint, assignation à la distribution de produits alimentaires : les plus démunis, les plus jeunes, les personnes âgées, les personnes hospitalisées, les personnes en détention ne sont plus maîtres du contenu de leur assiette.
l’aspect « justice sociale » est fondamental : au-delà de l’accès de tous à une alimentation de qualité sur les plans sanitaire et nutritionnel, il s’agit de préserver et de promouvoir le modèle alimentaire français comme facteur essentiel de lien social et de réaffirmer la nécessité du temps du repas. Cette solidarité s’incarne également dans le plan de lutte contre le gaspillage alimentaire.
Des expériences de recherche-action ont vu le jour en Bretagne. Julien Noë l a cité :
– le projet Solalter (2013-2015)
SOLidarités ALimentaires TERrito- rialisées en Bretagne
– le projet réaliste (2019-2021) REconnexion Agriculture-aLimentation : l’Innovation Sociale comme levier pour la Transition vers des pratiques alimentaires plus Ecologiques
Solalter
Le projet Solalter a identifié les dynamiques territoriales existant en Bretagne avec pluralité de lieux : grandes agglomérations, villes moyennes, milieu rural : pluralités des acteurs : associatifs, collectivités, individus, entreprises— pluralité de types : groupements d’achat solidaires (AMAPs, marchés), épiceries (sociales, solidaires), jardins collectifs (partagés, insertion). Pour ces structures, six critères ont été analysés :
– la variété des produits et l’importance des produits locaux.
– la variété des acteurs impliqués
– la taille et l’ancrage de l’initiative ,
– le degré d’autonomie à l’égard des soutiens publics,
– le degré de participation économique du bénéficiaire,
– le degré d’inclusion sociale des bénéficiaires.
Dans tous les cas, des partenariats sont à développer : échanges entre structures (logistique, formation, réglementation), appui du réseau à plusieurs échelles, visibilité et communication.
Des moyens humains sont nécessaires : implication des collectivités : Moyens humains : élus, travailleurs sociaux : Moyens financiers : soutien de l’initiative : Moyens logistiques : mise à disposition de terrains / locaux / véhicules.
Sans oublier la nécessaire sensibilisation / éducation à l’alimentation, par la pratique : jardinage, achats, cuisine : et par offre diversifiée de produits de proximité et de qualité. La considération apportée au public s’appuie sur la convivialité (qualité des locaux, qualité de l’accueil), Implication-participation active vectrice d’intégration et activités annexes : loisir, bien-être, accompagnement administratif
réaliste
Le projet réaliste, s’est intéressé aux PAT : Programmes alimentaires de territoire.
Un PAT est en préparation à la Communauté de Communes Châteaubriant-(Derval mais on n’en sait pas grand-chose !
Les PAT « visent à rapprocher les producteurs, les transformateurs, les distributeurs, les collectivités territoriales et les consommateurs et à développer l’agriculture sur les territoires et la qualité de l’alimentation » .
Les PAT sont élaborés de manière concertée avec l’ensemble des acteurs d’un territoire et répondent à l’objectif de structuration de l’économie agricole et de mise en œuvre d’un système alimentaire territorial. Ils participent à la consolidation de produits issus de circuits courts, en particulier relevant de la production biologique.
Le projet réaliste s’est intéressé plus particulièrement à la dimension sociale des PAT sous l’angle justice sociale ou sur l’angle : lutte contre la pauvreté avec des dispositifs singuliers : groupement d’achats en produits locaux
â– jardins collectifs nourriciers
â– échanges de pratiques & formation
â– Forum de la Dignité dans les assiettes !
â– Charte de bonnes pratiques
Autres actions
De nombreuses autres formes d’action existent, citons :
– les épiceries sociales et solidaires, qui veulent promouvoir l’accès des personnes en difficulté à une véritable citoyenneté économique " : en permettant à un public exclu des circuits de consommation traditionnels de choisir les produits qu’il souhaite consommer, en vendant, à un faible prix, des denrées de qualité ; en proposant des activités où les compétences de chacun sont mises en avant, au-delà d’une aide matérielle, un outil de reconstruction et un tremplin vers une réinsertion durable
– le projet léris : laboratoire d’études et de recherche sur l’intervention sociale,
– le projet Frugal : Formes urbaines et gouvernance alimentaire qui concerne notamment les aires urbaines de Nantes, Rennes, Angers.
Tous ces projets sont un moyen de.
- de permettre à tous d’avoir accès à une alimentation choisie
- de retrouver du lien et du mieux-être social, dans des lieux de rencontres (jardins, cuisines)
– de révéler une multitude de bonnes pratiques.
Les différents confinements imposés l’an passé ont plongé de nombreux Français dans la précarité malgré les filets de sécurité déployés par le gouvernement. Etudiants privés de petits boulots, indépendants sans revenu, travailleurs précaires ou à temps partiel fragilisés..., nombre d’entre eux ont dû recourir (certains pour la première fois) à l’aide alimentaire pour maintenir la tête hors de l’eau. Alors que le système pour aider les personnes qui ont faim en France n’a pas évolué depuis le lancement des Restos du cœur en 1985, il semblerait que les pouvoirs publics soient enfin prêts à s’ouvrir aux nouvelles formes de solidarité. Espérons ...