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Ecrit le 15 juin 2024
Les votes RN
La stratégie d’institutionnalisation du RN passe aussi par son implantation à l’Assemblée nationale avec 89 députés : une présence inédite qui a au moins le mérite de révéler l’imposture sociale de ces prétendus défenseurs des travailleurs et du pouvoir d’achat. Voici les votes des élus RN depuis 2 ans.
Histoire : Waffen-SS et régime de Vichy
Contenu de l’article de France-Info :
Le Front national (FN ), ancêtre du RN, a bien compté parmi ses premiers membres d’anciens soldats affiliés à l’armée allemande du IIIe Reich et des miliciens pétainistes.
Alors que l’extrême droite se rapproche du pouvoir, après la décision annoncée dimanche par Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale, la gauche s’inquiète de la normalisation du Rassemblement national. « On a aujourd’hui dans le pays une partie de la bourgeoisie, qui jusque-là se disait républicaine, une partie aussi parfois du champ médiatique, qui est tout à fait prête à concevoir que le Rassemblement national arrive au pouvoir », s’est indignée la députée La France insoumise Sarah Legrain, mardi 11 juin sur LCI, les disant prêts « à formuler l’idée que mieux vaut Hitler que le Front populaire ».
Pour justifier cette comparaison entre le Rassemblement national et le dictateur allemand, la députée de Paris a invoqué l’histoire de la formation politique : « Est-ce que je suis en train de dire que le Rassemblement national est un parti qui est l’héritier de Waffen-SS qui l’ont fondé et l’héritier de Vichy ? Oui bien sûr ! », a-t-elle déclaré. « C’est grave comme propos », a réagi Christophe Moulin, journaliste présentateur à LCI.
Elle n’est pas la seule à tenir de tels propos : en 2023, Elisabeth Borne, alors Première ministre, avait rappelé que le RN était « l’héritier de Pétain ». Alors, à quoi fait référence la députée ? Franceinfo fait le point.
La genèse du Front national n’est pas un secret : elle a été largement documentée par des historiens. C’est le 5 octobre 1972 que naît le Front national pour l’unité française, une alliance hétéroclite de groupuscules d’extrême droite autour de la figure de Jean-Marie Le Pen. Le vétéran de la guerre d’Algérie a été choisi par Ordre nouveau, mouvement de jeunes néofascistes, pour prendre le rôle de leader fédérateur, en vue des législatives de 1973.
Il s’agit de présenter une image plus policée de l’extrême droite, qui reste discréditée à cette époque. « On était vraiment dans une violence verbale totalement désinhibée. On voulait ’tuer les métèques’, ’assassiner les communistes’... », rappelle l’historienne Valérie Igounet au sujet d’Ordre nouveau, à France Culture. Sur les conseils d’un cadre du parti néofasciste italien MSI, François Duprat, l’un des cadres d’Ordre nouveau, commence à pratiquer « un fascisme souriant », détaille Nicolas Lebourg, historien, auprès de franceinfo.
« Dans les années 1960-1970, en pleine guerre froide, toutes les familles idéologiques d’extrême droite se rassemblent dans un violent anticommunisme », explique Magali Balent, docteure en science politique et maîtresse de conférence à Sciences Po Paris, à France Culture. La nouvelle alliance est composée de trois tendances politiques : la famille nationale-populiste, les néofascistes et les collaborationnistes. La première est portée par Jean-Marie Le Pen. Marquée par la décolonisation et les événements de Mai-68, elle compte des nostalgiques de l’Algérie française, dont certains engagés dans l’Organisation de l’armée secrète (OAS), comme Roger Holeindre. Ordre nouveau constitue la deuxième. Le mouvement souhaite l’abolition des partis politiques, voire des élections s’il accède au pouvoir.
La troisième composante est celle évoquée par Sarah Legrain : les nostalgiques de la Seconde Guerre mondiale, et plus précisément de la Collaboration. En 1972, Jean-Marie Le Pen a déposé les statuts du parti en préfecture au côté de Pierre Bousquet, Waffen-SS au sein de la division Charlemagne. Celui-ci occupera le poste de trésorier. A leurs côtés également, François Brigneau, journaliste et ancien milicien pétainiste, est désigné vice-président.
Interrogé sur Pierre Bousquet par franceinfo, à l’occasion des 50 ans du parti, Jean-Marie Le Pen ne le condamne pas : « Nous étions à trente ou quarante ans de la guerre et, par conséquent, les options qu’avaient pu prendre à 20 ans des gens qui en avaient 60, ce n’était pas le critère principal, explique-t-il aujourd’hui. Les affaires d’Algérie étaient plus proches que celles de la Seconde Guerre mondiale. »
Pierre Bousquet quittera le parti huit ans après sa création, en même temps qu’un autre ex-Waffen-SS, Jean Castrillo. Malgré cela, il y avait « de nombreux membres de la Nouvelle Droite et du FN » aux obsèques de l’ancien trésorier en 1991, relate l’historien Nicolas Lebourg sur Slate.
Léon Gaultier, autre cofondateur du parti, était également engagé dans la Waffen-SS. Photo à l’appui, il a évoqué son passé dans un reportage d’« Envoyé spécial » diffusé sur Antenne 2 en 1992 : « Oui, ça, c’est moi en uniforme SS, uniforme que j’ai porté pendant plus de deux ans, parce que j’étais engagé volontaire dans la Waffen-SS, qui était dépendante de l’armée allemande, mais qui n’était pas l’armée allemande », a-t-il détaillé. Jean Marie Le Pen avait fondé avec lui la Serp, une maison d’édition qui publiera notamment un disque de chants du IIIe Reich.
« En termes politiques, les anciens SS jouent après-guerre un rôle essentiel dans la reconstruction des extrêmes droites », estime l’historien Nicolas Lebourg.
Au vu de tous les courants présents à la création du FN , il est donc correct, comme le fait la députée LFI Sarah Legrain, d’affirmer que l’ancêtre du RN est issu d’un héritage en lien avec les Waffen-SS et le régime de Vichy.
Les votes Droite et RN
Programme social du RN
Article emprunté à la Fondation Jean Jaurès, écrit par Timothée Duverger, Thierry Germain
Alors que le pouvoir d’achat constitue la priorité numéro un des Français, que propose réellement le Rassemblement national en matière de mesures sociales ? Timothée Duverger et Thierry Germain, respectivement co-directeur et membre de l’Observatoire de l’expérimentation et l’innovation locales de la Fondation, analysent le programme du parti d’extrême droite et démontrent trois éléments :
- le double discours utilisé pour asseoir un plus large électorat,
- une instrumentalisation des questions sociales à des fins xénophobes
- et des propositions qui ne feraient qu’accentuer les inégalités et pénaliser les classes moyennes et populaires.
Vote massif des ouvriers et employés, déports conséquents d’anciens électeurs de gauche, prétention à incarner la voix des « petites gens » flouées ou méprisées par les élites… : l’auto-proclamée fibre sociale du Rassemblement national (RN) est devenue l’une de ses grandes marques de fabrique, avec la phobie migratoire et la représentation des provinces contre les grandes villes mondialisées.
Qu’en est-il réellement ? Alors qu’il ne fait aucun doute que les Français sont plongés dans une spirale de déclassement et éprouvent une forte appréhension de l’avenir (réforme des retraites ; réforme de l’assurance chômage ; rhétorique de « l’assistanat », avec une ambiance générale de défiance et de contrôle ; déséquilibres massifs dans le partage de la valeur au détriment des salariés…), il est plus que nécessaire de décortiquer le programme social du RN, de déjouer les faux-semblants et de dénoncer les distorsions entre les discours et les mesures proposées.
Or l’examen de ses positions, propositions et votes atteste que ce vernis social est une imposture majeure, et plusieurs exemples très récents l’illustrent de façon très claire.
Qu’il s’agisse de la réforme des retraites ou plus récemment de la loi sur le plein emploi, le Rassemblement national s’est ainsi opposé au gouvernement au nom de la justice sociale. Ces deux positions fortes, censées marquer un tournant dans les orientations historiquement ultralibérales de l’extrême droite, ont cependant été rapidement battues en brèche tout récemment par Jordan Bardella, aujourd’hui appelé à former un nouveau gouvernement en cas de victoire aux élections législatives suivant la dissolution de l’Assemblée nationale.
Dans un contexte de rapprochement avec Éric Ciotti, les ambiguïtés entretenues ces derniers mois par le RN en matière sociale doivent être levées.
- Pour le RSA , auquel l’exécutif a décidé sous la pression de la droite de conditionner son versement à la réalisation de 15 heures d’activité, Jordan Bardella a déclaré dans l’émission Dimanche en politique de France 3 le 4 février dernier qu’« il faut des contreparties aux prestations sociales de ce type ». On a ainsi retrouvé la classique dénonciation de l’« assistanat ».
- Concernant les retraites, alors que le RN promettait d’abroger la réforme, il a reculé le 11 juin sur RTL, considérant qu’il ne s’agit plus d’une priorité.
Ce double discours n’a rien n’anodin, puisque cette prétendue préoccupation du quotidien des Français et de leurs difficultés de chaque jour, notamment celles liées au pouvoir d’achat et aux protections, est bien l’un des ressorts de sa progression électorale. En avançant masqué, le RN a progressé dans de larges franges de l’électorat, bien que l’abstention soit restée très majoritaire. Au sortir des élections européennes, il a ainsi consolidé son socle, hégémonique chez les ouvriers (54% des voix) et très ancré chez les employés (40%), tout en progressant de 10 et 7 points chez les professions intermédiaires (29%) et les cadres (20%). Il est ainsi devenu le premier parti chez les salariés (36%). Seul le diplôme constitue encore une frontière. Plus il est élevé, plus la chance de voter en faveur du RN est faible.
Comme le rappelle le politiste Vincent Tiberj, le RN a su imposer les thèmes de l’immigration et de la sécurité pour cadrer le débat public (politique et médiatique), au détriment de la mise sur agenda des sujets sociaux amenée par le mouvement de lutte contre la réforme des retraites. Le RN bénéficie des divisions des classes populaires. Il joue pour cela sur la logique du bouc émissaire à travers les figures de « l’assisté », ou plus encore de « l’immigré » qui profiteraient du système et ce jusqu’à les assimiler à des fraudeurs. C’est tout le sens de la « préférence », rebaptisée « priorité » nationale au cœur du programme du RN.
En matière sociale, il prévoit ainsi dès sa première proposition de réserver les aides sociales aux Français (handicap, pauvreté, personnes âgées, mineurs en danger, sans-abri, etc.) et de conditionner à cinq années de travail en France l’accès aux prestations de solidarité, tandis que la « priorité nationale » devrait s’appliquer à l’accès au logement social et à l’emploi. Autant de mesures discriminatoires.
Mensonges sur ses intentions sociales réelles (la réalité du mouvement d’extrême droite restant très largement son libéralisme économique et social traditionnel) et détournement de la question sociale en la lisant au prisme déformé de l’immigration : le RN mène une imposture politique dont il faut bien prendre en compte qu’elle s’appuie sur des réalités profondes de notre pays.
Les travaux sur le sentiment de pauvreté révèlent un continuum allant des catégories populaires salariées ou indépendantes aux allocataires du chômage ou de prestations sociales. Pourtant, des approches plus ethnographiques permettent de révéler l’importance des « petites différences » (niveau ou variations de revenus, trajectoires), qui se convertissent en petites distinctions au sein des classes populaires, elles-mêmes porteuses d’une charge morale tant pour les individus que pour les institutions. Dans une perspective où le rapport à l’avenir est différencié entre les classes sociales, « les classes populaires se retournent contre les assistés parce que les voies les plus ordinaires de la promotion (accès à l’emploi public, accès à la propriété de son logement, éventuellement en pavillon) paraissent soit inaccessibles, soit de plus en plus insoutenables dans un contexte de stagnation des salaires et d’augmentation des dépenses contraintes ».
Reste que l’imposture est totale !
À l’Assemblée nationale, les positions du RN sont claires. Dès le début de leur mandat, ses députés ont par exemple voté contre l’augmentation du Smic (20 juillet 2023), contre l’indexation des salaires sur l’inflation (20 juillet 2023), contre le gel des loyers (21 juillet 2023), contre le rétablissement de l’Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) (23 juillet 2023). À la même période, ils se sont abstenus sur la création d’une garantie d’autonomie pour les étudiants (25 juillet 2023) ou sur la revalorisation des minima sociaux au niveau du seuil de pauvreté (25 juillet 2023), ainsi que sur la revalorisation des salaires des fonctionnaires de 10% (26 juillet 2023)7.
Quant aux mesures sociales avancées par le RN, elles sont autant de leurres. Dans la proposition 5 du programme du parti d’extrême droite pour l’élection présidentielle de 2022, il entend permettre aux entreprises d’augmenter les salaires de 10% en les exonérant de cotisations patronales (pour les salaires allant jusqu’à trois fois le Smic). Or, non seulement elle serait facultative, laissée au libre choix de chaque entreprise, mais en plus elle repose sur des exonérations de cotisation, ce qui aurait un coût important pour les finances publiques tout en créant une trappe à bas salaires.
Le RN propose également un ensemble de mesures visant à soutenir les propriétaires fonciers, alors que l’accès au patrimoine est aujourd’hui la principale source d’inégalités. Cela se retrouve dans sa proposition 16 de suppression de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), comme dans sa proposition 17 consistant à lancer un plan de réhabilitation de l’habitat ancien grâce à des aides efficaces ou à créer un fonds de garantie des loyers pour protéger les propriétaires. Toutes ces propositions visent les populations les plus aisées et non les plus précaires.
S’agissant des jeunes, le RN ne propose pas – là encore – de soutenir les plus vulnérables mais bien les plus aisés. Dans sa proposition 7, il promet l’exonération d’impôt sur le revenu de tous les jeunes actifs jusqu’à 30 ans, ainsi que la suppression de l’impôt sur les sociétés pour les entrepreneurs de moins de 30 ans pendant les cinq premières années, au motif qu’il y aurait dans les deux cas un risque de départ à l’étranger. Pour les jeunes en insertion, il s’engage à créer un chèque-formation mensuel de 200 à 300 euros pour les apprentis, les alternants et leurs employeurs, ce qui dans les faits revient à subventionner les entreprises.
En matière de retraites, les avancées sont très limitées voire floues. Le RN prévoit une réindexation des retraites sur l’inflation, qui bénéficierait surtout – et encore une fois – aux plus aisés. La revalorisation du minimum vieillesse ne serait que de 10%. Quant au départ à la retraite à 60 ans, il est réservé aux personnes qui ont travaillé avant 20 ans et ce pendant quarante annuités.
Enfin, s’agissant des Ehpad, il annonce une croissance forte de la présence de personnel médical, sans donner de chiffre. Ce flou se retrouve dans plusieurs des propositions concernant le handicap, à l’instar d’un grand plan sur l’accès à la scolarité pour les enfants touchés par le handicap ou de la loi sur l’accès à tous les lieux et transports publics sur lesquels il n’y a aucune précision.
Enfin, la mesure 22 du RN – la dernière – consiste à créer un ministère de la lutte contre les fraudes, sans les différencier, alors qu’en 2019 la fraude sociale était estimée à 2,3 milliards d’euros contre entre 80 et 100 milliards d’euros pour la fraude fiscale. Ainsi le RN met-il l’accent, à travers cette mesure populiste, sur la chasse aux fraudes plutôt que de s’intéresser au non-recours aux droits, qui est pourtant massif (on l’estime à environ 35% des bénéficiaires potentiels pour le RSA par exemple) et constitue un problème pour l’accès à la citoyenneté et la confiance dans les institutions. Ce faisant, il risque l’accroître en entretenant la confusion entre la fraude, les indus et les contreparties.
Conclusion
À l’examen, le programme du Rassemblement national est donc plus anti-social qu’anti-système, des traits que l’on retrouve très nettement dans les pays où l’extrême droite gouverne, comme l’Italie de Giorgia Meloni. Rien d’étonnant à ce qu’un axe (bien peu social !) apparaisse de plus en plus clairement entre certains milieux d’affaires et le RN au nom d’une « union des droites » qui est surtout une revanche des extrêmes droites, le tout en s’appuyant sur des divisions et fractures qu’il s’emploie à exploiter bien plus qu’il n’a réellement l’intention de les résoudre.
Articuler urgences écologiques et nouvelles solidarités est pourtant le point majeur de ce virage climatique que nos pays doivent rapidement mettre en œuvre à présent, cela sans se fracturer davantage. Mensonger sur ses intentions sociales et bâti sur les tensions – notamment à l’encontre des étrangers –, le programme du Rassemblement national va exactement à rebours de cela. En ce sens et si ce moment devait venir, il ne peut que se retourner contre les classes moyennes et populaires, contre le peuple.
La presse Bolloré
Les médias de Vincent Bolloré orchestrent l’alliance du RN et de la droite. CNews, Europe 1 et le « JDD » usent de leurs synergies pour promouvoir le rapprochement entre le Rassemblement national et Les Républicains d’Eric Ciotti. Jusqu’à dicter tempo et thèmes de campagne. Rencontre Ciotti-Bolloré, paroles décomplexées chez Hanouna, investiture par le RN d’un chroniqueur de CNews . Hanouna multiplie les prises de position à l’antenne et concentre ses tirs sur LFI. « LFI au pouvoir, moi, je pars », a-t-il lancé mercredi, comme une consigne de vote. « On fait l’émission où ? » lui a rétorqué du tac au tac le journaliste politique de CNews Gauthier Le Bret. « Dans ton cul », a répondu Hanouna.
Jordan Bardella persiste et signe. Le patron du RN a confirmé dimanche 16 juin vouloir privatiser « à terme » l’audiovisuel public si le RN arrive au pouvoir à l’issue des élections législatives. « L’ambition que nous avons portée pour la présidentielle reste d’actualité, celle à terme de privatiser l’audiovisuel public ». La presse Boloré a un sourire de gourmandise ....
Si le RN accède au pouvoir
Après des élections européennes remportées haut la main, et la dissolution surprise de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, le Rassemblement national, emmené par Marine Le Pen et Jordan Bardella, est à une marche du pouvoir. Mediapart a donc décidé, exceptionnellement, de permettre la lecture en accès libre d’une sélection d’articles qui racontent les menaces que l’extrême droite fait peser sur la France.
Droits des femmes
Le discours et la réalité des positions RN sur les droits des femmes
Russophile
Lu sur le huffingtonpost.fr du 9 juillet 2024
Le président du Rassemblement national prend la tête du groupe « Patriotes pour l’Europe » imaginé par Viktor Orban. On y trouve l’extrême droite la plus rance, et une russophilie assumée.
Un lot de consolation. À défaut d’avoir obtenu Matignon à l’issue d’élections législatives décevantes pour le RN (en dépit d’une réelle progression à l’Assemblée nationale), Jordan Bardella a été nommé ce lundi 8 juillet à la tête du groupe « Patriotes pour l’Europe », imaginé par le Premier ministre hongrois Viktor Orban, partenaire du Rassemblement national à l’international.
Ce rapprochement, que le parti lepéniste a volontairement passé sous silence lors de la campagne des législatives pour ne pas réactiver l’embarrassant procès en russophilie, est le fruit des larges résultats obtenus par le RN le 9 juin, devenant la plus importante délégation du Parlement européen. Avec 30 eurodéputés, la formation lepéniste domine largement ce groupe nationaliste, qui compte en son sein des formations et des personnages qui sont (très) loin de la dédiabolisation vendue par le RN dans l’hexagone.
Nostalgie de Mussolini et « lobby gay »
Prenons en exemple le général italien Roberto Vannacci, qui portait les couleurs de la Lega aux européennes, et qui a été désigné vice-président des « Patriotes pour l’Europe » aux côtés de Jordan Bardella. Friand des allusions à Mussolini, l’intéressé avait fait parler de lui après la publication d’un pamphlet homophobe et xénophobe. Le site spécialisé dans les enjeux européens Le Grand Continent, avait compilé dix phrases choc de Roberto Vannacci durant la campagne des européennes.
Parmi elles, on citera ceci : « Chers homosexuels, vous n’êtes pas normaux. Il faut s’en remettre ! La normalité, c’est l’hétérosexualité. Mais si tout vous semble normal, c’est à cause des intrigues du lobby gay international qui a banni des termes qui, il y a quelques années encore, figuraient dans nos dictionnaires : pédéraste, folle, inverti, tapette, emmanché, fiotte, tafiole, lopette, tarlouze, sodomite — qui sont aujourd’hui susceptibles de vous faire passer devant un tribunal ». Ou alors : « Je pense que l’avortement une nécessité malheureuse à laquelle les femmes sont obligées de recourir. Je ne crois pas que ce soit un droit. Je suis contre ». Ainsi parle le vice-président du groupe présidé par Jordan Bardella.
Russophilie et « famille traditionnelle »
Au-delà de cet allié italien, le groupe des « Patriotes pour l’Europe » a une forte coloration pro-russe, que ce soit à travers le FPÖ autrichien ou au regard de l’activité diplomatique de l’architecte du groupe : Viktor Orban. Détail troublant, ce mariage intervient au moment où le Premier ministre hongrois a provoqué un tollé en allant rendre visite à Vladimir Poutine, au détriment de la solidarité européenne exprimée à l’égard de l’Ukraine. Un déplacement réalisé au nom de la « paix » qui n’a pas empêché Moscou de bombarder un hôpital pour enfants dans les heures qui ont suivi.
La présidence par Jordan Bardella de ce groupe ouvertement russophile interroge, tant le patron du RN n’a eu de cesse de tenter de se défaire de cette image durant la campagne, allant jusqu’à faire disparaître le livret « Défense » du programme de Marine Le Pen (lequel proposait une « alliance stratégique » avec Moscou) du site du RN.
Avec l’apport du contingent du parti lepéniste, le groupe des « Patriotes pour l’Europe » devient le troisième groupe du Parlement européen. Pour le Premier ministre hongrois, l’objectif de ce groupe est de se positionner contre le soutien militaire à l’Ukraine, contre « l’immigration illégale » et pour la « famille traditionnelle ». Voilà qui détonne avec le ton policé employé par le RN en France. Et qui en dit long sur ses réelles aspirations.