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Ecrit le 31 janvier 2018
Aux EGA (Etats généraux de l’alimentation), il a été question de l’élaboration des plans de filières, mettant en avant une nouvelle construction de prix agricoles, plus transparente, basée sur les coûts de production. A l’heure actuelle, en filière viande bovine, seule la démarche « Eleveur & engagé » citée en exemple par le président de la République dans le discours de Rungis du 11 octobre 2017, répond à ce critère de juste rémunération des éleveurs.
Bonne nouvelle : les enseignes comme Intermarché ont répondu favorablement au sujet en signant :
– Un accord pour entrer dans la démarche « Eleveur & engagé », le 28 septembre 2016
– La Charte d’engagement des EGA, le 14 novembre 2017.
Mauvaise nouvelle : ces signatures ne sont malheureusement pas suivies d’effets. Sur les 1446 points de vente présents sur tout le territoire (85 hypermarchés et 1361 supermarchés), seuls 3 magasins sont désignés pour mettre en place la stratégie nationale de déploiement de la démarche d’ici la fin du mois de janvier... Les messages communiqués par Intermarché sur tous les réseaux sociaux et la presse garantissent au consommateur que l’enseigne est favorable à mieux rémunérer les éleveurs, mais le bilan sur le terrain reste bien mince... voire quasi inexistant !
Une action a donc été menée par un groupe d’agriculteurs FNSEA, le 19 janvier 2018, devant le magasin Intermarché de Châteaubriant qui n’entre pas encore dans cette démarche, alors que le magasin Super U respecte ses engagements.
La démarche « Eleveur et engagé » vise à valoriser la viande bovine issue de vaches allaitantes à un prix juste pour les éleveurs, basé sur ses coûts de production. L’éleveur, dont l’animal entre dans la démarche, ne vend plus à perte. Cela concerne des magasins U situés à Châteaubriant, Derval, Pouancé, St Mars la Jaille, Nort sur Erdre. Des magasins Carrefour situés à Angers et La Roche sur Yon. Mais rien pour Intermarché ou Leclerc !
La signature « Eleveur & engagé », affichée sur le produit ou le rayon du distributeur, matérialise un produit de qualité, respectant les critères suivants :
: Des conditions d’élevage respectueuses du bien-être animal,
: Le retour de la valeur garantie à l’éleveur, pour son animal valorisé dans la démarche,
: La maturation du produit (Ã minima 10 jours) pour répondre aux attentes des consommateurs quant à la tendreté de la viande.
Interrogé sur l’absence de cette signature dans son magasin, le directeur d’Intermarché Châteaubriant, Thierry Chambrin,
a plaidé la bonne foi : « Je n’étais pas au courant je vais me renseigner, je vous tiendrai au courant ». Les agriculteurs présents espèrent qu’il tiendra sa promesse, « sinon nous reviendrons moins courtoisement ».
Une discussion s’est engagée entre M. Chambrin et les éleveurs présents. « Nous sommes producteurs et commerçants » dit la publicité d’Intermarché. « Nous sommes fiers de fabriquer nous-mêmes nos produits ». « Non, les producteurs c’est nous » répondent les éleveurs « , » vous vous êtes transformateurs. Vous ne produisez pas toute la viande que vous vendez, de même que vous ne produisez pas les couche-culottes ". Dialogue de sourds.
Voeux et après ?
Lors de ses voeux au monde rural, le président Emmanuel Macron a surpris agréablement le monde paysan en dessinant les contours d’une agriculture française plus respectueuse de l’environnement, privilégiant la qualité et l’ouverture sur le monde. Avec un préalable : ramener rapidement du revenu aux producteurs pour éclaircir l’avenir.
Il s’est engagé à maintenir le budget d’une PAC (politique Agricole Commune) qui doit être « plus protectrice », « plus efficace » et « plus lisible ». Il a annoncé la mise en place d’une épargne de précaution pour les agriculteurs dès le 1er janvier 2019. Et un plan protéines. « La France dépend à 40% de soja OGM importé et à 60% d’engrais azotés : nous n’avons donc pas de vraie souveraineté. Je souhaite que nous ayions une vraie stratégie de souveraineté protéine pour les années à venir » a-t-il dit, en souhaitant que la production des oléoprotéagineux (colza, tournesol...) en France soit dirigée en priorité vers l’alimentation animale ou humaine. [Ndlr : Aujourd’hui, l’huile issue du colza français est valorisée pour les deux tiers dans la fabrication de biocarburant et pour un tiers en alimentation].
Pour la Confédération paysanne, la question du revenu des paysannes et paysans doit être la pierre angulaire de toute vision politique. Le projet de loi du 31 janvier 2018 est très attendu. La mondialisation et enfin la transition agricole, sont aussi des sujets de préoccupation.