Ecrit le 17 février 2021
1. En général, comment décririez-vous votre relation de couple ? (très tendue, quelque peu tendue, aucune tension)
2. Quand il y a dispute dans votre couple, réglez-vous le conflit avec...(beaucoup de difficulté, une certaine difficulté, aucune difficulté)
3. Vos disputes vous font-elles parfois vous sentir rabaissée ou vous boule-versent-elles ? (souvent ,quelquefois, jamais)
Telles sont les trois premiers sujets du questionnaire WAST qui en comporte huit. WAST est l’acronyme de :Woman Abuse Screening Tool (outil de dépistage des violences conjugales).
La prévalence des violences conjugales au cours de la vie d’une femme a été estimée à 30% dans le monde et 26% en France. En moyenne, au cours d’une année en France, 225« ¯000 »¯femmes âgées de plus de 18« ¯ans sont victimes de violence physique et/ou sexuelle perpé-trée par leur conjoint ou ex-conjoint. En 2018, 121 »¯femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint, soit 1 femme tous les 3 jours.
Les conséquences des violences conjugales sur l’état de santé des femmes sont graves et multiples avec notamment la survenue de pathologies psychiatriques et une altération de la qualité de vie. Ces violences peuvent également altérer l’état de santé des nouveau-nés et des jeunes enfants lorsque les violences se produisent au cours de la grossesse ou en post-partum immédiat.
Des recommandations internationales et nationales ont été élaborées pour que le dépistage des victimes de violence conjugale soit effectué afin de leur proposer une orientation précoce pour une prise en charge optimale. Ce dépistage repose en particulier sur les professionnels de santé qui sont souvent le premier recours des victimes.
Cependant, plusieurs études réalisées au Royaume-Uni, au Canada ou aux États-Unis ont montré que ce dépistage était insuffisant. Les freins au dépistage tiennent plutôt aux professionnels de santé souvent réticents à effectuer celui-ci. Ils expriment un manque d’expérience et l’absence de formation spécifique. Ils ont parfois des méconnaissances et des a priori sur les situations de violence.
Les études ont aussi mis en évidence que ces professionnels manquaient d’outils et de procédures de référence leur permettant une prise en charge efficace de la victime.
En France, un « Grenelle contre les violences conjugales » s’est tenu en 2019. Des outils de formation sur les violences faites aux femmes s’adressant à l’ensemble des professionnels ont été conçus par la Mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (Miprof), en collaboration avec des équipes pluridisciplinaires d’experts et de professionnels. néanmoins, aucun outil valide de dépistage des violences conjugales pouvant être utilisé en pratique courante, notamment en libéral, n’est actuellement disponible en français.
Parmi les outils existants, le questionnaire Woman Abuse Screening Tool (WAST), questionnaire canadien en anglais, possède ces différentes propriétés. Il a été développé à destination des médecins généralistes dans le but d’être pratique, accessible et acceptable par les femmes
Afin de tester son acceptabilité et son utilité, 20 médecins généralistes canadiens ont été recrutés et ont proposé le questionnaire à leurs patientes. Ces médecins exerçaient, dans des proportions équivalentes, en ville ou à la campagne, et ne possédaient pas de formation particulière sur les violences conjugales. Plus de 90% des femmes ont rapporté être à l’aise pour remplir le questionnaire ou lorsque les questions étaient posées par leur médecin traitant. Les médecins généralistes eux-mêmes ont déclaré être à l’aise en faisant remplir le WASt à leurs patientes et ont perçu cet outil comme très utile dans le dépistage des violences conjugales.
Une étude a été menée en France, sur 361 femmes, afin de valider une version française du WAST en évaluant ses propriétés psychométriques. L’objectif secondaire était d’étudier le niveau d’aise des femmes lorsqu’elles remplissaient le questionnaire au cours de cette étude et si le questionnaire avait été rempli au cours d’une consultation avec leur médecin traitant.
Conclusion : Le questionnaire WAST en français est un outil valide et rapide d’utilisation à destination de tous les professionnels de santé. Il permet d’identifier facilement les femmes susceptibles d’être victimes de violence conjugale. Son utilisation en pratique courante doit permettre un dépistage précoce et une mise en place d’un parcours de soins spécifique afin d’optimiser la prise en charge des femmes victimes de violence conjugale. Il doit être intégré de manière systématique dans l’interrogatoire, notamment dans les services susceptibles d’accueillir des victimes telles que les urgences ou les services de chirurgie ou au cours de consultations dédiées telles que l’entretien prénatal précoce.
Les médecins ont été interrogés à l’issue de cette expérience. résultats : le dépistage systématique des violences conjugales était mal vécu par les médecins car il touchait à la relation médecin : patiente et à leur routine de consultation. Trois émotions majeures négatives à propos du dépistage ressortaient : la préoccupation, l’appréhension et la peur. Les médecins demandaient un cadre protecteur pour sortir de leur zone de confort et aborder le sujet : diminution du tabou, mise à disposition de ressources, outils et formations. Ces prérequis étaient indispensables mais insuffisants.
Les médecins témoignaient d’une charge mentale et d’un impact émotionnel importants rendant difficile la poursuite du dépistage systématique. Le dépistage des violences conjugales restait perçu comme dangereux. Un apprentissage de la gestion des émotions serait nécessaire pour pratiquer le dépistage de ces violences.. L’usage d’un tel questionnaire a cependant un impact positif car il permet aux médecins d’adapter la prise en charge des patientes victimes.
En effet, dépister ne suffit pas. Il faut encore informer la femme sur ses droits, citer la loi et dénoncer les violences comme un fait inadmissible et lui affirmer qu’elle peut être aidée et soutenue par différents professionnels.
Le cycle de la violence
Les circonstances d’apparition des violences conjugales sont extrême-ment variées. Le plus souvent la violence est d’abord psychologique et verbale, elle vise à créer « un climat d’insécurité et de peur ». L’emprise du conjoint s’installe dans le quotidien du couple, comme un conditionnement. Puis après une période plus ou moins longue (parfois des années), survient le passage à l’acte : l’agression. Il faut noter ici le rôle de l’alcool qui agit comme un désinhibiteur. c’est l’entrée dans le cycle des violences.
Cette chronologie standardisée se déroule en quatre phases distinctes : la tension, l’agression, le déni de l’auteur et le pardon de la victime, et enfin la rémission aussi appelée la lune de miel.
Durant cette période, l’auteur cherche à faire excuser sa conduite et obtenir le pardon, pour cela il use de manœuvres de séduction, il fait des promesses, offre des cadeaux.. La femme reprend espoir, elle minimise ou nie les faits violents et redonne sa confiance. Puis l’agresseur constate son impunité : il n’y a pas de conséquences de ses actes violents. Le cycle recommence en s’intensifiant.
La durée et la fréquence des cycles sont variables selon les couples, cepen-dant les différentes phases de ce cycle ont tendance à se raccourcir, tandis que la violence, elle, s’aggrave. L’escalade se produit lorsque le moyen de contrôle devient inefficace. Plus la femme résiste, plus l’escalade est rapide.
Sources : https://www.chu-besancon.fr/ smfc/201109/11-09-07.pdf
et https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-00779665/document