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Ecrit le 1er juillet 2023
Nahel
Si Nahel s’était appelé Jean-Pierre ...
Il est difficile de ne pas voir dans le drame de Nanterre, cette sorte d’exécution à bout portant prélude à un déferlement de violences urbaines, comme une incarnation des maux qui touchent la France. Un pays déchiré de l’intérieur ooù chacun regarde l’autre en chien de faïence sans jamais prendre la peine ou le temps de comprendre les motivations de son interlocuteur.
Comment est-il possible que dans un pays aussi civilisé que la France, tout commence et finisse dans la violence ? De quelle malédiction la France est-elle frappée pour que régulièrement, elle s’invite à la une de l’actualité par la diffusion d’images qui évoquent plus un pays en guerre qu’une contrée éclairée, naguère porteuse d’un message d’espoir pour l’humanité tout entière ?
Mort de Nahel : le non-dit du racisme institutionnel Pour le sociologue Paul Rocher, il est évident qu’il existe un racisme institutionnalisé dans la police.
Le Haut commissariat des Nations unies aux droits de l’homme s’est dit préoccupé par les violences qui ont éclaté après la mort de l’adolescent, et il a demandé à la France de se pencher sérieusement sur les problèmes de racisme et de discrimination raciale au sein de ses forces de l’ordre.
Où va la France ?
Vers l’explosion sociale, vers son inévitable répression policière puisque la fermeture des canaux démocratiques contraint la protestation à la violence émeutière..
La vérité oblige à dire que ladite violence policière est aussi le prix du retrait de l’Etat qui a asphyxié financièrement le tissu associatif de proximité et démantelé les services publics en confiant à ses flics une mission impossible : celle de maintenir la paix sociale dans un Etat d’injustice sociale, prompt à l’injure publique à l’encontre de la « racaille ». Tout cela sur fond de dénonciation hystérique du « wokisme » et de vociférations sur les chaînes d’information continue des syndicats de police, dont les membres sont de plus en plus nombreux à porter sur leur uniforme la Thin Blue Line prisée de l’extrême droite suprémaciste américaine.
Emeute
Prends-moi un yop. Les révoltes de juin 2023 sont en train de faire l’histoire. Les vies écrasées et méprisées se redressent et débordent. Elles font effraction dans ce qui leur est habituellement soustrait : la parole et l’audition politiques. Les gestes nihilistes de saccage se mélangent aux plaintes dirigées sans équivocité à l’endroit des forces de l’ordre et de l’état. Rationalités politiques et gestes absurdes sont le propre des pratiques émeutières.
La première raison est éminemment politique. Elle réside dans le fait que les émeutiers retrouvent une puissance collective. La seconde raison suit la logique du spectacle. L’émeute emprunte particulièrement au registre carnavalesque. La troisième raison qui explique la joie émeutière réside dans le retournement du rapport avec les forces de l’ordre.
L’émeute déborde parfois le pouvoir et le met ponctuellement en échec, elle demeure le signe d’une impuissance à intervenir dans le monde pour faire entendre et reconnaître ses plaintes. Mais elle rappelle aussi l’impatience qu’ont les émeutiers à faire droit à leurs colères.
Lire l’article sur les émeutes
Colère et effroi
Mort de Nahel : colère et effroi - 500 personnalités alertent...
Les images de la mort de Nahel, jeune franco-algérien de 17 ans, tué d’une balle dans le cœur par un policier, le 27 juin dernier, ont fait le tour du monde. Le 6 juillet, un autre homme, Mohamed B., est tué par le tir d’un lanceur de balles de défense (LBD) à Marseille. Ces deux noms viennent allonger la trop longue liste des victimes de violences policières en France ces dernières années : Alhoussein, Rayana, Adama, Good, Mozomba, Zineb, Aziz, Adam, Jean-Paul, Fadjigi, Amine, Nathalie, Zyed, et tant d’autres . Le constat est sans appel : en France, des Arabes et des Noirs meurent entre les mains des policiers.
La nouveauté, c’est qu’on peut désormais être récompensé pour cela. La cagnotte en ligne Gofundme créée par Jean Messiha, figure de l’extrême droite, au profit du policier qui a tiré sur Nahel, constitue en cela un terrible précédent : il s’agit ni plus ni moins de l’apologie d’un meurtre raciste. L’existence même de cette cagnotte, et la somme de 1,6 millions d’euros qu’elle a atteinte en un temps record, est une victoire symbolique pour l’extrême droite, qui matérialise son idéologie à travers une mobilisation financière inédite. Cela devrait interpeller et mobiliser tous les citoyens attachés à l’Etat de droit. Dans cette atmosphère délétère, nous sommes des millions en deuil, en colère, inquiets de l’absence de réaction politique de la part du gouvernement face à ce terrifiant signal anti-démocratique. Mobilisons-nous massivement en appelant les décideurs à interdire le transfert de fonds de cette cagnotte.
Plus largement, nous souhaitons attirer l’attention sur la gestion gouvernementale de cette crise.
Interdire de manifester, menacer de couper les réseaux sociaux, prononcer des peines de prison ferme pour un vol de canette. Blâmer les jeux vidéo, internet, les parents, en éludant le caractère politique, structurel, de la mort de Nahel et de la colère qu’elle a suscitée. Tout cela n’est pas digne des enjeux auxquels nous faisons face. Nous exigeons du gouvernement qu’il cesse de criminaliser la colère populaire et de réprimer les revendications légitimes de la société civile. La situation actuelle appelle une prise de responsabilité de la part du gouvernement et nécessite des réponses immédiates. Car le problème du racisme dans notre pays est bien plus large et cette crise n’en est qu’un symptôme.
La France doit sortir du déni et entendre les avertissements du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, d’Amnesty International et de Human Rights Watch ou encore Le Conseil de l’Europe.
Aussi, et en écho à ces constats :
- Nous exigeons du gouvernement qu’il reconnaisse le caractère structurel du racisme dans la police.
- Nous exigeons l’abrogation de l’article 435-1 qui donne un permis de tuer à la Police.
- Nous exigeons la création d’un organisme indépendant pour remplacer l’Inspection générale de la Police nationale (IGPN) (ces points ayant déjà été énoncés par Amal Bentounsi et dans l’appel des collectifs, associations, syndicats et organisations politiques “Notre pays est en deuil et en colère”).
- Nous exigeons que cesse immédiatement le recours systématique aux détentions provisoires et aux comparutions immédiates dont nous avons pu voir ces derniers jours qu’elles aboutissent presque systématiquement à des peines de prison ferme. Chaque personne arrêtée et interpellée doit avoir droit à un procès équitable et bénéficier du soutien de la société civile. La répression judiciaire auxquels ces derniers sont sujets est indigne d’un État de droit, et ne fait que rompre davantage le lien de confiance entre institutions et citoyen•nes.
- Enfin, nous exigeons l’autorisation de la manifestation prévue le 15 juillet.
Manifester est un de nos droits fondamentaux et la colère populaire ne saurait être systématiquement étouffée.
En tant que citoyennes et citoyens, militantes et militants, actrices et acteurs de la société civile, il est urgent d’envoyer un message fort d’union et de détermination pour défendre les valeurs démocratiques et le respect des droits fondamentaux pour toutes et tous. Justice pour toutes les victimes de violences policières !
Rendez-vous le samedi 15 Juillet dans la rue !
Tribune co-rédigée par l’équipe mobilisée contre la Cagnotte de la honte.
Pourriture
Violences sexuelles : un rapport des Frères de Saint-Jean dénombre 167 victimes au sein de la congrégation Après trois ans de recherche, la congrégation des Frères de Saint-Jean a rendu un rapport de 800 pages pour comprendre les violences sexuelles qui ont fait 167 victimes en son sein depuis 1975.