Ecrit le 29 mai 2019
La consommation d’alcool, et ses conséquences, est un souci dans la région de Châteaubriant, c’est pourquoi nous publions cette semaine des extraits du numéro du 26 mars du BEH (Bulletin épidémiologique hebdomadaire) consacré à l’alcool pendant la grossesse et aux violences conjugales dans cette période.
La consommation d’alcool pendant la grossesse, concernant près de 25% des femmes, expose l’enfant à naître à des troubles graves du développement, appelés troubles causés par l’alcoolisation fœtale (TCAF). Faible poids ou taille, malformations, difficultés de coordination, hyperactivité, retard de langage, etc.
Face à cet enjeu de santé publique, les pouvoirs publics mènent des campagnes de prévention et d’information qui renvoient notamment vers le dispositif Alcool Info Service.
Alcool Info Service est le service d’aide à distance sur la question de l’alcool. Anonyme et confidentiel, il a pour mission d’informer, de soutenir, de conseiller et d’orienter ses publics. Les usagers et leur entourage sollicitent le service par différents médias : par téléphone au 0 980 980 930, ouvert 7 jours sur 7 et de 8 heures à 2 heures, par tchat et par le service de questions-réponses personnalisées via le site www.alcool-info-service.fr. Ce site met également à disposition des informations, des conseils et une aide à l’orientation grâce à l’annuaire de l’addictologie.
De 2014 à 2016, les écoutants d’Alcool Info Service, professionnels de la relation d’aide, ont été sollicités par 26 740 usagers d’alcool dont 11 661 femmes. Les femmes enceintes ayant consommé de l’alcool représentaient 1% de celles qui ont contacté le service.
L’objectif de cet article est de décrire les motivations des femmes enceintes ayant sollicité Alcool Info Service. Ces femmes ont en commun de connaître le message de prévention « Zéro alcool pendant la grossesse ».
Trois types de sollicitations émergent : les femmes inquiètes de toute trace d’alcool absorbé (17%), les femmes qui ont bu ne sachant pas qu’elles étaient enceintes (48%) et les femmes en difficulté avec l’alcool (35%).
1 – Des traces d’alcool : Pour ces femmes, le message « Zéro alcool pendant la grossesse » génère une anxiété importante. Traquant la moindre trace d’alcool dans les aliments, elles sollicitent le service entre le 3e et le 7e mois de grossesse. Elles témoignent d’une inquiétude importante, se disent angoissées, tourmentées.
« Je suis enceinte de 3 mois. Je mange chaque matin une tranche de brioche... J’ai vu ce matin dans la liste des ingrédients qu’il y avait du rhum. Cela peut-il poser un problème pour le fœtus ? Quelle quantité d’alcool y a-t-il ? Merci pour votre réponse car je suis inquiète »
Face à ces demandes, les écoutants doivent avant tout veiller à abaisser le niveau d’angoisse de ces femmes, les rassurer. L’échange peut en rester là ou bien s’ouvrir sur l’importante anxiété qu’elles vivent durant la grossesse et qui se cristallise, à ce moment-là, autour du risque de la consommation d’alcool.
2 – Je ne savais pas que j’(étais enceinte : Ces femmes découvrent leur grossesse et réalisent qu’elles ont bu. Elles sont pour 90% dans le premier trimestre de la grossesse. Le plus souvent, elles ont consommé lors d’événements festifs ou durant les vacances et sollicitent le service pour connaître les conséquences de leur consommation. Quand elles évoquent les risques, ce sont les malformations physiques qui sont nommées. Leur discours est empreint de culpabilité, elles se sentent fautives.
« Cette femme de 36 ans, revenant de vacances, découvre qu’elle est enceinte. Elle est complètement bouleversée car tous les jours elle a bu du vin ou du champagne. Elle n’a pas osé en parler à son gynécologue mais ce qu’elle a lu sur Internet lui fait vraiment peur… »
Terrifiées par les conséquences de leur consommation d’alcool, la question de l’interruption volontaire de grossesse est souvent évoquée, parfois associée à la question de leur désir d’enfant comme en témoignent leurs messages déposés sur Internet.
« …y a-t-il risque de malformation ? (ou autre) faut-il que j’avorte ? Merci de me répondre, j’angoisse et j’ai très peur » (femme âgée de 34 ans)
« …J’ai appris il y a une semaine que je suis enceinte et je suis perdue, déjà à savoir si je peux ou pas me permettre de le garder parce que bien sûr bébé imprévu » (femme âgée de 26 ans)
La grossesse n’est en effet pas toujours attendue et la femme peut adresser plus ou moins consciemment au service la responsabilité de la décision.
Ces sollicitations sont les plus délicates. Il est en effet complexe de répondre aux interrogations de ces femmes concernant les risques, sans augmenter leur angoisse. Cela demande à l’écoutant de prendre du recul avec le message de prévention afin de laisser place à l’échange singulier. Il s’agit d’apporter les informations avec clarté tout en restant vigilant à la façon dont l’interlocutrice les entend.
S’il est rarement possible d’être tout à fait rassurant, il existe des messages positifs à délivrer. Tout d’abord valoriser l’arrêt de la consommation durant toute la suite de la grossesse . Ensuite, encourager la femme à parler de sa consommation à un professionnel de santé. L’informer qu’il est possible de renforcer la surveillance de la grossesse notamment lors des échographies. Si aucun examen ne peut apporter la garantie d’un bébé en parfaite santé, il est possible de s’adresser à des professionnels spécialisés qui auront une vigilance accrue dans les situations de ce type.
3 - Les femmes enceintes en difficulté avec l’alcool contactent Alcool Info Service généralement après le 3e mois de grossesse. Pour certaines de ces femmes, la grossesse est un moment de fragilisation susceptible de les conduire à démarrer une consommation ou à reprendre leur consommation passée.
« Cette jeune femme de 25 ans nous dit avoir besoin de boire depuis qu’elle est enceinte et ne comprend pas pourquoi. Elle ne vit pas bien sa grossesse. Elle est fatiguée et vomit... »
« Cette femme de 29 ans est en pleurs au téléphone. Elle avait arrêté sa consommation lorsqu’elle a su qu’elle était enceinte. Elle et son ami se sont battus pendant [plusieurs années] pour que la fécondation “prenne”. Aujourd’hui, elle est enceinte de 6 mois. Depuis 2 jours, elle a à nouveau envie de boire et a “craqué”. Elle se sent très coupable et a honte… »
Pour d’autres, les difficultés qu’elles rencontrent avec l’alcool restent présentes au moment de la grossesse. Ces femmes témoignent de leur échec à arrêter de boire.
« J’ai 30 ans et je bois trop et trop souvent depuis une bonne dizaine d’années. Je suis enceinte de 4 mois, et depuis le début de ma grossesse je n’ai pas réussi à m’arrêter. Je bois une moyenne de 2 verres de vin par jour. En 2 occasions cet été j’ai bu 5 verres. Les risques de handicap lourd existent-ils pour mon bébé ? J’essaye de tout stopper progressivement mais j’ai peur que ce soit trop tard. Ai-je quand même une chance d’avoir un enfant normal ? »
Elles ressentent de la honte, se déprécient, se sentent coupables, cachent leur consommation. Submergées par ces émotions, elles craignent de se voir retirer l’enfant qu’elles portent. C’est un frein très important à la demande d’aide et à l’action.
Le travail mis en œuvre dans ces appels repose sur la reconnaissance de la difficulté de ces femmes et de leur vulnérabilité mais aussi sur l’idée positive qu’« il y a toujours quelque chose à faire » . Il s’agit de les amener à agir selon leurs capacités.
Les informer qu’un arrêt ou une diminution de la consommation d’alcool est bénéfique pour leur enfant et pour elle à tout moment de la grossesse constitue un levier majeur. L’enjeu au cœur de ces entretiens est d’encourager les femmes à évoquer leur consommation avec un soignant. Pour ce faire, l’écoutant s’appuie sur l’expérience de parole faite au téléphone : ce qu’elles ont à dire peut être confié à un professionnel qui va les accompagner sans les juger.
Enfin, dans les cas où la femme exprime son impuissance à modifier sa consommation d’alcool, la mission des écoutants d’Alcool Info Service consiste à expliquer le bénéfice d’un suivi personnalisé pour elle et pour l’enfant à venir. La prise de conscience de l’importance de cet accompagnement pour le devenir de son enfant peut constituer un réel moteur pour la femme et lui permettre de mobiliser ses ressources.
De ces sollicitations se dégage le sentiment de culpabilité et parfois de honte ressenti par ces femmes, qui est souvent à l’origine de leur réticence à parler de leurs consommations avec un professionnel. Face à ces freins, l’anonymat, l’absence de regard, la disponibilité qu’induit l’aide à distance, facilitent la prise de parole.
L’enjeu du travail des équipes d’Alcool Info Service est de (re)donner à ces femmes une capacité d’agir en fonction de leur situation et de leur possibilité.
Au-delà d’Alcool Info Service, permettre la parole de ces femmes ne peut se faire sans changer le regard posé sur elles. Sensibiliser les professionnels de santé à leur accueil est l’une des premières conditions de cette évolution.
Alcool et violences conjugales
Les violences conjugales, même verbales, pourraient être liées à la consommation d’alcool au cours de la grossesse. Les violences conjugales, ou violences entre conjoints ou ex-conjoints, sont multiples et prennent des formes variées : physiques, sexuelles, verbales, psychologiques, administratives et économiques.
Les femmes constituent la majorité des victimes de violences conjugales. Les formes les plus courantes incluent le dénigrement, les insultes et les menaces. Ces violences entraînent une multitude de troubles de santé mentale chez les femmes. Ainsi, les femmes victimes de violences conjugales sont plus à risque de souffrir de détresse émotionnelle, d’anxiété, de dépression, de symptômes de stress post-traumatiques et de pensées suicidaires. En outre, plusieurs études ont montré une association entre l’exposition aux violences conjugales et la consommation d’alcool.
Des études ont montré un lien entre les violences verbales au sein du couple et la consommation d’alcool chez les femmes. Mais on ne sait pas encore pourquoi.
Une explication possible : les femmes consomment de l’alcool comme une forme d’automédication, afin de faire face au stress et à la souffrance causés par les conflits au sein de leur couple.
Une autre hypothèse : les femmes qui ont tendance à consommer de l’alcool durant la grossesse sont plus susceptibles de se lier avec des hommes qui ont aussi une consommation d’alcool abusive, ce qui augmente leur propre risque d’être exposées aux violences. En effet, la consommation abusive d’alcool chez les hommes est associée à la perpétration de la violence conjugale.
Il est aussi possible que la consommation d’alcool durant la grossesse soit à l’origine de conflits au sein du couple. Cependant la majorité des femmes victimes des violences conjugales durant la grossesse le sont aussi avant de tomber enceintes. De plus, les violences et la consommation d’alcool peuvent aussi avoir des déterminants communs, comme par exemple les problèmes psychologiques et/ou sociaux.
Quelle qu’en soit la cause, les violences conjugales, même verbales, contribuent à l’accumulation de facteurs de risque aux issues défavorables pour la grossesse chez certaines femmes. Les paroles blessantes et les insultes répétées pourraient créer de la tension et de l’anxiété chez les femmes, maintenir un climat de peur, d’insécurité et de honte, pouvant affecter leur santé mentale. et entraînant des problèmes de santé périnatale des femmes et de leurs enfants.
Tout repérage doit alors être suivi par un accompagnement adéquat, pour cela un récent rapport de la HAS (Haute autorité de Santé) met à disposition des professionnels de santé des ressources pour l’accompagnement au rétablissement des victimes de violences conjugales.
Même à faibles doses
Si la consommation d’alcool procure du plaisir et permet de se conformer à la norme sociale qui fait de l’alcool un vrai « lubrifiant social » et un acteur essentiel de notre culture et de notre économie, les dommages engendrés pour notre santé et in fine notre société sont considérables. Les travaux les plus récents ont ouvert une nouvelle ère dans la compréhension et l’estimation de l’impact de l’alcool sur la santé humaine, notamment les maladies cardiovasculaires, les démences, les hépatopathies et les cancers. Par ailleurs, les dernières données scientifiques ont mis en lumière un impact sur la santé dès les faibles niveaux de consommation.
Les dommages attribuables à l’alcool sont sans commune mesure avec les éventuels effets « bénéfiques ou protecteurs » de l’alcool. La consommation d’alcool ne saurait être recommandée et ne devrait pas excéder 1 à 2 verres par jour, (et pas tous les jours) sans dépasser 10 verres par semaine. La consommation d’alcool doit être déconseillée aux adolescents, aux femmes enceintes, aux seniors et aux personnes à risque de développer un trouble de l’usage d’alcool ou certaines maladies.
Mais … un quart des personnes de 18-75 ans dépasse ces repères avec une prédominance d’hommes et davantage les jeunes que les plus vieux !
Jus de fruits
Alors on boit quoi ? Des jus de fruits ? Selon une récente étude américaine menée sur plus de 13.000 personnes, boire plus d’un verre de jus de fruit par jour serait mauvais pour la santé, et même au-delà engendrer un risque de mortalité plus élevé. Comme c’est le cas pour les sodas industriels.
Selon cette étude, qui s’appuie sur des questionnaires remplis pendant 6 ans par plus de 13.000 Américains sur leurs habitudes alimentaires et mode de vie, consommer plus de 350 millilitres de boissons sucrées (soit deux grands verres), jus de fruits naturels compris, est associé à une augmentation de 11% de la mortalité. Il vaut mieux prendre un fruit pressé.
Même si le sucre des jus de fruits est naturel, les effets sur le corps sont sensiblement les mêmes qu’avec le sucre ajouté, précisent les auteurs de l’étude. En raison de l’absence de fibres, initialement contenues dans les fruits, le sucre est par ailleurs plus rapidement absorbé par l’organisme. Par exemple dans un jus de pomme, indique une diététicienne au New York Post, « il y a presque 30 grammes de sucre et aucune fibre, alors qu’une pomme contient deux fois moins de sucres et 3 à 4 grammes de fibres ». Un trop plein de glucides déjà associé à un excès de cholestérol, au diabète et à l’obésité, d’autant que l’absence de fibres empêche le sentiment de satiété et pousse donc à consommer davantage de calories.
Ceci concerne tout particulièrement les enfants : en leur donnant des jus de fruits les parents croient bien faire, alors que cette boisson contient beaucoup plus de sucre qu’un fruit entier : l’effet néfaste dépasse les bénéfices de la vitamine C.