Accueil > Châteaubriant > Histoire autour de Châteaubriant > Histoire des Voltigeurs : variations
Ecrit le 7 novembre 2007
Le sport ... c’est pas la passion de La Mée, mais le centenaire des Voltigeurs est quand même un événement car c’est une belle longévité pour une association, certes « bien en cour », qui de par ses origines catholiques, a toujours bénéficié et bénéficie encore de soutiens officiels .... ou non.
Rappelons que Les Voltigeurs sont nés en 1907, comme suite logique de la création d’un « Cercle catholique d’Ouvriers de Châteaubriant » dans lequel ceux-ci, en 1875, projetaient de dépenser toutes leurs forces « pour écarter et protéger leurs frères les ouvriers des séductions et doctrines ennemies que multiplie l’esprit mauvais », c’est-Ã -dire des idées socialistes et révolutionnaires. Ils obtiennent la bénédiction du Pape (Pie IX).
Billard, boules, dominos, prêts de livres, théâtre sont les activités proposées, d’abord dans un local rue de la Coquerie, puis Rue des Quatre-Å’ufs et ensuite à La Vannerie, avant d’acheter les bâtiments de l’Institution St Joseph [qui sont devenus, de nos jours, l’hôtel Le Châteaubriant].
Les Voltigeurs, section sportive du Cercle Catholique, sont créés environ 20 ans plus tard, pour le tir et la préparation militaire, dans le but affirmé de concurrencer une société sportive existante, « la Châteaubriantaise », qui avait le tort d’être trop républicaine et laïque
[voir l’historique de Michel Charron exposé au Marché Couvert à Châteaubriant , et le livret « Les Voltigeurs Castelbriantais » de Christian Bouvet]. Mais voici quelques éléments supplémentaires, fournis par un Castelbriantais « pur sucre », ancien Voltigeur.
métissage
– La Mée : cent ans, ça vous dit quoi ?
– V : Je pense au Prince de Condé, le seigneur qui a lancé le bassin industriel du Pays de Châteaubriant au XVIe siècle. Ce fut un tournant dans l’histoire de la région avec cette ceinture de mines de fer et de forges : Martigné, Pouancé, Sion, Moisdon, Abbaretz. Le Pays de Châteaubriant devenait une région de « métissage » social : ruraux et ouvriers se mélangeaient. Par la suite il y eu un autre type de « métissage » avec l’arrivée des Polonais, des Italiens, des Espagnols et des Turcs. Et maintenant des Anglais.
– La Mée : mais on est loin des Voltigeurs !
– V : Pas tant que cela ! Les Voltigeurs sont nés en 1907 sous l’impulsion des « Cercles ouvriers », ces groupes de chrétiens qui se réunissaient au début rue de la Coquerie à Châteaubriant, pour réfléchir à leur foi et à la façon de la vivre au pays de Châteaubriant
– La Mée : les Voltigeurs, autrefois, ont-ils marqué la vie du pays ?
– V : Certainement. A Châteaubriant quand on disait « je vais au Cercle », tout le monde savait que c’était le « Cercle Catholique », situé rue du 11 novembre. Lequel donna naissance aux Voltigeurs mais fut aussi, à la façon de l’époque, la « Maison de la Culture » qui offrait des activités très diverses : sport, théâtre, cinéma, scouts, colos de vacances. On y jouait des pièces de théâtre souvent inspirées des scènes bibliques. Avec de nombreux aspects cocasses comme dans « Notre Dame de la Mouise » où le rôle de la Grande Duduche était tenu par René Garnier, représentant de commerce au garage ménard, un grand gaillard de 1,91 m.
Que des hommes !
En effet, à Châteaubriant comme ailleurs, seuls les hommes étaient admis à jouer sur une scène de théâtre. Il y eut ainsi des hommes avec des rôles de femmes, en somme les travestis de l’époque ! Honni soit qui mal y pense !
Ce n’est qu’avec la pièce « Michel Strogoff » (janvier-février 1939) que trois jeunes filles de Châteaubriant furent conviées à monter sur les planches, aux côtés des hommes, grâce à une permission spéciale de ... l’Evêque ... qui s’était informé de la moralité irréprochable de ces demoiselles. Les femmes se faisaient ainsi une petite place.
– La Mée : aujourd’hui, 70 ans plus tard, cela fait plutôt rigoler ...
– V : Telles étaient l’époque, la société. Par delà cette anecdote, il faut savoir que « Le Cercle » était un lieu de rencontre ouvert à tous, cathos ou non. Et surtout très « populaire ». L’esprit des Cercles Ouvriers de 1885 demeurait. Et ce n’était pas banal en une région où les luttes politiques étaient vigoureuses.
Il est à remarquer cependant que ce brassage n’était « social » qu’en apparence : le milieu bourgeois ne fréquentait guère un Cercle jugé trop « populaire » .
Ouverture
– La Mée : n’y a-t-il pas eu une évolution un peu plus tard ?
– V : Si. Un autre fait confirme cette aptitude des Castelbriantais à la rencontre entre gens ayant des opinions, des options très différentes. Je pense à l’arrivée des Réfugiés Espagnols en 1939. Dans quelle misère ! Le jeune scout que j’étais ne l’a pas oublié et se souvient même d’un événement inouï : la fameuse pièce de théâtre, Michel Strogoff, fut jouée au profit des Espagnols devant les habitués du Cercle Catholique mais aussi devant tous les responsables de l’Amicale laïque. Ceux-ci furent reçus, à la grande porte, par le Vicaire-Directeur de Voltigeurs (l’abbé David). La solidarité transcendait les clivages. Qui l’eut cru ??
Résistance
– La Mée : en somme les Réfugiés espagnols furent, sans s’en douter, les artisans d’une réconciliation entre les Castelbriantais ?
– V : Certainement et il n’est pas étonnant de voir qu’ils se retrouvèrent, par la suite, très divers, dans la Résistance. Ce que l’on n’a guère évoqué ces temps-ci : une soixantaine de déportés, de tous « bords », cela compte dans l’histoire d’une région. J’avais espéré d’ailleurs que le 21 octobre dernier, il y aurait eu aussi une gerbe pour eux au Monument aux Morts. Ce sera peut-être pour 2008 ?
– La Mée : le Cercle, les Voltigeurs, auront été, avec beaucoup d’autres (notamment l’Amicale laïque), de bons acteurs de la vie locale ?
– V : Très bons , je le pense.
Des chaînons, si l’on veut, de l’histoire humaine.
— -
Vocabulaire :
Dans son sens militaire, le voltigeur est un fantassin porté en première ligne par un cavalier qui le prend en croupe. Plus généralement, le terme désigne les unités d’infanterie légère d’une compagnie d’élite destinée à agir en tirailleur en avant de la ligne d’un bataillon. La Garde impériale a eu jusqu’Ã 19 régiments de voltigeurs
— -
Relais Guy Môquet
Le 22 juin 1946 eut lieu à Châteaubriant une manifestation sportive appelée « Relais Guy Môquet » en souvenir de la Résistance face à la barbarie nazie. Dans l’espoir d’un monde de paix et de liberté.
(C.Bouvet, op.cit. p.24)
Ecrit le 6 avril 2021
De foot et de fric
Le bonheur, ça n’a pas de prix ! « Le marché du sport représente près de 2% du PIB (37 milliards d’euros) en France. Près de 270 000 équipements sportifs de proximité permettent aux Français de faire du sport et 78% d’entre eux reconnaissent cette facilité d’accès. Mais le sport reste cher pour 57% des Français qui, ne serait-ce que pour s’équiper, seraient prêts à dépenser en moyenne 103€. Au global, c’est un budget important qui a obligé près d’un Français sur deux à renoncer à la pratique d’un sport » (enquête Cetelem 2017).
Le sport par procuration, ça coûte moins cher aux individus, mais cela reste un coût important pour la collectivité : construction et entretien des terrains, subventions aux clubs sportifs, voire embauche des entraîneurs ou des joueurs.
A Châteaubriant, l’équipe des Voltigeurs a gagné son match contre Romorantin et affrontera Montpellier le 7 avril, du moins si la crise sanitaire
Et la municipalité de Châteaubriant a multiplié les mesures de soutien qu’elle a détaillées en conférence de presse avec grande solennité. Résumons :
– une banderole le 4 mars à la mairie
– une photo de groupe le 5 mars
– la première de couverture du magazine municipal d’avril et des bandeaux d’encouragement sur le site internet et les réseaux sociaux.
– aide pour la réalisation de 1000 maillots et 1000 masques destinés aux commerçants et partenaires
– quatre banderoles le 8 mars aux portes de la ville,
– 25 vidéos dynamiques et amusantes sur les joueurs, à partir du 15 mars
– un livre d’or dans les 26 bibliothèques depuis le 24 mars
– 200 boucliers à l’emblème des Voltigeurs
– des affiches dans les planimètres de la ville depuis le 29 mars
– des T-shirts distribués gratuitement sur la plateforme des cars scolaires
– deux banderoles et une œuvre de street art installées dans le stade,
– et pour la retransmission du match, le terrain sera fibré.
– et un encart spécial du journal L’Eclaireur 16 pages !
Avec ça, s’ils ne gagnent pas ...
... eh non, ils n’ont pas gagné !