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Je t’ai donné mon cœur ....
Le don d’organes et de tissus : ce n’est plus à la mode des médias. L’Affaire du sang contaminé, qui revient périodiquement. L’affaire de l’amiante qui va éclater un jour, la vache folle et la listéria occupent davantage notre actualité, avec les accidents de la route. Une actualité de mort, alors que le don d’organes et de tissus est une actualité de vie, au delà de la mort.
De tout temps, l’imaginaire humain n’a cessé d’être exalté par le fantasme d’un être composite, comme en témoignent les mythes antiques du Sphinx ou du Centaure, ou encore, dans la Bible, la création de la femme, par Dieu, à partir du prélèvement d’une côte de l’homme. C’est sur ce fond de chimères que s’inscrit l’histoire scientifique de la transplantation d’organes qui, à partir du XXe siècle, va faire basculer la greffe humaine de l’univers de la légende à celui de la réalité.
Le don le plus connu, c’est le don du sang . Le moins connu, c’est le don de moë lle osseuse. Et puis il y a le don d’organes, au nom de la vie.
– 1955 : première transplantation du rein
– 1967 : première transplantation du cœur
– 1972 : première transplantation du foie
– 1976 : première transplantation du pancréas
– 1981 : première transplantation du bloc cœur-poumon
– 1987 : première transplantation du poumon seul
Monsieur Claude ROYE, représentant de l’ADOT 44 (association pour le don d’organes et de tissus), est venu en parler vendredi 2 juin à Château briant.
Facile
« Il est plus facile d’être donneur d’organe que donneur de sang, dit-il, il suffit de remplir un formulaire et de prévenir sa famille de sa volonté de donner, un jour, si nécessaire, l’organe qui peut sauver la vie de quelqu’un d’autre ».
C’est facile ... mais c’est trop rare : l’an dernier en France, il y a eu 3800 greffes, mais il y avait 5000 personnes en attente. Sur les 1200 personnes ainsi délaissées, 500 à 600 sont mortes, faute d’avoir pu trouver un donneur.
C’est facile d’être donneur ... mais ce n’est pas si facile que cela, car les conditions sont très strictes : il faut que l’organe soit en bon état de conservation, que le prélèvement se fasse dans un centre spécialisé (Nantes et St Nazaire en Loire-Atlantique), et à proximité d’un centre de transplantation. Ce qui fait que seuls 5 à 10 % des personnes qui ont donné leur accord seront effectivement donneur un jour.
La vie d’abord
Le don d’organe est une façon de prolonger la vie de celui qui donne et qui vient, la plupart du temps, d’être victime d’un accident. « Les services d’urgence, SAMU, SMUR ou autre, ont une priorité essentielle : sauver la vie de la personne accidentée. Tout est tenté pour cela. Et ce n’est qu’en présence de mort cérébrale attestée par 3 médecins, qu’un prélèvement d’organe pourra être effectué si la personne l’a accepté par avance, et si la famille l’accepte » - « Il est important, pour le donneur potentiel, de bien prévenir son entourage, sinon, pour la famille, cela serait une secousse de plus. L’idéal, c’est quand toute une famille prend sa carte » dit encore M. Royé.
Dans tous les cas où un prélèvement est envisageable, un dialogue d’une extrême délicatesse - avec les familles - est engagé par le médecin qui doit aider la famille à supporter la souffrance de la mort d’un proche pour se tourner vers la possibilité du prélèvement.
Une heure
Dans tous les cas, le temps est compté. Une heure de perdue, c’est énorme.
Un cœur peut se conserver 6 heures,
un poumon c’est 12 h,
mais la rapidité de l’opération conditionne la réussite.
Les équipes des centres de prélèvement sont toujours prêtes à effectuer les analyses nécessaires pour savoir si le donneur possède le même groupe tissulaire que le receveur ou un groupe très voisin, et déterminer ainsi à quel type de malade il est possible de donner tel ou tel organe. Les fichiers nationaux sont consultés dans l’urgence, les malades sont toujours prêts à recevoir aussi. Si nécessaire des transports spéciaux assurent l’acheminement de l’organe salvateur et si aucun malade, en France, ne correspond aux caractéristiques de l’organe disponible, celui-ci est proposé aux pays voisins, les plus proches. C’est une véritable course contre la montre, une course pour la vie, c’est pourquoi il ne faut pas perdre une heure !
Dominos
On peut donner son cœur, la cornée de ses yeux, son foie, ses poumons, le pancréas, l’intestin grêle, des os, etc
« Il existe des greffes » en dominos « : une personne malade des poumons peut recevoir un ensemble cœur-poumons, parce que le résultat est meilleur, et donner son propre cœur à qui en a besoin. Les greffes du foie, c’est quelque chose de formidable : un même foie peut être greffé par morceaux sur plusieurs patients ».
Le pourcentage de réussite est de 75 % à 5 ans pour le cœur et c’est déjà une belle prolongation de la vie. La greffe d’un rein, même s’il ne fonctionne pas parfaitement, c’est un soulagement énorme pour ceux qui sont condamnés à 3 dialyses par semaine. La greffe de moë lle osseuse peut sauver un enfant leucémique.
La plupart des courants religieux sont , maintenant, favorables aux dons d’organes : le catholicisme, le protestantisme, l’islam, le judaïsme, une des grandes familles du bouddhisme. néanmoins, il faut noter l’opposition de l’hindouîsme et du schintoîsme ainsi que de certaines sectes.
L’absence de foi religieuse ne supprime évidemment pas les notions de fraternité, d’amour, de dignité, de respect. Si les prélèvements et transplantations d’organes ne posent pas dans ces cas de problème religieux, ils n’en incitent pas moins à une profonde réflexion
D’autres moyens ?
En réalité les seuls véritables problèmes éthiques posés par les transplantations aujourd’hui sont ceux soulevés par l’utilisation d’organes animaux. Les succès annoncés dans ce domaine (les xénogreffes hépatiques et cardiaques débuteraient en 2002 et seraient pratiquées en routine à partir de 2010, les xénogreffes cellulaires ou tissulaires de porc dans 5 ans) imposent une réflexion collective, seule capable d’éviter le décalage entre les perceptions de la société civile et les objectifs de la communauté scientifique.
Un cœur de porc ?
D’un point de vue individuel, ce qui est en jeu, c’est l’accord du receveur pour l’accueil, dans son corps, d’éléments d’origine animale. Sur le plan individuel, cette problématique se traduit par une interrogation fondamentale : l’utilisation d’un organe animal, en l’occurrence celui d’un porc, induit-elle une altération de la personnalité ?
La question n’est pas anodine : on a vu des greffés du cœur souffrir de dépression nerveuse grave pour le simple fait de ne pas savoir si leur nouveau cœur était celui d’un homme ou d’une femme.
La collectivité, de son côté, doit réfléchir à l’utilisation de l’animal en tant que pourvoyeur d’organes et pas seulement en tant que pourvoyeur de nourriture.
La société doit aussi développer des stratégies adaptées pour éviter le risque infectieux de transmission d’un agent pathogène dans l’espèce humaine.
Enfin, la manipulation transgénique qui rapprocherait le porc de l’homme et permettrait d’éviter le rejet, est-elle aujourd’hui éthiquement acceptable ?
On n’en est pas encore là , mais ces problèmes vont se poser dans 2 à 3 ans. En attendant, chacun a la possibilité de se déclarer donneur d’organes. où s’adresser ? Facile : dans toutes les pharmacies on trouve les formulaires nécessaires.
La mort, c’est dans la tête
Pendant longtemps on a cru que le cœur était l’organe essentiel à la vie, le lieu de tous les sentiments (« il a bon cœur »). « Je vous offre mon cœur » disait l’amoureux éploré à sa belle.
Et puis on a compris, plus prosaïquement, que le cœur était un organe très simple, juste une pompe qu’on peut faire fonctionner à la main, ou à l’électricité. Beaucoup d’autres organes peuvent être maintenus artificiellement en vie. Le seul organe essentiel, c’est le cerveau, c’est lui qui télécommande toute la machinerie humaine, un clignement d’Å“il, une accélération du pouls, la marche, la course, la prise de nourriture, le sommeil et le sourire. Si le cerveau est totalement mort, la vie autonome n’est plus possible.
Une autre façon de donner la vie
L’association France ADOT 44 mène des actions d’informations sur le don d’organes en France et plus particulièrement en Loire-Atlantique. En l’an 2000, en France, 3211 transplantations ont été réalisées (contre 3023 l’année précédente :
328 greffes de cœur
25 greffes cœur-poumons
70 poumons
806 greffes de foie
1924 greffes de rein
54 greffes de pancréas
4 greffes d’intestins
L’augmentation des prélèvements observés en 2000 (1016 au lieu de 970) est d’autant plus importante que les urgentistes assistent à une baisse relative des morts cérébrales de cause traumatique ainsi qu’Ã une baisse des accidents mortels de la voie publique. Rappelons que la mort cérébrale, qui est irréversible, permet de prélever d’autres organes, sains, qui peuvent servir à des malades graves.
L’accident vasculaire cérébral est désormais la cause principale des morts cérébrales et les greffeurs estiment que « la possibilité existe d’augmenter en France les prélèvements, à condition de prêter une attention plus soutenue à l’éventualité de prélever les personnes de plus de 60 ans ».
Toujours en l’an 2000, il y a eu 234 personnes mortes faute d’organes disponibles et 2303 personnes nouvellement inscrites en liste d’attente.
Au total, on compte en attente :
4893 personnes pour des reins
403 pour le foie
341 personnes pour le cœur
202 pour le pancréas
122 pour les poumons
58 pour cœur-poumons
17 pour des intestins.
L’analyse faite par l’établissement français des greffes confirme un accroissement lent mais progressif des besoins, en particulier pour le foie. Rappelons que chacun d’entre nous peut, par un simple papier porté sur lui, donner un accord formel pour le don d’organes. Sinon l’accord de la famille est demandé (ce qui retarde les opérations). Il existe un Registre National du refus qui contient, à la fin d’octobre 2000, 654 refus de mineurs (328 filles et 326 garçons).
Pourquoi les refus
L’an dernier, 2004 personnes en état de mort cérébrale ont été recensées, et 1016 ont été prélevées. La première cause de non-prélèvement est l’opposition soit du défunt, soit de la famille, soit du procureur de la République. Cette opposition est plus forte en France (32 %) que dans d’autres pays (l’Espagne par exemple avec 21,3 %). Le résultat de ces oppositions est une perte de 589 donneurs, ce qui en théorie constitue une perte de 1200 à 2000 greffons.
On peut écrire ou téléphoner à France ADOT 44 ,
16 rue Herman Geiger,
44300 Nantes
tél-Fax 02 51 72 27 15
Courrier : Franceadot44@wanadoo.fr
Cette association de bénévoles a besoin de fonds pour poursuivre son action. Il est donc possible d’adhérer à l’ADOT 44 (5€ F/an) et de faire un don.