Ecrit le 14 septembre 2016
C’est coton !
Beaucoup d’expressions françaises sont tirées du domaine du tissage et de la couture : ourdir un complot, donner du fil à retordre, battre à plates coutures, c’est cousu de fil blanc, être dans de beaux draps, suivre le fil rouge, jouer sur du velours, ne pas faire dans la dentelle, c’est du beau linge.
Et le nom des tissus a des origines géographiques souvent oubliées : ainsi, on nomme popeline (Ã l’origine papeline) un tissu qui a été créé en Avignon, ville papale au XIVe siècle ; organdi, un tissu fabriqué sous le nom d’ourguentch à Ourganda, ville du Turkménistan ; percale, sorte de toile fabriquée en Perse sous le nom de pargala ; l’écossais, l’indienne, l’ottoman, la toile de Jouy, le madras, l’oxford, le satin (de l’arabe zaytûn, transcription du chinois tsia-toung) sont faciles à situer sur une carte ! Mais qui connaît la différence d’origine entre le jean et le denim ? Le mot jean dériverait de jeane ou jannes, (toile) de Gênes prononcé à l’anglaise : cette toile de lin et coton, teinte en bleu indigo, fabriquée à Gênes, a été utilisée dès le XVIe siècle par la marine gênoise pour équiper ses bateaux de voiles et ses marins, de vêtements. Elle était aussi utilisée par les peintres. A Nîmes, au XVIIe siècle, les tisserands essaient en vain de la copier et créent alors une toile de coton écru à armure de serge, exportée à Gênes où elle est teintée en bleu indigo, d’où le nom de denim (de Nîmes).
C’est coton signifie « c’est délicat » ; l’expression était employée dans les filatures, où tisser ce matériau nécessitait une attention très soutenue pour empêcher l’apparition de bourres.
Jouer sur du velours : le velours fait allusion au tapis de jeu ; au départ, le fait de jouer sur du velours consistait à jouer avec de l’argent déjà gagné, sans prise de risque.
C’est du beau linge : l’expression désigne une personne de qualité, des gens importants, bien habillés, en langage d’aujourd’hui : des V.I.P.
A vous de jouer : d’où vient le nom du tissu nommé Liberty ? Et celui qui se nomme Prince de Galles ? réponses dans le prochain numéro de La Mée. (1)
Elisabeth Blondel.
Ecrit le 21 septembre 2016
C’est pain bénit !
Cette expression signifie c’est une aubaine , c’est bien mérité, cela tombe à pic. Notez qu’ici bénit(e) est un adjectif contrairement à béni(e) qui est le participe passé du verbe bénir. On écrira donc de l’eau bénite et l’eau a été bénie par le prêtre.
Beaucoup d’autres expressions comportent le mot PAIN, en voici quelques-unes :
– Ça ne mange pas de pain (ça ne coûte rien) : cette expression couramment employée aujourd’hui date du XVIIe siècle, époque à laquelle le pain était la base de la nourriture et où toute consommation abusive de cet aliment grevait le budget ; si quelque chose n’avait aucun impact sur le stock, il n’y avait donc aucune raison de s’en passer.
– Pour une bouchée de pain l’expression date du XVIIe siècle également ; au XVIe, on disait plutôt pour une pièce (=un morceau) de pain, c’est-à -dire pour trois fois rien, pour un montant dérisoire, en allemand Für einen Apfel und ein Ei (pour une pomme et un œuf !).
– Gagner son pain à la sueur de son front,
– Mettre au pain sec et à l’eau,
– Ne pas manger de ce pain-là ,
– Long comme un jour sans pain,
– Ôter le pain de la bouche,
– Manger son pain blanc en (ou le) premier (l’expression date de 1515 !)
– Faire passer le goût du pain (tuer),
– Avoir du pain sur la planche (au départ cela signifiait pouvoir vivre sans travailler ; à l’inverse, cela signifie maintenant avoir beaucoup à faire.
– C’est son gagne-pain.
Connaissez-vous l’origine du mot COPAIN ? réponse dans le prochain numéro de La Mée.
Elisabeth Blondel
Ecrit le 28 septembre 2016
Panacée
Avant de désigner, au sens propre, un élixir de longue vie, un remède universel et, au sens figuré, une solution à tout problème, PANACEE est en premier lieu une déesse appartenant à la mythologie grecque : Panakeia est une des filles du dieu de la médecine Asclépios (Esculape chez les Romains) et de ce fait petite-fille d’Apollon ; elle est aussi la soeur d’Hygie : oui, vous avez deviné l’étymologie du mot hygiène !
Elle était invoquée en Grèce au IVe siècle avant J.C dans la première phrase du serment d’Hippocrate : « Je jure par Apollon, médecin, par Asclépios, par Hygie et Panacée, par tous les dieux et toutes les déesses, les prenant à témoin, de remplir, selon ma capacité et mon jugement, ce serment et ce contrat. » (traduction du texte original).
Le mot panacée signifie remède à tous les maux parce qu’ il est formé de « pan » (tout) et de« akos »(remède- dont on retrouve la racine dans le mot pharmacie).
La déesse PANACEE est dite « la secourable » puisqu’elle soigne tous les maux
aussi bien corporels que mentaux. Elle détient l’élixir de longue vie dont la quête constituait l’un des deux objets du « Grand œuvre ».
Notons que la centaurée était autrefois considérée comme une panacée, car elle tient son nom du centaure Chiron qui avait enseigné la médecine à Asclépios.
Au sens figuré, dans bien des domaines, certains pensent avoir trouvé « la panacée aux maux de l’humanité » et il n’est pas rare d’entendre ...« la panacée universelle », expression à éviter, étant donné qu’elle constitue un pléonasme !
Elisabeth Blondel