Ecrit le 12 août 2020
Etymologiquement, le mot moulin est issu du latin molinum saxum (pierre à moudre). La racine indo-européenne, mel, a donné mola (meule et farine sacrée), molinum (moulin), molinarius (meunier d’un moulin à vent) et emolumentum (somme payée au meunier pour moudre le grain, d’où gain ).
La famille de ce mot comprend mouture, rémouleur, vermoulu, meule, meulière, moulinet, moulinette, mouliner, meunier (altération, sous l’influence de meule, de l’ancien français mounier), immoler et immolation, car dans l’antiquité on poudrait les victimes de farine sacrée (mola) avant de les sacrifier, molette, moleter et molaire (la dent qui sert à broyer les aliments), amidon (altération du grec amulon, fleur de farine = qui n’a pas été moulue) et amylacé (qui contient de l’amidon)
Le mot moulin entre dans de nombreuses expressions telles : on ne peut être à la fois au four et au moulin, on entre ici comme dans un moulin, se battre contre les moulins à vent (1), jeter son bonnet par-dessus les moulins, amener de l’eau au moulin de quelqu’un, être un véritable moulin à paroles.
A côté des moulins à vent, à eau, à papier, à légumes, à poivre, à café, se trouvent aussi au Tibet et au népal en particulier des moulins à prières, indissociables de la religion bouddhiste, qui sont de grands cylindres remplis de mantras (2)
Les patronymes Moulin, Dumoulin, Desmoulins, Mounier, Meunier sont courants, comme les noms de lieux-dits tels Le Moulin neuf ou Le vieux Moulin . n’oublions ni le Moulin Rouge ni le Moulin de la Galette situés sur la Butte Montmartre à Paris : le premier, un cabaret fondé à la fin du XIXe siècle est le berceau du Music hall, où se produisit la célèbre Mistinguett pendant les Années folles. A Sion-les-Mines le Moulin du Pont Godalin rappelle l’histoire des moulins à vent et offre encore de succulentes galettes de « bié naï ».
Boris Vian et son épouse Ursula ont habité longtemps dans les loges du Moulin Rouge, qu’ils ont aménagées à leur goût et où ils ont eu comme voisin de palier le poète Jacques prévert, avec qui ils organisaient les fêtes mémorables du Collège de pataphysique (3).
Le Moulin de la Galette, quant à lui, est le seul moulin à vent de Paris dont les meules sont encore en état de marche ; il était constitué au départ de deux moulins utilisés pour moudre le blé, presser le raisin et concasser des matériaux pour des manufactures : le Blute fin et le Radet. Notons que la galette était alors un petit pain de seigle qu’on dégustait au moulin avec un verre de lait, d’abord, puis de vin aigrelet ou de muscat, par la suite. Le Moulin de la Galette est vite devenu une guinguette où l’on dansait la polka, le quadrille, le chahut et le french cancan. Il a été un thème de prédilection pour les peintres Renoir, Toulouse-Lautrec et Van Gogh.
En littérature, de nombreux titres comportent le mot moulin ; nous en citerons ici trois des plus célèbres : Les lettres de mon moulin (A. Daudet , 1869), Le moulin sur la Floss (George Eliot, femme de lettres britannique, 1860) et Le moulin de Pologne (Giono, 1952).
(1) Cette expression, qui signifie se battre contre des ennemis imaginaires, est tirée
de Don Quichotte (Cervantès, 1605).
(2) Un mantra est une formule sacrée ; le fidèle fait tourner de la main droite le moulin à prières dans le sens des aiguilles d’une montre pour que la prière s’élève dans le ciel.
(3) Le Collège de pataphysique, fondé en 1948, est une « Société de recherches savantes et inutiles » qui promeut la « pataphysique » science fictive inventée par Alfred Jarry ; ses membres, les « satrapes », s’intéressent entre autres à la « vélocipédologie à la » crocodilologie « et à la » mythographie des sciences absurdes " .
DEVINETTE : Pourquoi les moulins à vent ont-ils deux portes d’entrée ?
REPONSe à la DEVINETTE du dernier numéro : c’est l’estran qui désigne la partie de la plage tour à tour découverte puis recouverte par la marée.
Elisabeth Catala